Le cafouillage continue dans l’application des mesures prises par le gouvernement pour plafonner les prix du sucre et de l’huile. Cevital, premier producteur algérien de ces deux produits, a été sommé de se conformer à l’accord conclu avec le ministre du Commerce pour faire baisser les prix, alors que sur le terrain, le groupe de Issad Rebrab demeure le seul producteur qui a revu ses prix à la baisse
Les Algériens étaient confrontés à une augmentation subite des prix du sucre et de l’huile. Une situation qui a suscité une agitation sociale qui s’est achevée par la mort de cinq personnes, de nombreux blessés et a causé des centaines de millions de dollars de dégâts matériels
Pour juguler cette hausse des prix, un Conseil interministériel s’est tenu samedi durant lequel plusieurs mesures ont été prises. Ces mesures portent sur une suspension et une exonération des droits de douanes, de taxes et d’impôts représentant un total de charges de 41% qui vient en déduction des prix de revient, du 1er janvier au 31 août 2011
De ce fait, les importateurs de sucre et les producteurs de l’huile ont reçu un cadeau inespéré de la part des pouvoirs publics. Le lendemain, les producteurs et le ministre de tutelle ont convenu de plafonner les prix à la consommation de ces deux produits à 90 DA le kilo de sucre et à 600 DA le bidon d’huile et ce avant la fin de la semaine
L’État assurera la prise en charge du différentiel des prix à condition que les opérateurs donnent des instructions à leurs réseaux de distribution et aux grossistes avec lesquels ils traitent et à travers eux aux détaillants en vue d’appliquer ces prix dans un délai ne dépassant pas une semaine
Deux jours après cet accord, le cafouillage continue dans l’application de ces mesures sur le terrain. La confusion va du grossiste au détaillant avant qu’elle n’atteigne le consommateur qui ne sait plus qui croire dans tout ce méli-mélo. C’est le bazar
MISE EN DEMEURE ADRESSÉE À CEVITAL
Les équipes de contrôle dépêchées par la Direction du contrôle commercial et de la répression de la fraude pour vérifier l’application de l’accord conclu avec les opérateurs «ont constaté que les prix appliqués par Cevital sur le sucre et l’huile ne sont pas conformes», a appris l’APS auprès du ministère du Commerce.
À cet effet, une mise en demeure a été adressée à ce groupe pour se conformer aux prix fixés au terme de l’accord conclu. Selon la même source, plusieurs opérateurs dans la production et la transformation du sucre et de l’huile se sont élevés contre les nouvelles pratiques exercées par Cevital pour «casser les prix de ces deux produits, élargir sa part de marché et maintenir sa position dominante sur ces deux produits ».
«Ces pratiques déloyales auxquelles a eu recours à partir de mardi cet opérateur ont provoqué une anarchie totale» sur le marché, ajoute la même source. Avant que cette information ne soit rendue publique, nous avons effectué une virée dans les quartiers d’Alger où sont concentrés les grossistes de produits agroalimentaires. Le hic : le constat n’était pas du tout le même.
AFIA, COGRAL, SAFIA ET ZINOR SE FONT DÉSIRER
Dans la commune du Gué de Constantine (Semar) et à Jolie-Vue, dans la commune de Kouba, Alger, où se concentre la grande majorité des grossistes et des demi-grossistes de produits alimentaires, le contraste est extrêmement flagrant avec le constat effectué par les équipes de contrôle de la Direction du contrôle commercial et de la répression de la fraude. Dans la plupart des magasins et dépôts visités, les prix de l’huile du groupe agroalimentaire Cevital poursuivaient leur mouvement baissier.
Une bonbonne de 5 litres de l’huile «Elio» est cédée à 550 dinars contre 750 dinars il y a quelques jours au moment, et ce, où les autres marques, à l’instar de Afia, Cogral, Safia et Zinor se font désirer. « Cevital nous approvisionne et avec des quantités suffisantes contrairement aux autres producteurs », nous a confié l’un des rares grossistes de Semar qui a accepté de répondre à nos questions.
Nous avons trouvé le même tableau chez les commerçants de Jolie-Vue mais avec une différence de 10 dinars. La même bonbonne de 5 litres de l’huile «Elio» est affichée à 560 dinars. Encore une fois, les autres marques n’emplissent pas les comptoirs. D’ailleurs, les commerçants s’interrogent sur cette pénurie subite qui touche ces produits.
LE SUCRE INTROUVABLE CHEZ LES GROSSISTES
Pour ce qui est du sucre, il est quasiment introuvable chez les grossistes. Au niveau du supermarché « UNO » du groupe Cevital, à Garidi (Kouba), 1 kilo de sucre en vrac se vend à 80 dinars et la bouteille « Elio » d’un litre s’affiche à 115 dinars, alors que la bonbonne de 5 litre est introuvable.
En revanche, cela n’a nullement touché les détaillants. Les prix du sucre et de l’huile restaient presque inchangés, avec la bonbonne d’huile «Elio et Afia» de 5 litres à 765 DA et le sucre à 110 dinars. À cet effet, Cevital invite tous les opérateurs de la distribution, y compris les détaillants à ne pas dépasser les prix aux consommateurs fixés par le gouvernement pour le sucre et l’huile.
CEVITAL ANNONCE DE NOUVELLES BAISSES DES PRIX
Dans un communiqué rendu public, hier, le groupe de Rebrab a annoncé de fortes baisses des prix de ces deux produits. « À la suite des dernières décisions du gouvernement d’exonérer les produits alimentaires de large consommation des droits de douanes (5%) et de la TVA (17%), Cevital a immédiatement répercuté l’intégralité de ces baisses consenties par les pouvoirs publics pour stabiliser les prix de l’huile et du sucre sur le marché », précise le communiqué.
Cevital propose ainsi le kilogramme de sucre à 74,50 dinars et la bonbonne d’huile de 5 litres à 495 dinars, deux litres à 210 dinars et 110 DA pour la bouteille d’un litre. Au moment où nous mettons sous presse cet article, la réaction de Cevital concernant la mise en demeure du ministère du Commerce n’est pas connue.Wait and see.
Hamid Mohandi