Si la région du Sud algérien est habituée depuis longtemps à faire face au manque de carburant, la crise du gasoil est, cependant, fortement ressentie ces derniers mois dans la wilaya d’Adrar. Et pour cause, les quelques stations-service éparpillées dans la vaste capitale du Touat ne bénéficient plus de quantités suffisantes pour répondre à la demande.
La quantité journalière distribuée par Naftal pour chaque station-service qui était, il n’y a pas si longtemps, de 40 000 litres a été ramenée à seulement 13 000 litres ! Mais quelles sont les raisons qui ont poussé Naftal à revoir à la baisse la quantité de gasoil distribuée dans cette région ? En l’absence des autorités compétentes en ce 18 février, journée non ouvrable pour l’administration, nous avons sollicité des propriétaires de station-service qui expliquent que cette pénurie est la conséquence directe de la fermeture de la raffinerie algéro-chinoise d’Adrar, implantée dans la ville de Sbaâ, à
50 km du chef-lieu de wilaya, propriété du groupe Sonatrach et la Chinese national petrolium corporation (CNPC), dont 70% des actions sont détenus par la société chinoise. Entrée en activité en mai 2007 avec une capacité de production de 600 000 tonnes par an (produits dérivés de pétrole), la fermeture de cette raffinerie avait été décidée suite au conflit opposant les travailleurs à leur employeur.
La reprise des activités de cette raffinerie annoncée tarde toujours à être exécutée, et ce, en dépit d’un accord trouvé entre Sonatrach et la société chinoise, en janvier dernier. Mais pas seulement ! La pénurie serait, par ailleurs, provoquée par les travaux d’entretien engagés, ces derniers temps, par la raffinerie d’Arzew dont les produits alimentent, en grande partie, la région du Sud. Ceci sans parler des intempéries qui causent aussi un autre problème qui entrave l’acheminement du carburant du Nord vers le Sud. “Aujourd’hui, nous ne recevons plus que
12 000 à 14 000 litres par jour, soit près de trois fois moins de ce que Naftal nous distribuait, environ
40 000 litres par jour, avant le mois de décembre dernier. Franchement, on éprouve toutes les difficultés du monde pour satisfaire la demande de nos clients, qui plus est, devient de plus en plus importante. 13 000 litres suffisent à peine pour quatre ou cinq camions !” regrette le propriétaire d’une des plus importantes station d’Adrar, où s’approvisionnent presque tous les camionneurs interdits d’accéder aux stations-service sises dans le centre-ville. La présente pénurie aura ainsi provoqué une forte tension, notamment chez les camionneurs et autres transporteurs devant parcourir souvent des centaines de kilomètres pour accomplir leurs services respectifs.
Les interminables queues sont perceptibles dans toutes les stations-service, privées ou publiques, où nous nous sommes rendus ce week-end. En fait, cette situation est remarquable à plusieurs centaines de kilomètres bien avant la ville d’Adrar, puisque les villes de Ghardaïa, Naâma et Timimoun sont également affectées par la pénurie de gasoil. “Vous imaginez que j’ai déjà passé quatre nuits ici à la pompe à essence, et je ne sais pas encore si je suis servi aujourd’hui ou non, alors que mon autorisation, limitée à 5 jours, pour faire le trajet vers le Mali expirera dès demain ! D’où je serai d’ailleurs obligé de me présenter, une fois mon camion alimenté en carburant, à la direction des douanes pour refaire mon autorisation, dite passe-avant”, affirme, la mine défaite, K. D., camionneur rencontré à la station-service dite M’rabti implantée sur l’axe routier joignant Adrar à Reggane.
Ce camionneur désabusé ne rate pas l’occasion pour lancer un appel aux responsables de l’unique télévision nationale, (ENTV) pour dépêcher une équipe sur les lieux afin de rendre compte de cette “amère réalité que nous vivons loin des yeux des décideurs”. Cette réalité est davantage amplifiée de plus en plus qu’on avance vers les régions de l’extrême sud du pays, telles que Reggane, Bordj Badji-Mokhtar ou encore la commune frontalière avec le Mali, Timiaouine.
F. A