Le complexe sidérurgique d’El Hadjar renoue avec les crises. La situation semblait s’être améliorée sensiblement après le règlement du conflit opposant deux fractions du syndicat de l’entreprise la mi-juin dernier. Désormais, c’est un conflit entre le syndicat et la direction qui prend forme. Les syndicalistes dénoncent un «plan Omega » destiné à «dégraisser » les effectifs.
Rien ne va plus entre la direction d’ArcelorMittal Annaba et le syndicat d’entreprise qui dénonce des licenciements abusifs. La direction, elle, campe sur ses positions et semble décidée d’ignorer le syndicat en estimant que sa fiabilité était écorchée. Le complexe sidérurgique d’El Hadjar avait connu une situation des plus étranges au mois de juin dernier avec un conflit « intersyndical » très particulier. Mené de l’extérieur par un ancien secrétaire général du syndicat, devenu par la suite député, qui semblait vouloir effectuer un come-back sous les hauts fourneaux, la « bataille Menadi » a entrainé une mise en veilleuse à répétition des hauts-fourneaux et des arrêts des installations.
Il a fallu du temps avant que les éléments de la gendarmerie nationale interviennent sur instruction du Wali d’Annaba pour que le complexe se remette à un fonctionnement normal. Il a fallu que la direction d’ArcelorMittal publie un communiqué pour indiquer que les conditions de travail étaient devenues insoutenables ainsi que des articles de presse qui s’étonnaient de la passivité des pouvoirs publics. Cette période de conflit intersyndical a-t-elle été mise à profit par la direction d’ArcelorMittal pour faire passer, comme l’affirme le syndicat un « plan « masqué de compression des effectifs au sein du complexe ».
« Fiabilité écorchée »
Ce plan aurait, selon la rumeur, un nom : Omega. Il viserait à une compression importante des effectifs et il aurait été enclenché à travers des décisions unilatérales « « comprenant des licenciements de travailleurs (même si ce sont des CDD), d’autres en attente de licenciement ». La Direction des ressources humaines a pris des décisions « arbitraires et abusives à l’encontre de travailleurs titulaires de contrat de travail à durée déterminée (CDD) en procédant au licenciement d’une partie d’entre eux (…) pour incompétence ». Le syndicat s’interroge sur la manière de faire de la Direction générale qui « a évalué pendant toute une année des ouvriers pour les déclarer en fin de parcours incompétents ».
Or, précise le syndicat, au regard du droit du travail et de la convention d’entreprise, il n’existe pas de période d’essai qui dure une année. C’est « loin du bon sens et en totale contradiction », selon le syndicat qui indique avoir demandé au Directeur des ressources de revenir sur sa décision « illégale » qui risque d’avoir des « répercussions négatives ». Sans succès. La direction a maintenu sa décision et le syndicat l’assimile à de la provocation. La direction a-t-elle considéré que la « fiabilité écorchée » du syndicat en raison du long épisode des luttes internes la dispensait de consulter le partenaire social ? C’est ce que semble croire le syndicat qui met en garde sur le fait que les décisions prises risquent de torpiller la stabilité sociale et créer des remous au sein des travailleurs.
La direction : Oméga est un simple outil d’évaluation
Dans les faits, la direction générale d’ArcelorMittal a signifié une fin de contrat à 24 titulaires de CDD (contrats à durée déterminée) sur 217 candidats. Mohamed Guedha, directeur de la communication au sein du complexe sidérurgique, a indiqué que la décision de fin de contrat est intervenue après une année d’évaluation (2 contrats de 6 mois). Cette évaluation « s’étant avérée non concluante, nous avons décidé de rompre la relation de travail. » Mohamed Guedha dément que cette décision entre dans le cadre d’un plan social comme le suggère le syndicat d’entreprise. « Cela ne rentre dans aucun plan social et ça n’est pas une compression d’effectifs », rassure le responsable. Quant au supposé plan de compression OMEGA dont parle le syndicat, M. Guedha fait observer que ce dernier n’est qu’un « outil d’évaluation et de mesure de la performance de l’entreprise », tant en termes de coût, de gestion des ressources humaines, de qualité des produits ainsi que de vente.
Le syndicat d’ArcelorMittal estime que le « dialogue social » est rompu et que la direction entend le mettre devant le fait accompli. Conséquences de cet « unilatéralisme », des dossiers importants tels que la nouvelle grille des salaires, la révision des indemnités de nuisances, l’avancement de la mise en œuvre de l’investissement, la situation des travailleurs de la sous-traitance constituant le réservoir de tout recrutement, sont gelés. Le syndicat, sans donner de détails, entend entreprendre prochainement les actions nécessaires pour désamorcer cette nouvelle crise. Pour rappel, ArcelorMittal projette de porter la capacité de production du complexe d’El-Hadjar à 1,4 millions de tonnes avant de monter à 2 millions de tonnes en 2015. Un accord avec le partenaire algérien, Sider, prévoit un investissement de 200 millions d’euros.