Ali Laskri,premier secrétaire du FFS «Nous briserons le statu quo»

Ali Laskri,premier secrétaire du FFS «Nous briserons le statu quo»

«Faites vos recours et défendez-vous!»

Le plus vieux parti d’opposition en Algérie se donne comme mission de déverrouiller le champ politique et de mobiliser la société.

Rencontré durant ce week-end à Alger au siège national du Front des forces socialistes (FFS), entouré d’une foule de militants, qui tour à tour, le questionaient au sujet des classements réservés par la commission du choix de candidatures, Ali Laskri, premier secrétaire national, manifestait beaucoup d’attention à ses militants, avant de répliquer non sans concision.«Faites vos recours et défendez-vous!» Il ajoute: «Vous devez donner un sens à un recours. Ils sont les moyens permettant à la commission de revoir les listes». C’est à partir de ces recours, explique-t-il, que la commission de recours, présidée par Mohamed Amokrane Cherifi, président du comité d’éthique du FFS, en décidera. Et pour interpeller ses militants sur ce qu’il attend, le secrétaire national dira: «Chers camarades, unissez-vous et soyez prêts pour la bataille politique. Le chemin à parcourir est certes long, mais il est de notre devoir de le faire pour traverser enfin la crise multidimensionnelle qui secoue le pays.»

Les candidats mécontents rassurés

Aujourd’hui, poursuit-il, pour contrecarrer le projet d’annihilation de toute expression autonome et démocratique de la société, le FFS doit s’inscrire encore dans une démarche politique de retour à la paix civile. «Si le régime organise ces élections pour assurer sa survie, le FFS y prend part pour sauvegarder l’Algérie», enchaîne-t-il, avant de prendre congé et se diriger vers un autre groupe de cadres du parti.

On l’interpelle: «M Laskri, on est journaliste à L’Expression, pouvez vous répondre à certaines questions?» L’air fourbu, gardant néanmoins un pâle sourire: «Vous voulez comprendre quoi?» La presse souligne que les militants du FFS ont manifesté un mécontentement à l’égard des listes électorales établies. Qu’en est-il en réalité? «En effet, il y a eu des mécontentements qui ont été signalés, ici et là. Toutes les fédérations ont à ce titre formulé et déposé leurs recours auprès de la commission de recours», répond-il, avant d’ajouter: «Et puis heureusement d’ailleurs. Car, cela explique la maturité politique des militants, mais aussi renseigne sur la discipline dont ils font preuve et le courage politique de dire la vérité!».

Sur sa lancée, il nous fera savoir que son parti a enregistré un engouement de la part des candidats, jamais attendu. «Nous avons reçu rien que dans la wilaya de Tizi Ouzou plus d’une centaine de dossiers de candidatures», affirme-t-il, relevant que les prétendants à l’élection législative du 10 mai prochain, sont tous des militants, des cadres jouissant de tous les critères, arrêtés par la commission pour le choix des candidats, en l’occurrence l’engagement, l’intégrité, la constance et la compétence. «On n’ pas reçu des candidats, liés aux charognards politico-financiers ou aux traditionnels fossoyeurs du parti. Ils sont connus et n’ont aucun crédit», ironise-t-il. Plus explicite, il fera savoir que quoique le futur scrutin législatif importe peu pour le FFS, néanmoins M.Laskri affirme qu’il est tout de même illusoire de surestimer l’impact de la participation du FFS. Car cette dernière, dit-il, entre dans une démarche globale de sortie de crise qu’il préconise. Par la participation, le Front des forces socialistes compte remettre le peuple en mouvement et remettre du mouvement dans un statu quo politique et institutionnel destructeur de l’Etat et de la société algérienne. «Seule cette remise en mouvement peut permettre de dépasser les impasses du pays et poursuivre la lutte politique, pacifique et populaire pour les droits politiques, économiques, sociaux et culturels», préconise-t-il. La participation du FFS au prochain scrutin législatif est tactique. Cela dit donc, selon M.Laskri, les objectifs principaux sont la remise en mouvement du parti et du peuple. Voire, elle constitue, aux yeux de notre interlocuteur, un moyen et une tactique pour s’opposer pacifiquement au système, qui a longtemps exclu les citoyens de la vie politique nationale.

A partir de quoi, il suggère que cette mobilisation citoyenne et militante doit continuer au-delà de l’élection elle-même, contre le pouvoir et ses relais, qui se nourrissent de la violence et entretiennent des foyers de tension un peu partout dans le pays. «La position du pouvoir s’incarne dans le maintien délibéré, injustifié, voire provocateur d’un statu quo politique intenable. Ce statu quo est le verrou qui empêche le décollage économique du pays et obère tout espoir de développement», relève-t-il, ajoutant que la mission du FFS est justement de déverrouiller le champ politique et briser le statuquo, pour entamer un nouveau départ pour la construction du parti et la remobilisation politique de la société. Sur le même chapitre, le responsable du FFS soutient que les citoyens veulent opérer un changement radical mais pacifique. Car, ils connaissent, témoigne-t-il, le prix exorbitant humain et politique d’un changement violent. «Seul le changement pacifique peut donner une réalité et un avenir à un projet démocratique en Algérie», précise-t-il. Ce faisant, il note encore que le pays a besoin de s’affranchir du vieux carcan du régime et oeuvrer pour un nouveau contrat politique et économique. Un contrat selon lui, qui soit discuté et négocié librement entre les forces politiques, économiques et sociales représentatives. C’est dire qu’il n’y a que ce contrat qui redonnera son sens à la politique pour démocratiser le pays et le libérer de la maffia politico-financière.

Aucun pays n’est à l’abri des vents du changement

Abordant la situation politique nationale face aux changements, parfois violents, se déroulant sur la scène régionale, M.Laskri révèle que l’Algérie connaît des évolutions internes profondes dont nous mesurons encore mal toutes l’ampleur et la portée. Elle est ainsi, illustre-t-il, secouée par une crise multidimensionnelle, depuis plusieurs dizaines d’années. «Ces décennies ont fragilisé le pays et font apparaître de nouveaux besoins de sécurité nationale face aux changements qui s’opèrent auprès de nos voisins», établit-il. Et de renchérir que les nouveaux desseins mis à l’oeuvre par les grandes puissances dans le cadre de la reconstruction du Nouvel ordre mondial ne donne pas à voir, aujourd’hui, de façon claire les répercussions de ces nouvelles données sur la région et sur le pays. Pour ce qui est de l’attribution de quotas, devenu un sujet à polémique aussi bien auprès des citoyens que d’observateurs politiques, M.Laskri rappelle que le FFS respecte sa ligne de conduite basée sur une culture politique assumée et une éthique et considère que le système de quota est déjà contraire à sa participation tactique. En ce sens, le responsable du FFS affirme qu’il suit, en effet, les déclarations et analyses malveillantes et haineuses de certains charlatans politiques et de certains chargés de mission spéculer sur des prétendus «quotas». Néanmoins, il leur demande de fouiller du côté de WikiLeaks. «Ces anciens «harkis» du système appelés à rendre des comptes sur certains événements très graves, ayant conduit le pays droit vers l’impasse et le chaos», indique-t-il, soulignant enfin que ces derniers sont pourtant responsables des désastres, connus par notre pays. Ils ont occupé des postes-clés dans les rouages du pouvoir de l’époque.