Alors qu’Oran s’apprêtait a célébrer, dimanche, l’Aïd El-Adha, et que des milliers étaient à la recherche d’un mouton, d’autres fouinaient dans les poubelles des marchés, espérant trouver de quoi nourrir une marmaille qui ne comprend rien ni à la cherté de la vie ni aux déclarations des structures chargées de trouver des solutions aux couches démunies.
Sans se cacher, comme pour démentir les affirmations de ceux qui passent leur temps à faire des déclarations concernant la protection des consommateurs, ou faire la chasse à ceux qui jouent avec leur santé, des femmes fouinaient samedi, veille de l’Aïd dans les poubelles du marche de Point du Jour
«Je n’ai pas honte de ce que je fais. Je ne vole pas et je suis heureuse qu’on me prenne en photo en train de disputer aux chiens et chats de quoi nourrir mes enfants», déclarait F. Des propos insoutenables, plus forts que cette image qui interpelle la conscience de ceux qui préfèrent jeter à la poubelle des légumes pour ne pas les offrir à ces nécessiteux.
«Ceux qui nous font des promesses auront-ils la conscience tranquille, sachant que beaucoup d’entre eux n’ont jamais acheté de mouton parce que la veille une fourgonnette leur en livre à domicile. Connaissent-ils seulement ce que vaut un mouton ? Vont-ils au marché ?».
Notre interlocutrice ironise sur ceux qui se battent pour occuper les premiers rangs dans les mosquées et qui s’achètent bonne conscience en donnant quelques pièces à ceux et celles qui s’agglutinent devant les portes des lieux de prière. «Certains donnent des billets de 200 et même de 500 DA, et prennent tout leur temps pour les exhiber, tout en faisant semblant de dissimuler ce qu’ils donnent.
Ça me fait rire, car beaucoup parmi ces gens sont responsables de ma situation. Je préfère faire la chienne dans une poubelle que de leur permettre de s’acheter bonne conscience. Ils disent que nous sommes des mendiants professionnels mais ne se gênent pas pour nous faire des offres indécentes».
Sévère réquisitoire ou réalité ? La réalité est là. F. ajoutera qu’elle n’est pas seule dans son cas. «Si les contrôleurs des prix faisaient leur travail, si nos élus étaient proches de nous et si les commerçants étaient convaincus que les sanctions les guettent, on n’en seraient pas là. Mais qui écoutera une folle qui se nourrit dans des poubelles ? Socialement, je suis plus proche de l’animal que de l’être humain.
Acheter un mouton ? Je n’y songe même pas. L’année dernière quelqu’un est venu et m’en a offert un. Quelques jours plus tard, un homme est venu en conquérant demander de mes nouvelles…» Si Sidna Ibrahim El Khalil allait sacrifier son fils, le mien est sacrifié depuis sa naissance, et je l’aurais égorgé de bon cœur pour lui éviter la déchéance», dira F. Nous avons, pour notre part, préféré partir honteux.
Hakim Djaziri