Le lieu devait souligner le caractère solennel de ce discours.
Dans la salle d’apparat d’un bâtiment de la mairie berlinoise où avait été négocié le traité de la réunification des deux Allemagnes, en 1990, le candidat du Parti social-démocrate allemand (SPD), le ministre des affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier, a tenté de reprendre la main dans la campagne électorale en dévoilant, lundi 3 août, un ambitieux programme pour la prochaine décennie.
Préparé pendant plusieurs mois, ce texte de 67 pages intitulé « Le Travail de demain, politique pour la prochaine décennie » place l’emploi et la politique industrielle au coeur des priorités du SPD à moins de deux mois des élections législatives du 27 septembre.
Le contexte s’y prête : la hausse du chômage (3,5 millions de personnes, soit 8,2 % de la population active), encore limitée, risque de s’accélérer à l’automne.
Le challenger de la chancelière chrétienne-démocrate Angela Merkel veut donner « un nouveau départ à l’économie sociale de marché ».
Dans cette salle aux piliers de près de vingt mètres de hauteur, M. Steinmeier a énoncé une série de mesures permettant, selon lui, de créer quatre millions d’emplois d’ici à 2020 et d’atteindre le plein-emploi.
Qu’importe si les économistes sont sceptiques sur ce chiffre, il a assuré que ce sont « des objectifs réalistes ».
Afin d’en convaincre les électeurs il devait débuter, mardi, un voyage de quatre jours à travers l’Allemagne en se rendant dans des entreprises et des centres de recherches.
Au coeur de son discours, un plaidoyer en faveur d’une révolution industrielle écologique.
Selon le ministre, jusqu’à deux millions d’emplois pourraient voir le jour grâce à une utilisation efficace des ressources et de l’énergie, le développement des technologies « vertes » et de la mobilité électrique.
Dans le secteur de la santé et de la culture, il voit un potentiel de 1,5 million d’emplois.
Un demi-million de postes de travail pourrait aussi être créé dans le secteur du commerce et des services.
Un autre sujet lui tient particulièrement à coeur : les petites et moyennes entreprises, « le coeur de l’économie allemande ».
S’il est élu, M. Steinmeier prévoit de les aider en leur facilitant l’accès au crédit.
Un déluge de critiques
Pas une seule fois, il ne s’est attaqué directement à Angela Merkel.
Alors que la chancelière est en vacances, le ministre veut remobiliser ses troupes. Largement devancé dans les sondages par les unions chrétiennes CDU-CSU, leurs partenaires au gouvernement, le SPD n’a cessé d’accumuler les faux pas.
Dernier incident en date, le mini-scandale provoqué par Ulla Schmidt, la ministre social-démocrate de la santé, qui était partie en vacances en Espagne avec sa voiture de fonction et son chauffeur.
Le SPD n’a pas non plus pu briller lors de la présentation de son équipe de campagne, le 30 juillet.
Elle compte bien peu de nouveaux visages à l’exception de la jeune ministre des affaires sociales du Mecklembourg-Poméranie, Manuela Schwesig, et de l’entrepreneur multimillionnaire Harald Christ.
Avant même de prononcer son discours, le candidat du SPD s’était attiré un déluge de critiques.
De gauche à droite, tous les autres partis ont fustigé le manque de crédibilité de ces propositions.
Particulièrement remarquée, la réaction du populaire ministre de l’économie, Karl Theodor zu Guttenberg (CSU) : « Les gens en ont assez d’être toujours inondés de promesses en période électorale ».
Les Verts, qui promettent de créer un million d’emplois dans les quatre ans à venir grâce à des investissements dans l’éducation et par la lutte contre le réchauffement climatique, ont accusé M. Steinmeier d’avoir volé leurs idées.
A la gauche du SPD, Die Linke, qui promet la création de deux millions d’emplois, ne mâche pas non plus ses mots : « Celui qui est un parti de gouvernement pendant des années ne peut pas tout à coup dire : « J’ai la recette » », a réagi Oskar Lafontaine, le patron de cette formation et ancien président du SPD.