L’élection législative s’achève et débouche sur un véritable cataclysme pour les partis islamistes algériens : tous réunis, anciens comme nouveaux, modérés comme extrémistes et même apparentés ne font pas plus de 61 sièges sur les 462 que compte la nouvelle Assemblée, soit à peine 15%. L’effet «printemps arabe», dont se targuaient tant nos intégristes, n’a pas eu lieu.
Le revenant Abdallah Djaballah ou le dissident de l’ex-Hamas, Abdelmadjid Menasra, qui se préparaient sérieusement à gouverner, s’en sortent même avec des scores humiliants, dignes des partis fantaisistes avec, respectivement, 7 et 4 sièges pour chacun. Le MSP de Aboudjerra Soltani, qui s’est fondu dans «une Alliance verte» composée de deux autres partis islamistes fantomatiques, Ennahda et El Islah, ne fera pas mieux : tout juste un misérable groupe parlementaire de 48 députés dont un quart assuré par la campagne onéreuse — on parle de 600 milliards de centimes — menée par le ministre des Travaux publics MSP, Amar Ghoul, à Alger. Tous ces islamistes, fortement appuyés, il faut le dire, par un matraquage médiatique en règle via les chaînes arabes, parlaient d’une grande surprise pour le 10. Une surprise qui aura effectivement lieu, mais le 11, et sera l’œuvre de la majorité présidentielle que composent le Front de libération nationale et le Rassemblement national démocratique. L’ex-parti unique, le FLN, est, incontestablement, le plus grand vainqueur avec un score qui surprendra, y compris son secrétaire général, Abdelaziz Belkhadem. Dans ses prévisions les plus optimistes, il ne misait, avant l’élection et même avant l’éclatement de la crise au sein de son comité central, que sur 144 sièges. Il s’en sort avec un surprenant score de 220 sièges ! Si l’on y ajoute les quatre sièges arrachés par «les redresseurs» à Batna et Biskra, ainsi qu’une bonne partie parmi les 19 élus à titre d’indépendants, en fait de tendance FLN, l’ex-parti unique pourrait même, à lui seul, atteindre la majorité absolue à la future Assemblée qui est désormais de 232 sièges. Toujours est-il qu’avec le score du RND, arrivé deuxième avec 68 sièges, l’Alliance présidentielle, composée depuis le retrait du MSP, le 1er janvier 2012, du FLN et du parti d’Ouyahia, peut désormais gouverner seule. Avec un bloc de 288 députés, le FLN et le RND détiennent une majorité écrasante et non plus besoin d’alliance, ni pour contrôler l’Assemblée, ni pour former le gouvernement. A l’arrivée, l’on peut dire que la carte politique en Algérie reste telle quelle ! Plusieurs facteurs ont contribué à ce résultat. Il y a d’abord l’inévitable coup de pouce de l’administration. C’est surtout valable s’agissant du taux de participation. Un taux officiellement avoisinant les 43%, alors même que Bouteflika s’était personnellement impliqué dans la campagne. Quand bien même ce chiffre serait vrai, cela fait de Bouteflika le deuxième grand perdant après les islamistes, lui qui n’a pas réussi, en dépit d’un engagement personnel lourd et soutenu, à convaincre au moins la moitié de l’électorat. N’empêche, dans son dernier discours du 8 mai dernier à Sétif, Bouteflika aura réussi au moins une chose : influencer le vote en faveur du FLN dont il est, faut-il le rappeler, le président, avec sa fameuse phrase : «Mon appartenance politique à moi ne souffre aucune ambiguïté. Vous la connaissez tous.» Autre facteurs ayant contribué à l’éclatant succès du FLN, le nombre excessif des listes, de partis notamment majoritairement fantaisistes que l’électeur n’a pas pris au sérieux faisant du FLN et, à un degré moindre, du RND un véritable refuge électoral. Cela, en plus de ce piège que s’avéra la barre fatale des 5% des suffrages nécessaires pour chaque liste électorale pour pouvoir prétendre à la répartition des sièges et qui a balayé l’écrasante majorité des petites formations. Seuls quelques partis ont réussi à sauver l’honneur comme le FNA avec 9 sièges, le MPA avec 6 sièges, le PNSD, le RA avec 4 sièges, le FNJS, AHD 54, l’UFDS et le RPR avec 3 sièges. Le PT de Louisa Hanoune enregistre un petit recul avec désormais 20 sièges et le FFS, que le pouvoir voulait à tout prix faire participer pour ne pas avoir à se retrouver avec toute une région, la Kabylie, non représentée à l’Assemblée avec tout ce que cela signifie comme crise politique, a obtenu le quota convenu lors des négociations secrètes entre Bouteflika et Hocine Aït Ahmed en mai 2011.
K. A.