Contrairement au premier responsable de l’enseignement supérieur qui se veut rassurant et écartant le risque d’une année blanche, les étudiants représentant la Coordination nationale autonome des étudiants (CNAE), ont une autre opinion, qui consiste à dire que ce n’est pas l’année blanche qui préoccupe l’étudiant.
Après deux mois de grève et de perturbations ayant touché la majorité des établissements universitaires, le ministre de l’Enseignement supérieur Rachid Harraoubia, s’est montré, jeudi à Constantine rassurant, déclarant que toutes les universités algériennes «fonctionnent normalement» et que le risque d’une année blanche «n’est pas à craindre».
Pourtant l’un des slogans scandés durant les sit-in observés dans les universités et plaqué même au mur de l’entrée du département de Haraoubia, le 15 mars dernier lors du rassemblement de milliers d’étudiants représentant plusieurs wilayas est : «Je suis prêt à perdre une année pour gagner ma vie». C’est dire que ce n’est pas l’année blanche qui préoccupe le plus l’étudiant, ni non plus les polémiques de l’ancien et du nouveau système, mais plutôt des questions plus profondes relatives à la qualité de l’enseignement ainsi que la gestion de l’établissement universitaire. Ce qui a été d’ailleurs exprimé dans la plateforme de revendications des étudiants. Pour sa part, le ministre de l’Enseignement, a affirmé lors d’une conférence de presse en marge de sa visite de travail à Constantine que «les perturbations qui ont secoué récemment quelques universités ont pu être maîtrisées grâce à la sagesse des étudiants qui connaissent mieux que quiconque leurs intérêts, et qui ont fait montre d’un sens très développé de conscience et de maturité». L’avantage de ces perturbations, selon Hrraoubia, c’est qu’«elles ont permis aux concepteurs du système Licence-Master-Doctorat (LMD) de mieux expliquer le contenu de cette nouvelle formation qui s’inscrit dans le cadre d’une stratégie nationale visant la promotion de l’université algérienne», et de renchérir que la protestation observée dans des universités algériennes autour de ce nouveau système d’enseignement supérieur «a, paradoxalement, permis de mettre en lumière les avantages pédagogiques et professionnels générés par ce système taillé pour toutes les mesures et qui a prouvé son efficacité à travers le monde entier». Rappelant les multiples alternatives pédagogiques mises à la disposition des étudiants au titre du système LMD, Harraoubia souligne que «les étudiants ont fini par comprendre qu’il faut être armé d’un diplôme universel pour pouvoir affronter, avec des bases solides, le monde professionnel». Sur un autre volet, Harraoubia précise que les «intentions» exprimées en dehors du cadre scientifique et pédagogique resteront «sans interlocuteurs», puisqu’elles ont été carrément boudées par les étudiants qui ont préféré s’occuper de leur avenir universitaire. S’exprimant sur ce qui s’est passé la semaine dernière au rectorat de Bejaia, le ministre a affirmé qu’une enquête a été diligentée pour faire toute la lumière sur cette affaire. Dans leurs réactions, les étudiants délégués de la Coordination nationale autonome des étudiants (CNAE), d’Alger, Boumerdès et Béjaïa ont été unanimes à répondre que «ce n’est pas aux étudiants de craindre l’année blanche, mais l’administration de Harraoubia». À propos de la bonne note donnée par le ministre quant au «bon fonctionnement» de toutes les universités, les étudiants assurent que «la reprise des cours ne concerne pas toutes les universités déjà en grève, et que les étudiants sont déterminés à poursuivre leur mouvement de protestation jusqu’au bout». Dans ce contexte, la CNAE a déjà lancé un appel à la marche du 12 avril.
Selon Adel Cherguine, responsable de la commission liaisons et informations relevant de la Coordination nationale autonome des étudiants (CNAE), «la déclaration du ministre ne cachera pas la réalité de l’université algérienne, là où les choses ne vont pas bien». Et d’ajouter à propos de la marche du 12 avril qu’«une forte mobilisation estudiantine marquera cette action qui ne sera que la poursuite du mouvement de protestation».
Yasmine Ayadi