Alors que le manque de lait en sachet persiste,Le gouvernement «charge» les laiteries

Alors que le manque de lait en sachet persiste,Le gouvernement «charge» les laiteries
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Toute fausse déclaration ou non-respect des clauses contractuelles entraîne l’annulation du contrat et des poursuites administratives. Conformément à la législation et la réglementation en vigueur, des poursuites judicaires peuvent être, également, engagées à l’encontre des laiteries. Les laiteries privées ont toute latitude pour acquérir des poudres de lait sur le marché international ou national à prix réel, de les transformer à leur convenance et de mettre sur le marché des laits de consommation et des produits laitiers à prix libres.

Le lait en sachet manque toujours. C’est là une réalité et nullement un effet de style. Pour juguler cette crise, le ministère de l’Agriculture et du Développement rural, a mis en place un nouveau dispositif de partenariat liant les laiteries à l’Office national interprofessionnel du Lait (Onil). À l’exception des unités publiques qui sont mises sous sujétion, l’adhésion à ce nouveau procédé est à la fois volontaire et individuelle.

C’est pourquoi, toute fausse déclaration ou non-respect des clauses contractuelles entraînent l’annulation du contrat et des poursuites administratives. Et ce n’est pas fini : conformément à la législation et la réglementation en vigueur, des poursuites judicaires peuvent être engagées à l’encontre des laiteries. La mise en oeuvre de ce dispositif est prévue pour ce mois courant (Ndlr janvier).

Le ministère n’a pas précisé la date de la rentrée en vigueur de ces nouvelles règles du jeu. S’agit-il d’une simple omission ou bien d’un calcul bien réfléchi ? Une chose est sûre, le produit se fait aujourd’hui rare chez les épiciers à tel enseigne que la pénurie est installée pour durer. C’est en tout cas l’avis de certains producteurs. Ces derniers ne sont pas allés par quatre chemins pour qualifier «d’erreur fatale» ces nouvelles dispositions.

LG Algérie

Et ce n’est pas sans raison : ils estiment que celles-ci (nouvelles dispositions) auront pour effet de réduire drastiquement les capacités de production de grands producteurs. Un état de fait qui rendra, à coup sûr «difficile voire même impossible de satisfaire la demande nationale en la matière». Sauf que le ministère ne l’entend pas de cette oreille en se montrant plutôt confiant quant à un dénouement prochain de la crise.

PRIME SUR LE LAIT CRU

Le dispositif du ministère de l’Agriculture porte sur deux types de contrats dits spécifiques : le premier concerne l’acquisition par les laiteries d’une quantité de poudre de lait subventionnée en contrepartie d’un engagement pour le transformer dans les conditions d’hygiène requises et le mettre à la disposition des citoyens aux normes réglementaires et au prix de 25 dinars, dans une aire d’intervention définie à travers un réseau de distribution consolidé. Le second consiste en l’engagement de la laiterie à collecter le lait cru, à le pasteuriser et à le revendre à des prix libres moyennant une information distincte et lisible sur le sachet.

En contrepartie, la laiterie bénéficiera de la prime d’intégration de 4 dinars. Au cas où cette dernière renonce à la poudre de lait importée en utilisant que le lait cru, elle verra sa prime d’intégration passer à 6 dinars le litre de lait intégré. Par ailleurs, chaque laiterie partenaire s’engagera, dans les deux cas de figures, à utiliser les logiciels fournis par l’Onil pour le suivi, l’évaluation et le contrôle. Elle bénéficiera, si nécessaire, d’une formation adaptée.

Il convient de préciser également que les laiteries privées ont toute latitude pour acquérir des poudres de lait sur le marché international ou national à prix réel, de les transformer à leur convenance et de mettre sur le marché des laits de consommation et des produits laitiers à prix libres. Une seule exigence : le respect des prescriptions techniques et des normes sanitaires en vigueur.

UN MORATOIRE POUR LES OPÉRATEURS NON ENCORE ENGAGÉS DANS LE PARTENARIAT

Sans surprise aucune, le nouveau dispositif a suscité un intérêt marqué des opérateurs pour les deux secteurs. Ainsi, 112 laiteries ont été retenues pour engager les négociations de contrats de partenariat avec l’ONIL, dont 15 publiques et 97 privées.

