Annaba / Gel des projets de tramway : Cital à la recherche d’alternatives pour se diversifier

Annaba / Gel des projets de tramway : Cital à la recherche d’alternatives pour se diversifier

B ADEM

Le gel de certains projets de tramways, à l’image de celui d’Annaba et de Batna, ainsi que l’annulation de l’extension de ceux d’Alger et d’Oran, a eu pour fâcheuse conséquence de ralentir la croissance de Cital, une joint-venture née en 2011 de la volonté de l’Algérie de se doter de capacités industrielles modernes de production et de maintenance dans le domaine ferroviaire et des matériels roulants. La conjoncture économique actuelle est donc de nature à compromettre sérieusement l’essor de cette entreprise dont la capacité de production est de l’ordre de 60 rames par an.

Moins de quatre ans après l’inauguration du site de production de tramway Cital à Annaba, l’usine se retrouve confrontée à de sérieux problèmes, liés en partie à la grave crise économique que connaît notre pays depuis quelques années. Une crise économique qui a fait en sorte que de nombreux projets de tramway furent gelés ou annulés à travers le territoire national, à l’image de ceux d’Annaba et de Batna. Mais les équipes de Cital tentent par tous les moyens de sauver le site de production en visant d’autres marchés en allant vers la diversification. L’usine de montage Cital Annaba, issue d’une joint-venture entre l’Entreprise du métro d’Alger (EMA) (10%), Ferrovial (41%) et Alstom (France) (49%), a été inaugurée en 2015 avec un investissement de près de 2,5 milliards de dinars.

L’entreprise a été créée en 2011 pour réaliser l’assemblage des tramways pour toutes les villes algériennes et assurer leur maintenance et celle des infrastructures. En 2013, le champ d’intervention de Cital a été élargi pour faire tous types de matériel roulant ferroviaire, tels que les métros, les trains de grandes lignes, et les locomotives. Cital-Annaba avait une commande initiale de 213 rames de tramways et devait obtenir d’autres commandes pour la création de tramways dans d’autres villes. Mais le sort en a voulu autrement et au lieu d’obtenir encore plus de marchés en Algérie, l’entreprise a été confrontée à l’annulation de certains projets de tramways au niveau national, ce qui a réduit son plan de charge à 145 rames, soit une baisse de près de 32% de la commande initiale.

A ce jour, 145 tramways ont été produits dont 120 ont déjà été réceptionnés par les clients de l’entreprise algéro-française. Cette dernière travaille actuellement pour la finalisation de la production des rames du projet de tramway de Mostaganem qui est le dernier projet en production. De son côté, la direction de l’entreprise s’est lancée dans une véritable course contre la montre afin de diversifier ses activités, mais aussi de prospecter et conquérir d’autres marchés. Le marché tunisien semble être la meilleure solution. Questionnée sur ces chances d’obtenir le marché de Sfax, la direction de cette entreprise nous a répondu : «Cital suit de près l’évolution de ce projet et se positionne comme un partenaire de premier rang pour accompagner et partager la riche expérience des projets algériens avec le voisin tunisien.

Cital a des atouts à faire valoir pour le marché tunisien, car elle réalise un produit et un service de qualité, conforme aux normes internationales les plus exigeantes. A cet égard, Cital a reçu le trophée de « la Mention Spéciale du Jury » pour sa première participation à l’édition 2018 du concours national du Prix algérien de la qualité, lancé par le ministère de l’Industrie et des Mines.» L’obtention d’un tel marché ouvrira les portes pour cette entreprise vers l’exportation et la conquête du marché africain. Mais l’obtention de nouveaux marchés n’est pas l’unique stratégie adoptée par les gestionnaires de Cital qui ont misé pour la pérennité de la société sur la diversification des activités.

