Alors que le ministère de l’Intérieur et des Collectivités locales a réaffirmé, dès le début de la saison estivale 2015, l’interdiction des solariums, et malgré toute l’encre que le débat a fait couler, rien n’a pu empêcher les «seigneurs» des plages de défendre leurs «territoires».
Face à la montée ininterrompue du mercure, la nouvelle Mecque continue toujours de recevoir ses visiteurs venus de tous les coins du pays. La Méditerranée persiste à les séduire par sa fraîcheur, sa vue imprenable, scintillante, ses vagues capricieuses. Les estivants, soucieux de la fin très proche de la haute saison, se ruent sur les plages.
Un fait ordinaire en période de grandes chaleurs. Du sable fin, des galets ou des rochers ne sont que des détails pour le plaisir de la détente face à un été caniculaire. Un cadeau du ciel, mais qui cache une autre vérité. En leur qualité d’espace public, les plages ont été «privatisées» par la force. Un véritable diktat mafieux, défiant les différents responsables, qui par le passé ont annoncé haut et fort la gratuité des plages.
Et voila un autre été qui fait couler beaucoup d’encre. Malgré la fin proche de l’été, le diktat continue et ne cesse de faire parler de lui, témoignant ainsi d’une autre réalité du pays. Août : gain facile et rush d’estivants Les grandes chaleurs font que les citoyens se ruent sur les plages pour un peu fraîcheur.
En effet, tout le monde vise un seul panneau d’indication, celui des plages. Août, mois des congés, coïncide avec la période des grandes vacances scolaires et enregistre ainsi un record en matière d’affluence. Une aubaine pour les écoliers, vu que quelques jours seulement les séparent de la reprise des cours. Entre canicule et temps libre, une virée pour s’allonger sur le sable doré. Les vacanciers ne sont jamais déçus.
Les nuages sont en cette période en abandon de poste, quant au soleil il ne rate jamais l’occasion de se présenter chaleureusement, marquant un ciel dégagé aux visiteurs. Une chance aux fans du bronzage de profiter d’une séance pour brunir à l’état naturel. Migrants ou riverains, tous apprécient cette période pour passer des journées de détente et de répit en ces moments de chaleur.
Les plages les plus réputées d’Alger n’ont jamais vu autant de monde. Le tourisme local, en constante augmentation, donne une raison supplémentaire à certaines pratiques malhonnêtes de faire un gain facile par la location illégale des solariums aux estivants. Ces derniers ouvrent leurs portefeuilles aux «propriétaires autoproclamés » face à la menace de l’exclusion de leur «territoire» par la force. L’officiel versus le diktat bandit La situation aujourd’hui parle d’elle-même, lorsqu’une décision officielle est formulée, sa réalité ne se reflète pas sur le terrain. Le cas des plages, un infime exemple parmi d’autres.
Si les plages sont décrétées espaces gratuits aux visiteurs, cela sous- entend que la concession est illégale. La loi perd ici toute sa rigueur pour céder la place à l’anarchie. Le choix existe entre le gain ou la perte, et ces personnes qui n’ont rien à perdre imposent leur vision par tous les moyens. Ils visent alors la location illicite de parasols et tables aux estivants, dans des lieux qualifiés de «publics». Faire payer les estivants est devenu un acte ordinaire et ce, malgré la décision officielle portant interdiction de solariums payants sur les plages.
Il faut savoir que certaines d’entre elles sont patrouillées par des brigades de la gendarmerie. «Faire passer le solarium pour une propriété privée, la brigade de gendarmerie risque de le confisquer pour traquer les concessionnaires», nous a déclaré Salima lors de sa visite à la plage des Sables d’or à Alger. Les jeunes squatteurs louent l’équipement et préviennent les estivants de dire, lors du passage des gendarmes, qu’ils s’agit de leur propre matériel.
Les squatteurs, souvent riverains des plages en question, pensent être les seigneurs des stations balnéaires. Intouchables et impunis, ils font la loi et imposent leur diktat et leurs règles sur le simple citoyen, profitant des brèches du manque de contrôle de la police. L’estivant, entre la loi du plus fort et la chaleur brulante de l’été, se soumet aux régles mafieuses.
Depuis leur arrivée, les estivants sur les plages, vivent le calvaire. Car pour passer une journée de détente sur une plage publique, ils sont obligés de montrer leurs billets aux organisateurs «autoproclamés ». Quand les lieux de stationnement affichent complet, les circonstances font que naissent des parkings sauvages, où le citoyen est obligé de payer au moins le double du tarif de base, soit le prix de 100 dinars pour seulement garer sa voiture.
Ils assaillent leurs proies pour tirer un bénéfice, entre 500 et 1 000 dinars, des sommes d’argent comparables à une journée de travail d’un simple fonctionnaire. Aujourd’hui, le diktat mafieux semble entrer en conflit avec les décisions des responsables. Depuis le début de la saison estivale, qui tire à sa fin, rien n’a pu arrêter une situation où l’audace est plus forte que la loi. Qui sont les responsables derrière la concession ? Miramar, Sables d’or, Alger Plage… et la liste est très longuedes plages relevant de la wilaya d’Alger.
Et pour citer toutes les stations balnéaires sur le territoire national qui subissent la pression des squatteurs, la liste sera interminable. Discrètement ou ouvertement, rien n’arrête la quête du gain facile. Les directives de la gratuité des plages viennent s’inscrire dans le cadre de l’encouragement du tourisme local. Une alternative pour créer des emplois et des services liés à cette activité. Mais entre les responsables officiels et officieux il y a des interrogations. Innombrables parasols et des jeunes vendeurs qui chôment toute l’année.
Comment ont-ils pu avoir les moyens pour payer tout ce matériel et exercer la concession ? Les prix sont toujours excessivement élevés et ce, malgré la fin proche de la saison estivale. Un coup dur que subissent, principalement, les familles à petites bourses, entre 600 dinars jusqu’à 1000 dinars par journée pour une table et 4 chaises.
À Alger, de nombreux jeunes tentent malicieusement de tirer profit sur le dos des estivants. À Miramar, une plage très réputée pour les Algérois, on propose discrètement des solariums, chose que nous a confirmé Abderrahmane, un habitué du lieu. Même constat réalisé par nous-mêmes à Alger Plage.
À notre arrivée, jeune s’est approché de nous pour nous saluer et voir si nous avions besoin de quelque chose. «Bonjour, avezvous besoin d’une table, des chaises, un parasol… Je suis là, rien ne vous manque…», a-t-il dit. À sa question, nous avons répliqué qu’«une table et quatre chaises serait l’idéal». Il a précisé que cela nous coûtera 1 000 dinars la journée. Nous avons alors refusé, lui rappelant la gratuité de la plage. «Non mais ce n’est pas le cas dans cette plage. Ailleurs je ne sais pas, mais ici vous devez payer», a-t-il rajouté dans le but de nous convaincre.
Dès qu’un policier est passé, nous sommes allés le voir dans le but d’avoir sa version. Il nous a précisé que des personnes continuent d’essayer d’arnaquer les estivants en leur proposant leur matériel. Une question se pose : qui sont les personnes qui tirent les ficelles de cette activité illégale ? Il semble que l’anarchie n’est pas un rival facile à combattre.
M. M.