Celles-ci partagent à part égales les capacités totales de transformation du lait. Notons que 139 laiteries ont répondu à l’appel à manifestation d’intérêt, lancé par l’Onil en novembre 2010, et ont retiré le cahier des charges relatif aux conditions de contractualisation du partenariat avec l’Onil. 118 laiteries ont déposé dans les délais leur dossier de candidature pour un partenariat avec l’Onil pour l’exercice 2011. 7 candidatures n’ont pas été retenues.

Les raisons, selon, le département de Benaïssa, sont : soit parce qu’elles n’ont pas communiqué d’informations fiables, soit qu’elles ont des affaires en justice ou font l’objet d’une enquête ou bien qu’elles ont refusé les procédures de contrôle. Du point de vue de l’intégration, 69 laiteries, soit 62% du total des laiteries publiques et privées procèdent à la collecte de lait cru ; elles constituent la base durable du partenariat envisagé et sont considérées comme prioritaires

Les 43 laiteries restantes bénéficieront d’un moratoire jusqu’au 30 septembre 2011 pour intégrer le programme de participation au développement de la production nationale. Entre temps, ces dernières bénéficieront de propositions de poudre de lait subventionné dans des proportions inférieures à celles dont bénéficient les 69 premières.

Reste que les opérateurs privés, même ceux ayant retenu le cahier des charges, n’ont pas omis d’émettre certaines réserves. Hakim Betouche, gérant de la laiterie de même nom, estimera qu’une foultitude de points sont toujours cohérents à l’image de la mise en place des zones d’exploitation pour chaque opérateur. Pour les transformateurs, le cahier des charges ne fait nullement mention de l’autorité qui va créer le comité ad-hoc, ni sa composition.

D’autre part, on conteste aussi certaines dispositions demandant à ces derniers ce que sera la quantité de lait cru récoltée alors que c’est une chose qu’on ne peut connaître d’avance. Le document ne définit pas, à leurs dires, les critères et les conditions retenues pour cette éligibilité. En somme, les laiteries privées soutiennent que les pouvoirs publics, par ce dispositif, ne veulent rien moins que renforcer les entreprises publiques déficitaires.

L’IMPORTATION DES VACHES… ÇA NE SUFFIT PAS

L’État veut encourager les laiteries à collecter le lait cru. Mais la question qui se pose, c’est de savoir si ce dernier existe ? Eh bien pour le PDG de Colaital, unité de transformation publique, Abdelkader Chahed, le produit ne manque pas. Selon lui, il suffit de renforcer les moyens de collecte et de transformation.

Si aujourd’hui, dira-t-il, les laiteries ne font pas ce travail de collecte du lait cru, c’est par ce qu’il y a de la poudre de lait, une solution de facilité par excellence. Les mesures prises par les pouvoirs publics pour développer la base productive de lait cru et réunir les conditions de son augmentation, de sa durabilité et de sa productivité ont suscité un engouement certain chez les agriculteurs et les éleveurs.

Preuve en est, depuis deux ans, les éleveurs ont réagi positivement à ces mesures. Les importations des vaches laitières sont passées de 1 200 têtes en 2008 à 15 000 têtes en 2009 et à 24 000 génisses à la fin 2010. Ces nouveaux cheptels viennent s’ajouter aux effectifs existants, qui sont de l’ordre de 250 000 têtes pour le bovin laitier moderne et 650 000 pour le bovin local.

Le département de Rachid Benaïssa est confiant : ce mouvement gagnerait en ampleur, en durabilité et en efficience avec une implication plus large et plus soutenue des industriels de la filière. C’est ainsi qu’il est attendu que ces derniers se mobilisent davantage pour développer les réseaux de collecte de lait cru et nouer avec les éleveurs et les agriculteurs des relations de partenariat dans la perspective d’un approvisionnement de leurs unités de transformation.

Ce partenariat se traduira par l’importation de vaches laitières et leur mise à disposition des éleveurs. Les industriels leurs assureront un appui technique et se feront payer sous la forme d’une partie de la production laitière.

Quid de l’avis des opérateurs privés ? Le gérant de la laiterie Betouche indiquera : «On est en train de nous dire qu’il a été collecté deux milliards et demi de litre de lait cru. On se demande où va toute cette collecte. C’est pas normal. Il faut vérifier la véracité de ces chiffres. Ils sont tout de même incohérents.

Nous avons fait un décompte pour savoir le nombre de vaches qui existent dans notre zone, nous avons trouvé que celui-ci ne dépasse pas les 300 têtes», dira-t-il, avant d’ajouter : «Les responsables doivent impérativement comprendre que le lait n’existe pas. Il faut avoir le courage politique de le reconnaitre.»