Revisiter la crise de l’été 1962 n’est toujours pas une mince affaire tant les répliques sur l’Algérie post-indépendante se font ressentir à ce jour. Pourtant, c’est à cet exercice périlleux, souvent source de polémiques, auquel se sont livrés hier à Alger quelques conférenciers lors du forum qu’organise le quotidien gouvernemental El Moudjahid et l’association Machâal Echahid. Consacrée au cinquantenaire de l’élection de l’Assemblée constituante, cette conférence a permis aux intervenants d’évoquer les évènements et les péripéties qui ont suivi la proclamation de l’Indépendance, mais aussi de rendre hommage à une figure de proue du mouvement national, en l’occurrence le “pharmacien de Sétif”, Ferhat Abbas, premier président du GPRA, mais aussi de cette Assemblée. “Initialement, le référendum sur l’Assemblée constituante devait avoir lieu au mois d’août, mais il a dû être reporté au 20 septembre en raison des rivalités et des confits entre dirigeants”, rappelle l’universitaire Amar Khila. Quelques jours plus tard, soit le 25 septembre, feu Ahmed Ben Bella est désigné pour former le premier gouvernement de l’Indépendance. L’Exécutif provisoire remet les pouvoirs au président de l’Assemblée constituante et le
28 du même mois, Ben Bella présente son gouvernement à l’Assemblée dont le programme est inspiré par la Charte de Tripoli. Alors qu’elle devait élaborer une Constitution, l’Assemblée constituante a fini par entériner celle élaborée sous l’injonction de Ben Bella au cinéma le Majestic. “L’AC a fini par entériner une Constitution élaborée ailleurs”, résume Amar Khila. Pour sa part,
Me Amar Bentoumi, ancien ministre de la Justice du premier gouvernement de l’Indépendance, s’est attardé sur les rivalités qui opposaient les dirigeants de l’époque autour de la confection de la liste des membres du gouvernement provisoire. “Les choses n’étaient pas faciles et tout était confus, dans l’élaboration de la liste de ce gouvernement du fait de conflits personnels”, a-t-il dit. “La première rencontre entre Krim Belkacem et Ahmed Ben Bella, tenue à Alger pour arrêter la composante définitive du gouvernement, a été sanctionnée par un échec. Cela a attisé la crise et les incompatibilités personnelles”, avait déclaré un peu plus tôt l’avocat à l’APS. “La sagesse, affichée par la plupart des dirigeants, à leur tête Benkhedda Benyoucef, avait prévalu dans la Constitution du premier gouvernement de l’Algérie indépendante, ce qui a permis d’épargner des conflits fratricides nourris par des incompatibilités plutôt personnelles que politiques ou idéologiques”, a-t-il témoigné. Me Bentoumi n’a pas manqué d’égratigner Ben Bella qui avait chargé Mohamed Bedjaoui d’élaborer la Constitution braconnant ainsi sur les prérogatives de l’AC. “C’est une Constitution importée”, a-t-il dit. Mais les conférenciers ont à l’unanimité rendu un hommage appuyé à Ferhat Abbas, lequel a été assigné à résidence pendant de longues années. “C’était un monument”, a affirmé Mme Zohra Drif.
K K