Après la débâcle municipale des socialistes en France, Un changement dans la continuité

Après la débâcle municipale des socialistes en France, Un changement dans la continuité
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Plus de 155 villes et des bastions symboliques comme Bobigny (à gauche depuis plus d’un siècle), Toulouse (1912), la Roche-sur-Yon (37 ans), Limoges, Niort, Nevers, Angers, Saint-Ouen, Pau ou, encore, Quimper… perdus. Pis : le fief de Corrèze du président Hollande a basculé à droite.

Le vote sanction est sans équivoque. Il se traduit par la perte pour les socialistes d’au moins 155 villes de plus de 9.000 habitants, effaçant du coup la débâcle de la droite de 2008 (82 villes de plus de 10.000 habitants). Complètement laminé, le camp socialiste (40,57%) est débordé par le triomphe de la « vague bleue » (45,91% de voix) et la percée du Front national (11 mairies et 6,84%), pourtant quasiment absent à l’échelon local et revendiquant désormais le « meilleur score de son histoire ». Une autre formation d’extrême droite, la Ligue du Sud, a, quant à elle, ravi trois municipalités dans le département du Vaucluse (Sud). La bérézina municipale qui vire à l’humiliation n’a pas encore révélé l’étendue du désastre qui va certainement se poursuivre aux régionales de septembre prochain où la Chambre haute tombera, au regard des résultats de ce « dimanche noir », dans l’escarcelle de la droite ragaillardie par l’échec de la gauche en décomposition. Sur les 178 sièges (96 de droite et 82 de gauche) à renouveler au suffrage universel indirect (vote des maires, députés et conseillers régionaux), pas moins de 17 sont espérés par l’UMP. Sortie groggy, la gauche est dans tous ses états. « Ça tape fort ! », reconnaît le président de l’Assemblée, Claude Bartolone. « C’est une défaite, les gens de gauche nous ont sanctionnés. Ils n’y retrouvent pas leur compte », assène l’élu socialiste de Dijon, François Rebsamen. Les signaux de désaffection, particulièrement dans le réservoir socialiste, se traduisent par un taux d’abstention record (38%) au premier comme au deuxième tour. « Je pense que nous n’avons pas assez expliqué que l’action de redressement engagée depuis 2012 était essentielle pour l’avenir de notre pays, que la situation de nos finances publiques, de nos entreprises et notamment de notre industrie était particulièrement dégradée et exigeait beaucoup d’efforts et de réformes sous peine de voir la politique de la France dictée par les marchés financiers », a expliqué le Premier ministre Jean-Marc Ayrault. La France de Hollande n’a pas tenu toutes ses promesses : le chômage atteignant, en février, le chiffre record de 3,34 millions, un déficit public en hausse (4,3% contre 4,1% en 2012), bien loin des engagements pris auprès de Bruxelles (moins de 3% en 2015), une dette publique plus importante (93,5% du PIB contre 90,6% en 2012), les investissements des entreprises au plus bas. La crise de confiance mine la France de Hollande, accusé d’avoir failli à redonner de l’espoir dans un pays en crise, et ce, à quelques semaines du deuxième anniversaire de son investiture. Le besoin de « justice sociale » revient tel un leitmotiv chez des ministres, comme l’écolo Cécile Duflot ou Benoît Hamon, à l’aile gauche du PS. Le désaveu est ainsi perceptible dans sa propre majorité où quatre courants du mouvement ont donné rendez-vous aux députés, lundi, à l’Assemblée nationale pour demander « une réorientation » de la politique menée et aborder la question de la confiance au prochain gouvernement. Les écologistes, dont les bons scores font un allié incontournable, appellent à plus de « solidarité » envers les plus modestes et à l’abandon de la politique d’austérité devenue insupportable. Pris dans l’étau de la « première force politique » et de sa propre famille de gauche, Hollande cédera-t-il aux exigences de changement de cap ? Dans ce climat d’incertitudes, la ligne rouge du « pacte de responsabilité », permettant de réduire les charges pour favoriser la relance de l’emploi, et les 50 milliards d’économie qu’il entend réaliser d’ici 2017, a été tracée par l’Exécutif qui tient aux deux réformes phare du quinquennat. Tous les regards sont maintenant tournés vers le remaniement ministériel attendu incessamment avec ou sans Ayrault pour « repartir de l’avant ». L’option d’un gouvernement « resserré », constitué d’une dizaine de portefeuilles, est jugé inéluctable pour acter un « changement de personne sans changement de la ligne politique », selon la formule du politologue Jérôme Sainte-Marie.

Larbi Chaabouni