L’Algérie n’est pas épargnée par les tractations internationales en cours pour la mise en place d’un nouvel échiquier politique en Libye. Fortement impliquée dans cette opération, la France a dépêché son «Monsieur Libye» auprès des responsables algériens pour engager sans doute des discussions sur la question.
Frédéric Desagneaux, chargé du dossier libyen à l’Elysée, a ainsi été reçu hier par le ministre algérien des Affaires étrangères et il en a résulté la publication d’un communiqué officiel annonçant que la rencontre avait permis aux deux parties de s’entretenir sur le dossier.
Comme à son habitude, Alger a réitéré sa position officielle consistant à laisser les Libyens seuls maîtres de leur avenir et la poursuite du processus politique seule alternative pouvant aider le pays à progresser dans la résolution de la profonde crise à laquelle il fait face.
De cette manière, il semble à l’évidence que l’Algérie a préféré donner un cachet officiel à un déplacement aux objectifs beaucoup plus lointains.
L’émissaire est un diplomate chevronné ayant eu à charge de nombreux dossiers bien sensibles (Khartoum, Proche-Orient…).Sa visite intervient au moment où des réunions de haute importance viennent de s’achever à Paris pour esquisser de nouveaux scénarios pouvant entrer en ligne de compte en Libye en raison des graves ennuis de santé auxquels fait face le général Haftar. L’homme clé du conflit libyen a été hospitalisé le 11 avril dernier en France suite à un accident cardiovasculaire qui a fait craindre le pire à ses proches et à ses soutiens internationaux.
Fermement opposé au Gouvernement national libyen (GNA) conduit par Faïez Esserradj, Haftar bénéficie d’un important soutien des responsables français. Et c’est donc vers eux que se sont retournés les fils du général (ils sont quatre) lorsque le sort de ce dernier se trouvait encore entre les mains des médecins parisiens.
Mi avril, une rencontre se déroule entre les Haftar et de hauts responsables français. La presse internationale s’en fait l’écho et annonce que la famille du général compte peser de tout son poids sur la succession qui pourrait se mettre en place. L’idée intéresse les pays occidentaux auxquels le général était acquis.
L’homme joue un rôle prédominant, politique et militaire, dans le conflit libyen. Il dérange aussi les parties qui voient en lui un obstacle au processus politique dans lequel le GNA (appuyé par la communauté internationale) joue un rôle central.
Militaire aguerri, rompu aux manœuvres politiques, il s’est entouré de ses quatre fils leur déléguant les principaux rôles diplomatiques, politiques et militaires.
Le choix du successeur ne peut, selon eux, s’effectuer hors de ce cercle restreint. Des informations ayant filtré dans la presse française laissent entendre que l’Elysée n’y voit aucun inconvénient. L’option est, au contraire, soutenue et Paris mène actuellement campagne pour mettre toutes les cartes de ce côté en cas d’aggravation de la santé du général. Aux dernières nouvelles, ce dernier serait rentré en Libye rétabli, mais les informations supplémentaires restent du domaine secret.
Le dossier est trop sensible pour pouvoir être évoqué en toute transparence. Haftar est rétabli, annoncent donc ses proches mais les tractations pour une succession sont toujours en cours.
La seconde réunion qui s’est déroulée en Libye à la fin du mois dernier entre les fils du général et les partisans du clan a jeté le trouble.
La visite de Frédéric Desagneaux à Alger aussi. Le pays occupe une place prépondérante dans la résolution du conflit libyen et l’Elysée le sait.
A. C.