L’Algérie ne va s’engager dans la production du schiste qu’à l’horizon 2022, une échéance relativement lointaine. D’ici là, beaucoup de pétrole pourra couler sous les ponts, et surtout, les prévisions sur l’évolution du marché devraient changer.
Sonatrach se mettrait ainsi en veille, peut-être que la conjoncture pétrolière sera complètement bouleversée et à son avantage. Cette conjoncture est faite aujourd’hui de baisse de cours de brut et d’incertitudes dans l’industrie pétrolière. Et le boom des hydrocarbures de schiste aux Etats-Unis en est, en partie, la cause. Une situation qui risque d’empirer. Si les prix devaient chuter jusqu’à 65 dollars le baril et y rester pendant un certain temps, cela affecterait l’investissement des Etats-Unis dans la recherche de nouvelles sources de production de pétrole. Mettre toujours plus d’argent dans de nouveaux projets est pourtant une nécessité pour que la production américaine continue de croître, comme elle le fait depuis la révolution du schiste en 2008.
Cette logique est valable en temps normal, mais en temps de crise, les multinationales se montrent prudentes. Et elles n’hésitent pas à opérer des coupes sèches dans leurs dépenses. Un déclin durable, de l’ordre de 30%, des prix du brut pourrait entraîner à terme une chute de 40 milliards de dollars des dépenses dans le secteur, estimées actuellement à quelque 200 milliards par an.
A l’échelle de l’entreprise Continental Resources par exemple, la baisse du brut va se traduire par une dégraission dans ses dépenses d’investissements de 11,5% en 2015. Et du coup, la construction de puits supplémentaires a été ajournée. A Wall Street, le prix des actions des producteurs de brut s’en est ressenti depuis l’été, révélant les craintes des courtiers. Selon les analystes de Barclays, les bénéfices des petites et moyennes sociétés d’exploration et de production seraient amputés de 17% en 2015, avec un baril à 80 dollars, et de 25% à 70 dollars. Il n’y a toutefois pas de quoi s’affoler, estime le dirigeant de la première major américaine à avoir annoncé un coup de frein dans ses futurs projets, ConocoPhillips. « Nous savons qu’il s’agit d’une activité cyclique.
Par prudence, nous comptons procéder à des ajustements tout en continuant à surveiller l’évolution de la situation », explique son P-DG, Ryan Lance, cité par des médias. En 2015, l’essor de l’offre des Etats-Unis, qui est devenu cette année le premier producteur mondial d’hydrocarbures liquides (brut et gaz naturel liquéfié) ne devrait pas souffrir. Continental Resources, elle, prévoit même un envol de sa production pétrolière en 2015, jusqu’à 29% de plus qu’actuellement. Le nouveau conquérant de l’or noir pourrait, face à ses grands rivaux, comme l’Arabie saoudite, qui espèrent récupérer des parts de marché en laissant les prix s’effondrer. L’Algérie perdrait, elle, au change, si jamais les cours du brut continuaient à chuter. Même avec une production en légère hausse, le pays n’aura pas suffisamment de marge de maneouvre, parce qu’il n’arrive pas à booster ses gisements vieillissants, et à en explorer de nouveaux. Le quatrième avis d’appel d’offres a débouché sur les résultats qu’on connaît et il n’est pas évident que le 5e soit un succès. Pour autant, l’investissement dans l’exploration n’est pas condamné d’avance et les hésitations qu’affichent les sociétés américaines sont momentanées.