Après deux journées de protestation, le CNES espère l’ouverture d’un débat

Après deux journées de protestation, le CNES espère l’ouverture d’un débat

Le Conseil national des enseignants du supérieur (Cnes) a conclu avec satisfaction son débrayage de deux jours (18-19 mars), dont l’objectif était «de dénoncer et alerter les autorités et l’opinion publique sur les dangers qui guettent le système universitaire».

Abdelmalek Rahmani, secrétaire général du Cnes, a affirmé au Temps d’ Algérie que le taux de participation national était estimé à 75% et que sur 34 wilayas, 30 ont bien suivi le mouvement.



«Ce débrayage est une réussite et nos collègues y ont largement contribué. Notre objectif est atteint. Je tiens à souligner que nos revendications ne sont pas seulement d’ordre matériel, comme certains le laissent entendre. Nous voulons débattre de toutes les problématiques liées à l’université. Nous n’avons pas l’occasion de profiter d’un débat qui s’organise à huis clos. Nous revendiquons plus d’espace de liberté, la possibilité de discuter de toutes les problématiques surtout celles liées à la pédagogie, la recherche, la démocratisation de l’université mais ces questions sont du domaine du ministère de l’Enseignement supérieur qui n’est peut être pas à même de les régler. Je tiens à dire que les enseignants dont la fonction est de transmettre le savoir sont découragés. La marginalisation sciemment entretenue est un sentiment difficile à gérer», a-t-il expliqué.

Nécessité d’instaurer un dialogue social

Interrogé sur l’absence de mobilisation dans certaines universités, dont celle de Bouzaréah, où les enseignants affiliés au Cnes ont refusé de débrayer car ils ont estimé que les revendications socioprofessionnelles sont secondaires au vu des conditions matérielles désastreuses, M. Rahmani a expliqué que le désarroi de ces enseignants n’était pas fortuit et qu’il était la conséquence de l’absence de confiance entre les parties.

Selon lui, ce sentiment traduit également une volonté de radicaliser le mouvement car deux jours n’étaient pas suffisants.

«L’université de Bouzaréah est sujette à de nombreux problèmes qui ont démobilisé les enseignants. La tutelle a fait des calculs dangereux car en supprimant des espaces d’expression modérés, elle a ouvert la voie royale à une expression radicale. Ce phénomène de radicalisation de la société est réel et les enseignants l’observent tous les jours. Il faut souligner que les mouvements de protestation qui ont été observés dans le sud du pays et dans d’autres villes sont le produit d’une absence de dialogue social. Les pouvoirs publics n’ont pas la volonté de construire ce dialogue avec les partenaires sociaux capables d’apporter une contribution. Au contraire, ils verrouillent tout, contrôlent tout mais cela ne mènera qu’à des conflits stériles», a-t-il déploré.

Ajoutant que les autorités devraient faire confiance aux partenaires sociaux compétents car les puissances mondiales sont en train de mener une concurrence «déloyale et mortelle», notamment par le biais du classement mondial des universités.

«Ces puissances considèrent que la position de tout pays dans le gotha mondial est conditionnée aux performances universitaires. La bataille du XXIe siècle est celle du savoir et des universités. Nous sommes loin du niveau de certains pays et nous n’avons pas encore les moyens de prétendre à une quelconque concurrence. Le Cnes est convaincu que la performance de nos universités dépend de l’implication de tous dans la réflexion sur notre système universitaire. Toutefois, nous regrettons que les portes nous soient fermées alors que nous pensons avoir l’expérience à même de remédier à la désagrégation de notre système universitaire. Je tiens à souligner qu’il faut aussi une réelle volonté de réformer afin de parfaire notre système et nous diriger vers des pôles d’excellence», a-t-il déclaré.

Sabrina Benaoudia