Cette rentrée hivernale renseigne sur l’immensité du chantier et sa grande sensibilité.
C’est aujourd’hui la rentrée scolaire après un repos hivernal exceptionnellement long. Ces vacances trimestrielles sont en effet spéciales et l’on n’est pas près de les oublier. Ecourtés à une seule semaine par le ministère de l’Education nationale pour «coller» aux normes Unesco en matière de nombre de semaines de cours, les vacances d’hiver ont été rallongées d’une dizaine de jours en raison d’un contexte social et sécuritaire particulier. Le bras de fer entre quelques centaines de lycéens à travers le pays et leur tutelle ministérielle expliquait difficilement une marche arrière assez brutale, faut-il le souligner.
Mais les événements vécus par le pays une petite semaine après le «recul» sur la durée des vacances, a montré que le bras de fer n’en était pas un, en tout cas, pas entre l’administration de l’Education nationale et les élèves. L’enjeu était donc ailleurs et un véritable complot était tissé, où les lycéens devaient être les outils du chaos aux mains des conspirateurs. Les 18 jours de vacances s’expliquent assez logiquement, compte tenu de l’actualité récente qui a bouleversé toute la société. Au jour d’aujour-d’hui, il est clair qu’il n’existe aucun argument susceptible de perturber la rentrée des classes. Le deuxième trimestre démarre néanmoins sur un goût quelque peu amer.
La «bataille perdue» de l’allongement de la durée des cours effectivement rendus, pour rapprocher l’école algérienne des normes universelles, aura certainement des conséquences sur la mise en place des instruments de la réforme engagée par Nouria Benghebrit depuis son arrivée à la tête de l’Education nationale.
Même si des considérations «supérieures» ont amené la ministre à surseoir à sa réforme dans le volet des vacances scolaires, il reste que ce «recul» jette un voile sur la démarche du ministère. Benghebrit, de son côté, se défend de faire marche arrière et soutient lors d’une allocution à l’ouverture d’une rencontre avec les partenaires sociaux qu’ «abandonner certaines décisions n’est pas une chose négative». La ministre qui se place sur le terrain pédagogique, entend faire l’évaluation du premier trimestre et la préparation du deuxième. Dans l’escarcelle de la ministre, il y a également l’année scolaire 2017-2018, qu’il va falloir préparer, cela sans oublier les examens de fin de cycle, sachant que le bac de l’année dernière a été traumatisant pour l’ensemble de la société. Nouria Benghebrit semble déterminée à aller de l’avant et annonce en avril prochain, une rencontre nationale avec les partenaires sociaux dédiée à la présentation des conclusions d’une consultation nationale sur l’évaluation scolaire.
C’est la seconde étude du genre, la première ayant montré un important déficit des élèves dans les matières scientifiques. Il reste que malgré les interférences idéologiques et autres qui entravent l’avancée des réformes, la ministre tient à son style entièrement tourné sur un dialogue quasi permanent avec l’ensemble des acteurs de l’Education nationale. Le chemin s’en trouve plus difficile, mais, pense, Mme Benghebrit, les résultats n’en seront que mieux consolidés. Aussi, sur l’évaluation du premier trimestre, elle dit attendre la contribution de tous les encadreurs et les enseignants au niveau local. En fait, alors qu’en apparence, l’Education nationale fait du surplace, il semble que sur le terrain, les acteurs en sont au coeur du problème de l’école.
La pédagogie prend la part du lion dans les rencontres régionales et nationales, loin des considérations politiciennes. Cependant, les aspects «visibles» de la réforme, sont le talon d’Achille du secteur qui a abandonné la réforme du baccalauréat et la réduction des vacances scolaires. De fait, l’école algérienne ne verra aucune «grande nouveauté» cette année. Mais à en croire Mme Benghebrit, un réel travail de consolidation est en marche au niveau du personnel du ministère qu’elle dirige, avec ses nombreux démembrements au niveau local et autant de soucis à régler, avant d’en arriver à élever le niveau.
En fait, cette rentrée hivernale renseigne sur l’immensité du chantier et sa grande sensibilité. Au fur et à mesure qu’elle ouvre des dossiers, avant d’aborder l’aspect pédagogique, la ministre se rend compte de plusieurs couches qui n’ont rien à avoir avec l’école, mais dont il faut tenir compte. C’est dire qu’il n’est pas facile de réformer, à plus forte raison un système scolaire et particulièrement lorsque ledit système est algérien.