Affaire Sonatrach II, Qu’est-ce qui bloque la justice algérienne ?

Affaire Sonatrach II, Qu’est-ce qui bloque la justice algérienne ?

siege-de-sonatrach-alger-02.jpgLes révélations faites par la presse italienne, en citant le parquet de Milan, seraient-elles en contradiction avec les positions jusque-là exprimées par la partie algérienne ? Lors de ses multiples sorties médiatiques, le ministre de la Justice et garde des Sceaux, M. Mohamed Charfi n’a cessé de dire, que les différentes commissions rogatoires diligentées dans l’affaire Sonatrach n’ont toujours pas rendu leurs conclusions.

Alors que du côté algérien, on affirme que l’instruction de l’affaire Sonatrach 2 poursuit son bonhomme de chemin, la justice italienne par la voix du parquet de Milan crée l’événement de la fin de semaine dernière.

Selon le quotidien italien Corriere della Sera, citant la même source, «la justice italienne compte saisir 123 millions de dollars déposés sur des comptes appartenant à Farid Bedjaoui, dans l’enquête sur un scandale de corruption impliquant le groupe pétrolier italien ENI en Algérie».

Or, il y a moins d’un mois, soit le 8 juillet dernier, le ministre de la Justice et garde des Sceaux, M. Charfi avait affirmé que le juge d’instruction chargé de l’affaire Sonatrach 2 «accomplit pleinement sa mission » et exerce toutes ses prérogatives en prenant plusieurs mesures.

Ainsi et en guise d’arguments, il dira qu’en plus de plusieurs commissions rogatoires internationales, il cite la collecte d’informations, la convocation de personnes pour enquête, l’émission de mandats de dépôt contre des personnes et le placement sous contrôle judiciaire d’autres personnes.

Toutefois, il fera remarquer, «que l’obligation de confidentialité ne permet pas de divulguer de nouveaux éléments dans cette affaire toutes les 24 heures». Questions : les informations rendues publiques par le parquet de Milan étaient-elles en possession de la partie algérienne ? Si c’était le cas, pourquoi la justice algérienne n’a pas jugé utile de les rendre publiques ?

Une manière de démontrer à l’opinion nationale que dans cette affaire, les pouvoirs publics sont à cheval sur cette question et que le gouvernement est plus que jamais disposé à en faire toute la lumière. Dans le cas contraire, autrement dit, si les informations en question ne sont pas en la possession algérienne, à qui incombe la faute? La justice italienne a-t-elle refusé de collaborer avec son homologue algérienne ?

La commission rogatoire dépêchée sur Rome a-t-elle bénéficié de facilitations auprès de la justice italienne ? Cette dernière a-t-elle réellement affiché sa disponibilité à collaborer avec la partie algérienne ?

Autant de questions qui restent entièrement posées tant que la justice algérienne ne s’est pas expliquée. Enfin dernière interrogation : l’instruction que mène la justice algérienne est-elle dépassée par ces nouveaux rebondissements ?

Il est à noter que le parquet de Milan (Nord) a également lancé un mandat d’arrêt international contre M. Bedjaoui, et ajoute que «plus de 100 millions de dollars» se trouveraient à Singapour sur des comptes contrôlés par M. Bedjaoui et 23 autres millions de dollars seraient à Hong Kong» ; Selon le journal Corriere della Sera des commissions rogatoires ont également été lancées au sujet des comptes détenus par Farid Bedjaoui et ses proches, dont Chakib Khelil, à Singapour et Hong Kong.

Dans cette affaire, faut-il le rappeler, la société italienne d’ingénierie et exploration pétrolière Saipem, filiale du géant pétrolier ENI, est soupçonnée d’avoir versé jusqu’en 2009 des pots-de-vin à Sonatrach. Ce qui a conduit à la démission de plusieurs responsables du groupe italien, dont son patron Pietro Tali.

Cela au moment où le responsable de la division ingénierie et construction, Pietro Varone, ainsi qu’un autre cadre ont été suspendus à titre préventif. Il reste à savoir si avec ces nouveaux rebondissements, le parquet de Milan a réellement surclassé le pôle judiciaire spécialisé du centre relevant de la cour d’Alger et en charge de l’instruction de cette affaire ?

A. B.