Rached Ghannouchi, leader du parti Ennahda, en compagnie de Bouguerra Soltani
Moncef Marzouki et Hamadi Jbali ont choisi Alger comme destination symbolique pour leur première visite officielle à l’étranger.
La Tunisie nouvelle se rapproche de son voisin de l’Ouest, l’Algérie. De sources partisanes on a appris que Moncef Marzouki et Hamadi Jbali effectueront leur première visite officielle en Algérie. C’est le deuxième homme du parti le Congrès pour la République, qui l’a affirmé en exclusivité hier, à L’Expression. «La première visite officielle de Moncef Marzouki et Hamadi Jbali dans le futur gouvernement sera effectuée en Algérie», a-t-il déclaré sans préciser la date exacte de cette visite.
Ce déplacement interviendra quelques jours après celle qu’effectue actuellement Rached Ghan-nouchi, leader du parti Ennahda. Il faut dire que cette visite revêt un caractère particulier aussi bien pour l’Algérie que pour la Tunisie. Face aux épreuves, les gouvernements et les peuples sont solidaires.
La Tunisie, qui sort d’une révolte, très affaiblie économiquement, socialement et politiquement, a besoin d’aide de la part de ses voisins. En recevant Beji Caid Essebsi, il y a quelques mois, l’Algérie n’a pas dérogé à son devoir. Elle a sorti son chéquier en accordant 100 millions de dollars au voisin tunisien. De même que l’Algérie a besoin de la Tunisie pour une collaboration sécuritaire maintenant que le fléau du terrorisme a pris un caractère régional, pour la lutte contre les trafiquants de drogue d’argent et d’armes en provenance surtout de la Libye.
A cela, il faut ajouter la circulation des personnes entre les deux pays. Des milliers de familles algériennes n’ont pour destination que la Tunisie qui n’a d’ailleurs jamais fermé ses frontières même durant les années noires du terrorisme.
A ces considérations strictement économiques, il y a aussi le fait que la Tunisie qui a eu à rassurer les Occidentaux, a également le devoir de rassurer ses voisins dont l’Algérie.
Cela étant, la Tunisie suit son chemin pour devenir un modèle de transition dans les pays arabes. Pour constituer sa nouvelle équipe dirigeante, on assiste à une valse des déclarations des trois partis en négociations ces derniers jours.
Le parti Ennahda et ceux de la gauche vainqueurs des élections du 23 octobre jouent au cafouillage médiatique autour de la distribution des trois postes de présidence. Tout est parti de l’annonce, avant-hier, d’un membre du bureau politique du parti Ennahda dans laquelle il affirmait qu’un tel accord serait désormais acquis.
Une information qu’a repris, d’ailleurs, un membre du Congrès pour la République pour confirmer ce partage? Un partage des responsabilités qui a valu une critique du Parti démocrate progressiste et du Mouvement des patriotes démocrates Ettakatol, qui avait pris les devants dans une déclaration pour marquer sa différence.
Du coup, le parti de Ben Jaâfar a fermement dénoncé l’information la qualifiant d’«annonce prématurée». Relayée par Ennahda, celle-ci avait, dans la soirée du samedi, apporté une correction sérieuse aux informations «lâchées» dans la même journée, selon lesquelles Moncef Marzouki serait président de la République, Hamadi Jbali, président du Conseil des ministres et Mustapha Ben Jaâfar, président de l’Assemblée constituante. Pourtant, la télévision tunisienne avait rapporté l’information d’une manière officielle lors du JT de 20h avant-hier. Or, il s’avère aussi que pour le parti Ettakatol, même s’il ne nie pas l’accord conclu à ce sujet, l’officialisation n’est toujours pas à l’ordre du jour. «L’accord est global ou il n’est pas», a laissé entendre M.Mohamed Bennour, porte-parole d’Ettakatol.
Pour lui, il ne s’agit pas d’annoncer les accords l’un après l’autre…car, «qu’arriverait-il si les négociations butaient en chemin?», s’est-il interrogé. En un mot, M. Bennour a qualifié l’annonce de prématurée et qu’elle vise à «mettre de la pression». Le porte-parole d’Ettakatol est affirmatif: «Les négociations se poursuivent à travers plusieurs commissions sur un ensemble de questions qui ont trait non seulement au reste des postes ministériels à distribuer, mais aussi aux programmes et priorités ainsi qu’aux principes et valeurs sur lesquels va reposer le travail.»
Pour les observateurs, ce cafouillage signifie que les partis en négociations manquent d’expérience qui risquerait de faire plonger la classe politique dans une autre crise.
Preuve en est, beaucoup de femmes démocrates et laïques, se préparent actuellement à faire leurs bagages pour quitter le pays en raison de la peur qui les gagne chaque jour après la prise du pouvoir par Ennahda.
Une crainte légitime dans la mesure ou dans les quartiers les plus chauds de la capitale comme Ettahrir ou Ettadhamoun, des petits drapeaux noirs accrochés aux murs des mosquées où on peut lire: «La Ilaha Illla Allah»…