L’entreprise algéro-française avait réalisé avec ses partenaires une étude complète incluant le business plan et les accords pour l’assemblage des trains Coradia en Algérie. Mais ce projet n’a pas vu le jour par manque de disponibilité du budget. «Nous espérons reprendre ce dossier rapidement, et ceci afin de sauvegarder tout le savoir-faire et expertise acquis par Cital en Algérie et à l’étranger», nous affirma Fayçal Fadel, le chargé de communication de la société. Toujours en ce qui concerne les trains Coradia, «Cital va assurer la maintenance niveaux 3 et 4 des 17 trains Coradia acquis par la SNTF auprès d’Alstom. Un investissement est prévu sur le site d’Annaba, à cet effet, et les études ont déjà été lancées», nous indique la même source.

Rajeunissement des cadres et taux d’intégration local

Cital a atteint un taux d’intégration locale de 35%. Ce taux a été obtenu grâce à l’intégration de pièces en composite, tôlerie et vitrage fournies par de petites et moyennes entreprises (PME) locales ou mixtes, dont la société locale El Kods de verrerie et Toyota Algérie pour la peinture. Mais aussi et surtout par l’entrée en activité de l’atelier de l’entreprise mixte Hiolle Algérie, implantée sur le même site de Cital. Cet atelier produit les coffres électriques des rames. Cital a également installé à Annaba un atelier de réparation de vitrage, 90% du vitrage est produit en Algérie par notre partenaire local qualifié et homologué.

Un autre atelier mécanique a été mis en place pour la réparation des ponts moteurs dont Cital a signé un contrat dans ce segment pour exporter ses services. Outre, l’intégration locale, l’entreprise met un point d’honneur au transfert de technologie et au rajeunissement de ces cadres. C’est d’ailleurs dans cette optique que Mme Wahida Chaab a été nommée à la tête de Cital, il y a une année. Elle a succédé à Henri Bussery au poste de Président du Conseil d’administration et Directrice générale. «Mme Chaab a eu un parcours d’études principal en électronique en Algérie, en plus des formations en management en Algérie et à l’étranger.

Sa première grande et structurante expérience professionnelle a été effectuée dans l’Armée de l’air algérienne, près de dix années, qui lui ont permis de forger une personnalité d’excellence opérationnelle, avant de rejoindre par la suite le groupe Alstom, où elle a occupé différents postes de responsabilités et découvert le monde de la mobilité urbaine et ferroviaire», apprend-on auprès de M. Fadel. Après ce remplacement, il ne reste qu’un seul travailleur étranger au sein de l’entreprise qui emploie au niveau national près de 370 travailleurs.

Activités «très riches et discrètes»

En dehors de l’activité de productions sur l’usine de Annaba, Cital a une activité «très riche et très discrète à la fois» avec six sites de maintenance à Alger, Oran, Constantine, Sidi Bel-Abbès, Ouargla et Sétif. Pour s’adapter à la crise économique et à la situation actuelle, l’usine d’Annaba a dû se redéployer et s’investir dans la mise en place d’ateliers de maintenance telle que la révision des systèmes de freinage.

«Cital possède le quatrième banc d’essais de freins, deux sont en Europe, un au Moyen-Orient. Un autre banc d’essai sera installé en Algérie, le troisième plus important au monde. Ces moyens de tests seront les premiers en Afrique», révèle l’entreprise. Cette préférence pour investir à Annaba a pour objectif d’«assurer une performance en termes de disponibilité et fiabilité de la flotte et d’éviter le recours à l’importation de ce type de services», nous explique-t-on encore. Cital a mis un point d’honneur au transfert de technologie à travers la formation de ses équipes au niveau local et international pour développer une ressource humaine avec une base de compétence technique et managériale de haut niveau. Une compétence qu’il faudra sauvegarder et préserver.

«Néanmoins, si des projets de fabrication tels que les trains Coradia ou le dégel des projets tramways ne se concrétisent pas, c’est tout le savoir-faire et l’expertise acquis par Cital et ses sous-traitants locaux qui sont à risque», regrette la direction de Cital.