Après 3 jours de grève des médecins spécialistes «Médecins et tutelle prennent les malades en otage»

Après 3 jours de grève des médecins spécialistes «Médecins et tutelle prennent les malades en otage»
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Le bras de fer continue

«Ça fait plus de 30 jours que j’attends l’opération chirurgicale, et ce après 6 mois d’attente pour être admis à l’hôpital, Chaque jour on reporte l’opération», a regretté un patient sur son lit au CHU Mustapha-Pacha à Alger



Enclenchée depuis le 22 avril dernier, la grève illimitée des médecins spécialistes passe sous silence, au détriment de la vie humaine. Le Dr Yousfi, président du Snpssp, joint par téléphone a parlé d’un taux de 80% de suivi de la grève à l’échelle nationale. Alger enregistre, selon lui, 75%, Bouira 100%.

Selon le président du Snpssp, le mouvement de protestation restera mobilisé jusqu’à satisfaction totale de leurs revendications, tout en rassurant que le service minimum est garanti pour les malades et les cas urgents.

Répondant au sujet d’un éventuel contact avec la tutelle, le Dr Yousfi regrette le fait que «la tutelle ait fermé toute les portes de dialogue depuis longtemps».

Aucun signe de mouvement de protestation extérieur, n’a été observé hier, au 3e jour de la grève des chirurgiens au CHU Mustapha Bacha à Alger. «tout se fait dans le silence», selon le Dr M.D, médecin spécialiste dans cet établissement universitaire.

«Moi-même je suis concerné directement par le mouvement de protestation. Je ne suis pas en grève, car, tout simplement, je ne peux pas laisser les patients souffrir», dit-il. Tous les malades reçus ont été pris en charge, a affirmé le Dr M.D, qui n’a pas hésité à fustiger les médias qui traitent, selon lui, tous les médecins de la même manière. «Dans tous les domaine, il y a des gens bien et d’autres moins bien. La noblesse de la médecine, veut de nous qu’on soit au service de la vie humaine quelles que soient les difficultés», selon ce médecin spécialiste qui s’exprimait sous l’anonymat.

D’autre part, le Dr M. D. soutient le mouvement de grève des médecins spécialistes, tout en regrettant que le secteur de la santé soit malade depuis longtemps.

«Je ne suis pas en grève, mais je soutiens ce mouvement de protestation à cause de l’injustice qui règne, alors que l’on travaille dans un même service», déplore-t-il.

Deux poids deux mesures. Allusion faite au secteur de la santé publique et le secteur dépendant directement de l’enseignement supérieur. Les médecins spécialistes pointent le doigt sur l’inégalité relative à l’IRG.

«Sans parler toutefois des conditions de travail lamentables qui se répercutent négativement sur les patients, Il y a des médecins qui cotisent à 35% de l’IRG, et d’autres ne cotisant qu’à 10%, de leurs salaires. Ceux qui ont un double salaire en plus: le salaire de l’enseignement supérieur et celui des hôpitaux, alors que nous faisons le même travail», diront de nombreux médecins que nous avons approchés.

L’exiguïté des loges de garde, le manque d’effectifs, notamment les paramédicaux, la pénurie des médicaments qui revient souvent, l’anarchie qui règne entre les agents, qui perturbe la quiétude des médecins dans les services des urgences et autres tâches quotidiennes, sont quelques-unes des préoccupations qui interpellent les consciences. «Comment voulez-vous assurer un meilleur rendement, dans un environnement agressif et compliqué?» s’est interrogé un groupe de médecins.

«Cela fait plus de 30 jours que je suis hospitalisé. Chaque jour on me recommande de ne pas manger, pour subir l’intervention chirurgicale. Et chaque fois on reporte l’intervention chirurgicale», regrette Mohand Aït Kaci, 72 ans, qui s’est exprimé en pleurant devant sa famille qui lui rendait visite au bloc CCB.

«Pis, il a fallu 6 mois d’attente et de nombreuses interventions de part et d’autre pour que Mohand Aït Kaci, soit admis au CHU Mustapha», ajoute son fils Mohamed, âgé de 30 ans.

«On m’a dit qu’il faut le ramener à la maison et revenir une autre fois». «Mais a-t-on oublié qu’on a attendu six mois pour son admission? Et ils osent demander encore de revenir une autre fois», déplore-t-il.

«Qui va le soigner à la maison si ce n’est les spécialistes qui vont le prendre en charge à l’hôpital?» s’est-il encore interrogé. Entre l’enclume et le marteau, les malades sont pris en otage avant tout. De nombreux médecins spécialistes qui ne sont pas en grève, soutiennent, toutefois, le mouvement de protestation, notamment en s’abstenant d’effectuer des interventions chirurgicales. «Ce n’est pas parce qu’il y a eu quelques augmentations de salaires, que l’on peut dire que tous les problèmes de la santé sont réglés», relève nombre de nos interlocuteurs.