Alors que les SGP ont leur mot à dire dans le choix des dirigeants, Ghoul met tout le monde devant le fait accompli

Alors que les SGP ont leur mot à dire dans le choix des dirigeants, Ghoul met tout le monde devant le fait accompli

Les travailleurs de l’entreprise Sogral l’accusent de parachuter dans des postes de responsabilité des hommes proches de son parti.

Pourquoi la Centrale syndicale UGTA et plus particulièrement la Fédération nationale des travailleurs du transport (FNTT) gardent-elles le silence sur ce qui se passe à la Société d’exploitation et de gestion des gares routières d’Algérie (Sogral) ? En effet, depuis plus d’une semaine, les travailleurs de cette entreprise, conduits par leur syndicat UGTA, organisent quotidiennement des actions de contestation, de 11h à midi, pour protester contre “les intrusions injustifiées” du ministre des Transports, Amar Ghoul.

Hier, le secrétaire général du syndicat de Sogral, Mohamed Yahiaoui, a laissé entendre que le ministre est en train de bouleverser l’organigramme de Sogral, notamment au niveau de l’encadrement de l’entreprise, et ce, à des “fins partisanes”. Selon lui, Amar Ghoul veut s’entourer de militants de son parti politique, Taj, en les nommant à des postes de responsabilité.

L’affaire remonte au 31 décembre dernier, lorsque les représentants des travailleurs ont été informés du “parachutage” d’un nouveau directeur général, désigné directement par le ministre des Transports, alors que “l’entreprise dispose du statut de SPA” et était dirigée, depuis peu, par un DG intérimaire, du nom de Mohand Saïd Charef, qui a l’avantage d’être “un enfant de la maison”, puisqu’il a eu à gérer, en sa qualité de DG, l’Entreprise de gestion de services des aéroportuaires (EGSA), puis en qualité de DGA à l’Entreprise publique de transport urbain et suburbain d’Alger (Étusa). “M. Charef est du métier ; il a assuré le poste de DG par intérim depuis le mois de décembre, à la suite de la maladie du directeur général, décédé avant-hier. Le programme d’activité s’est poursuivi avec lui”, a expliqué notre interlocuteur. Il a aussi rappelé que l’entreprise Sogral a un agenda non négligeable, puisqu’elle gère quelque 32 gares routières, à l’échelle nationale. Pour le syndicat d’entreprise, il ne faut pas perdre de vue le fait que la nomination du DG intérimaire s’est faite par le directoire du SGP Fidber, “dans les normes” et dans le respect du statut juridique d’une société par actions et du droit commercial algérien.

Encadrement partisan pour quel rapport de force ?

Autrement dit, à l’inverse des entreprises ayant un statut d’établissement public à caractère industriel et commercial (Epic), qui sont placées sous l’autorité directe du ministère de tutelle, les entreprises SPA, quant à elles, sont dirigées par un directoire et administrées par un Conseil d’administration (CA), dont les membres sont élus à l’assemblée générale, lequel désigne le directeur général. Aussi, ce qui pose problème aujourd’hui au syndicat, c’est qu’Amar Ghoul confonde entre sa fonction de ministre et celle de chef d’un parti politique, qu’il veuille donc imposer un rapport de force partisan qui pourrait menacer le bon fonctionnement de Sogral. Hier, le SG du syndical a révélé à Liberté que le DG nouvellement installé par le ministre, Salah Belloucif, “est un partisan de Taj, qui n’a rien à voir avec l’activité du secteur ni avec celle de l’entreprise”.

Mohamed Yahiaoui a, en outre, signalé qu’Amar Ghoul n’est pas à sa première immixtion, en observant que ce dernier “avait ordonné l’annulation du recrutement, en novembre 2013, d’un jeune au poste de directeur d’unité (training) pour gérer la gare de Souk-Ahras, pour le remplacer par un ex-président d’APC affilié au même parti politique Taj”.

“Depuis 2010, la politique de notre entreprise s’appuie sur le fait que tout recrutement passe par l’Anem de wilaya”, a-t-il encore souligné.

L’affaire de la Société d’exploitation et de gestion des gares routières d’Algérie met à nu l’intervention directe du ministre des Transports, en violation avec les textes produits par son propre département. Liberté est, en effet, en possession de documents datés d’octobre et de novembre derniers, et signés par le secrétaire général du ministère de la tutelle. Ce dernier a invité les P-DG d’Erevav, Gema, le groupe Cnan, MTA ENTMV, SNTR et EP/TVC, ainsi que les DG de Sogral, Étusa, ETU/Oran, ETU/Constantine et Transub, à lui transmettre “l’organigramme nominatif, en précisant l’état des postes, ainsi que la situation des effectifs”. Il a également interpellé les présidents des directoires des SGP Fidber, Gestramar et Sogepports sur la question de la “désignation des cadres dirigeants des SGP et entreprises affiliées”, en indiquant que toute décision “doit recueillir l’accord préalable du ministère des Transports, lequel au demeurant peut proposer d’autres candidatures”.

Seulement, le SG du ministère a clairement précisé que toute décision de nomination ne sera prononcée “qu’après aboutissement de la procédure”, c’est-à-dire après examen, par le ministère de tutelle, des “propositions de désignation” soumises par les SGP. Finalement, la démarche de Ghoul obéirait-elle à un calcul partial en relation directe avec la prochaine élection présidentielle ? Une telle hypothèse n’est pas à exclure, d’autant que les pratiques partisanes et régionalistes sont courantes dans les institutions de l’État.

En tout cas, et c’est là toute la nouveauté, les travailleurs de Sogral et leur syndicat, soutenus par une vingtaine de syndicats du secteur, tous affiliés à la FNTT, n’ont pas l’intention d’accepter le fait accompli dans leur secteur. La situation est inquiétante et risque de dégénérer…

H A