Grimpeurs de palmiers, trieurs de dattes et autres travailleurs aux champs sont des métiers qui se raréfient à Biskra, où le manque de main d’œuvre agricole est devenu un véritable casse-tête pour les producteurs, au point où certains songent à délocaliser une partie de leurs activités vers d’autres pays.
En passe de devenir un grand pôle agricole, la wilaya de Biskra fait face cependant à ’’un important déficit de main d’œuvre touchant toutes les filières’’ agricoles, affirme Salim Haddoud, producteur et exportateur de dattes de la région de Tolga.
« Moi-même j’ai un déficit de 150 ouvrières pour faire le tri et le conditionnement de dattes », a-t-il confié à l’APS, révélant un projet de délocalisation d’une partie de sa production au Sri Lanka, une première du genre en Algérie.
Ce projet devrait aider cet opérateur à accélérer la cadence du travail pour satisfaire la forte demande en prévision du mois de Ramadhan prochain, connu pour être une période où la consommation de dattes enregistre un ’’pic’’.

« J’ai fait mes calculs : si je continue à travailler avec la main d’œuvre actuelle je ne pourrai jamais satisfaire mes commandes à l’export », a-t-il dit.
Pour honorer ses engagements vis-à-vis de ses clients étrangers, l’entreprise Haddoud devrait traiter 20 tonnes par jour, alors qu’elle ne traite actuellement que 4 tonnes/jour par manque d’ouvrières.
Les unités de conditionnement de dattes emploient de la main d’œuvre féminine choisie généralement pour son doigté, sa technicité et sa rapidité dans le travail.
Le nombre croissant des unités de conditionnement à Tolga ne fait qu’aggraver le problème, indique pour sa part Zendagui Ali, producteur et exportateur de dattes qui n’arrive pas à trouver de solution à cette « immense » contrainte.
« Les opérateurs sont en train de réfléchir à des délocalisations vers des pays étrangers, alors que d’autres pensent à fermer carrément leurs usines », a-t-il regretté.
Ce producteur a été contraint de transférer une partie de sa production à Ouled Jellal, une commune distante de 50 kilomètres de Tolga, pour faire le tri des dattes à domicile « parce que les femmes préfèrent travailler chez-elles que d’aller à l’usine », explique-t-il.
M. Zendagui dit avoir « gros sur le cœur » parce qu’il craint de ne pas satisfaire les commandes, en plus des risques qu’il encourt par rapport au manque d’hygiène, puisqu’il ne peut pas entrer dans les maisons pour superviser le travail des femmes qui font le tri des dattes.
« Pour des considérations socioculturelles, un homme étranger ne peut pas pénétrer à l’intérieur de leurs maisons », a-t-il soutenu.
Pour réduire les dégâts, répondre aux demandes qui s’accumulent et faire face à la concurrence farouche des autres pays, M. Zendagui compte ainsi ouvrir une unité de conditionnement à Ouled Jellal.
Il demande également de pouvoir louer, avec les autres conditionneurs de dattes, les locaux de l’ex-Office national des fruits et légumes d’Algérie (OFLA) d’Alger, pour recruter une main d’oeuvre sur place dans la capitale et être proche des lieux d’embarquement des expéditions de dattes algériennes.
La raréfaction de grimpeurs de palmier dattier fait aussi parler d’elle à Tolga et dans les autres régions où des milliers de grappes de dattes demeurent longtemps suspendues aux arbres, retardant la cueillette et induisant un impact négatif sur la qualité du produit.
« L’assèchement des dattes par les fortes chaleurs de l’été dernier s’est accentué par ce qu’il n’y a pas assez de grimpeurs pour arracher les dattes à temps », a affirmé M. Haddoud.
Certains producteurs songent déjà à introduire des récolteuses de dattes pour pallier le manque de grimpeurs, ce métier ancestral qui est en voie de disparition, au moment où le patrimoine phoénicicole national ne cesse de croître.
APS