Que ceux qui prétendent que la croissance économique est en panne avancent des chiffres». Le constat peu reluisant que l’association patronale du Forum des chefs d’entreprise (FCE) a dressé au sujet de la croissance économique en général, et de l’avenir de l’entreprise nationale en particulier, lors de la rencontre-débat qu’il a organisée avant-hier à l’hôtel El Aurassi, semble donner de la voix aux opérateurs économiques nationaux et à des experts en la matière pour livrer leurs avis opposés sur la question.
En effet, l’économiste et président-directeur général de la société d’aluminium, Sogemetal, Mohand Arezki Aberkane, annonce d’emblée qu’«il adhère tout à fait» aux inquiétudes réelles du FCE qui a constaté entre autres le «gonflement exponentiel du budget de l’équipement de l’Etat» au détriment de la relance de l’investissement national.
Joint hier par téléphone, M. Aberkane a déploré l’absence de concertation entre le gouvernement et les acteurs de la production nationale avant la prise de décisions qui concernent le pays en matière économique.
Abondant dans ce sens, notre interlocuteur va même jusqu’à qualifier le gouvernement d’«autoritariste» tout en lui reprochant d’agir avec des normes qui vont à l’encontre des créateurs de richesse et d’emploi et qui favorisent en contrepartie la sphère informelle.
A ce propos, l’économiste n’a pas manqué de critiquer le fait que «les dépenses d’équipement public avoisine les 50% du budget de l’Etat alors que les normes sont entre 25% et 30%». Le P-dg de Sogemetal a fait remarqué qu’actuellement en Algérie l’économie nationale fonctionne avec un seul moteur, à savoir la dépense publique.
De ce fait, ajoute-t-il, les autres moteurs qui sont ceux de l’investissement et de la production sont mis à l’arrêt. Cette situation risque encore de durer et la politique du gouvernement continuera à tourner le dos aux entreprises tant que les rentes pétrolières sont présentes, a-t-il prévenu.
Devant «l’autisme» observé par le gouvernement depuis la mise en application des mesures prises dans le cadre de la LFC 2009, notre interlocuteur a révélé qu’il a personnellement proposé au sénateur et président d’honneur du FCE, Omar Ramdane, le recours à la grève des sociétés privées de production dans l’espoir de faire plier le gouvernement à revoir certaines mesures, notamment celle du crédit documentaire qui «met dans le même sac investisseurs et commerçants».
Au lieu de pleurnicher, les entreprises doivent produire
Toujours au sujet de la critique émise par le FCE en direction du gouvernement, nous avons également pris attache avec l’économiste et consultant spécialisé dans le domaine de la PME, Abdelhamid Mezaâche. Le consultant n’à, quant à lui, pas été souple avec les chefs d’entreprise privées algériennes.
«Que ceux qui prétendent que la croissance économique est en panne avancent des chiffres», a-t-il défié, ajoutant que «les chiffres qui sont en ma possession parlent d’une croissance de 4,5%».
Dans sa plaidoirie, Mezaâche a soutenu que les arguments avancés par les entrepreneurs ne sont pas fondés et les considèrent comme des lamentations «Au lieu de continue à pleurnicher, les entreprises privées doivent plutôt revoir leur stratégie de production», s’est-il exprimé, tout en qualifiant la gestion des entreprises algériennes d’«obscure».
Imputant le manque de dynamisme de l’économie aux entreprises, Mazaâche lave le gouvernement de tout soupçon en rappelant que des programmes considérables sont mis à la disposition des PME.
Ainsi, avec la dernière sortie du FCE, il serait plus qu’utile qu’un débat contradictoire autour de l’entreprise algérienne soit engagée pour la faire sortir du marasme dans lequel elle tombe. Elle qui est censée propulser l’économie nationale et la faire sortir de sa dépendance des hydrocarbures.
Hafid Mesbah