La guerre en Syrie provoquera-t-elle, pour les pays du Maghreb arabe, les mêmes conséquences que celles de l’après-conflit afghan ? On se souvient, lorsque, de retour d’Afghanistan, après la fin du conflit avec l’armée de l’ex-URSS, nombre d’«afghans arabes» ont créé des groupes terroristes dans leurs pays respectifs, dont le Groupe islamique armé (GIA), en Algérie. Le retour des djihadistes des pays du Maghreb arabe partis «combattre» en Syrie provoquerait-il les mêmes conséquences ? Les craintes sont là, pas forcément injustifiées.
Ces craintes sont ressenties, particulièrement, en Tunisie dont de nombreux djihadistes «se sont rendus en Syrie, intégrant des groupuscules affiliés à Al Qaïda, pour «combattre» le pouvoir syrien.
Ces mêmes craintes sont illustrées par le quotidien tunisien Al Maghreb qui, citant les propos de Seifeddine Raïes, porte-parole d’Ansar Al Charia, un groupe salafiste djihadiste tunisien, a rapporté, dans son édition d’hier, que cette organisation attendait le retour des djihadistes tunisiens de Syrie pour «lancer la guerre sainte» en Tunisie.
Selon ce journal, Seifeddine Raïes parlait au nom de son chef, Abou Iyadh, qui, ajoute cette publication, aurait confié à ses partisans que le moment n’est pas encore venu pour entrer en guerre contre le pouvoir en Tunisie et que le mouvement ne dispose pas actuellement des mêmes moyens que l’institution sécuritaire tunisienne.
Abou Iyadh, chef d’Ansar Al Charia, en fuite, note-t-on, depuis l’attaque de l’ambassade des Etats-Unis, le 14 septembre 2012, attend impatiemment le retour des jihadistes tunisiens de Syrie pour déclencher la guerre sainte dans le pays, écrit ce journal qui a ajouté qu’un autre chef salafiste, que ce média n’a pas cité, a confirmé, dimanche, qu’Abou Iyadh attend impatiemment le retour des «héros» de Syrie pour entamer l’affrontement.
Pour rappel, des affrontements ont déjà eu lieu entre partisans d’Ansar Al Charia et les forces de sécurité tunisiennes, faisant un mort et des blessés.
Cela s’est produit lorsque Ansar Al Charia a, malgré l’interdiction opposée par les pouvoirs publics tunisiens, tenu à organiser un congrès à Kairouan, il y a environ une dizaine de jours.
Ces affrontements ont éclaté entre policiers et salafistes à la cité Ettadhamen, en banlieue ouest de Tunis, où Ansar Al Charia a appelé ses militants à se réunir faute de pouvoir se rendre à Kairouan (150 kilomètres au sud de Tunis), rappelle-t-on.
Si les «djihadistes tunisiens et libyens sont les plus nombreux parmi les radicaux et extrémistes des pays maghrébins qui se sont rendus en Syrie au nom du djihad et combattre le pouvoir de Bachar Al Assad», des extrémistes d’autres pays, dont l’Algérie, se trouvent, eux également, sur place. La télévision syrienne a plusieurs fois annoncé la mort dans des combats de djihadistes tunisiens, libyens et algériens.
La vigilance populaire, l’espoir
Même en l’absence de statistiques précises sur le nombre de djihadistes maghrébins en Syrie, il est certain que la présence de ces extrémistes qui luttent, en partie, au sein de l’organisation Al Nosra, sévissant dans ce pays au nom d’Al Qaïda, aura des répercussions sur les pays du Maghreb arabe. Ce qui fait dire à beaucoup que les révolutions du Printemps arabe ne sont pas encore arrivées à leur terme…
Un printemps à plusieurs facettes
Un avant-goût de la menace représentée par le retour des djihadistes partis en Syrie est donné par les atrocités et crimes effroyables commis par des djihadistes saoudiens, notamment en terre syrienne, au nom de la lutte contre le pouvoir de Bachar Al Assad et au nom de la religion très souvent victime de ces extrémistes.
Face à ces menaces, la prise de conscience populaire permet d’espérer que le pire sera évité. Hier, un rassemblement de Tunisiens a eu lieu à l’appel de la coordination nationale de soutien à la Syrie, devant le siège du ministère tunisien des Affaires étrangères, réclamant le rétablissement des relations diplomatiques entre la Tunisie et la Syrie. Les relations diplomatiques entre les deux pays avaient, rappelle-t-on, été rompues par le gouvernement tunisien dont la majorité est issue du parti islamiste Ennahda dirigé par El Ghannouchi.
M. A.