Aminatou Haider de retour à Laayoun : Le regard franc et la tête haute

Aminatou Haider de retour à Laayoun : Le regard franc et la tête haute

Aminatou Haidar revient chez elle le regard franc et la tête haute. Elle n’a pas renoncé à son droit de rentrer encore moins à ses convictions. «C’est une victoire pour le droit international, pour les droits de l’homme, pour la justice internationale et pour la cause sahraouie», a-t-elle affirmé en quittant sa chambre d’hôpital sur une chaise roulante.

Elle n’est pas de l’engeance des militants prêts à baiser la main de leurs bourreaux saisis de magnanimité et de générosité. Elle persiste et signe. Dans sa ville où elle retrouvera les siens, sa figure est déjà auréolée d’un combat qui en fit désormais une icône d’un peuple décidé à ne plus plier l’échine. Depuis le 16 novembre, jour où elle avait entamé une grève de la faim aux îles Canaries, le nom de cette fragile jeune femme de 42 ans a remis sur le devant de la scène le combat d’un peuple.

Depuis plus d’un demi- siècle, il ne cesse de clamer sa volonté de vivre libre et de choisir son destin. Il a suffi du geste d’une militante des droits de l’homme récompensée déjà par de nombreux prix pour ébranler les fondements des puissants et de braquer une lumière crue sur l’un des derniers conflits oublié. On n’a pas hésité à la comparer à Gandhi à qui elle emprunte d’ailleurs quelques traits physiques. La comparaison est loin d’être abusive. Elle a introduit doute et incertitude chez eux qui furent obligés de se contorsionner devant micros et caméras pour justifier l’indéfendable. Privés d’arguments, ils désignèrent des boucs émissaires détournant le regard de ces hommes qui luttent et refusent l’occupation.

Voilà un gouvernement qui négocie sous les auspices de l’ONU avec un mouvement indépendantiste, en l’occurrence le Polisario mais qui s’évertue à nier l’existence d’une opposition à ses desseins et visées. Comportement classique des occupants qui ne consentent à admettre la réalité qu’au terme d’une inutile perte de temps. N’a-t-on pas accusé la révolution algérienne d’être à la solde du Caire. Les patriotes vietnamiens avant qu’on se résout à satisfaire leurs justes et légitimes revendications étaient selon leurs contempteurs de simples jouets aux mains de Pékin.

Souvent, les puissants qui croient pouvoir bâillonner les rêves de liberté se montrent apeurés et démunis face à de telles initiatives. Elles leur ôtent le pouvoir de recourir à la force pour contrer la violence. La grève de la faim de la militante sahraouie qui n’est pas à son premier geste de défi et de courage a acculé les autorités marocaines à montrer le vrai visage de la monarchie. Dans ce pays où la violence institutionnaliséé a de profondes racines dans l’histoire, une mère de famille a dénudé un régime qui se comporte comme n’importe quelle force d’occupation. Indifférent aux droits élémentaires des citoyens à circuler, à émettre la moindre critique sur leurs pratiques.

La grève de Aminatou Haider qui a suscité des réactions au plus haut niveau de l’organisation des Nations unies et des grandes puissances du monde, a rappelé que le peuple sahraoui n’est pas aphone. Il a ses hommes qui nient la prétention et l’obstination du Maroc à faire d’une ex-colonie de prétendus territoires du Sud. Les autorités marocaines peuvent s’égosiller à dire que le dénouement fut «strictement humanitaire». Nul doute cependant que le geste d’Aminatou Haider aura des répercussions sur l’avancée d’un combat qu’elle a brillamment médiatisé aux quatre coins du monde.

Rachid Hammoutène.