Retour sur l’exploit d’une génération en Or
Évènement exceptionnel, traitement exceptionnel. La qualification en Coupe du monde 2010 aura, sans conteste, marqué un tournant dans la vie sociale, politique et sportive de l’Algérie de 2009. Du Caire, à Khartoum, puis jusqu’à Alger, Liberté Foot est revenu brièvement mais tout en images sur le plus important périple des Verts depuis deux décennies.
A, comme Algérie mon Amour, ou cet infini et si fort attachement au pays à la faveur duquel tout un peuple a oublié presque de vivre pour se consacrer uniquement à cette cause nationale qu’est devenue l’EN. Au Caire mais surtout à Khartoum, l’amour du pays a encore été ostentatoire, en dépit de tout ce qu’auront vécu les milliers de supporters qui ont tout sacrifié pour suivre et encourager leur équipe nationale.
B, comme Bouteflika, le Président, indéniablement par qui l’énorme et inédit déplacement des supporters a été rendu possible. Compatissant aux souffrances de ses compatriotes au Caire, préférant dans un premier temps jouer la carte de l’apaisement, Abdelaziz Bouteflika a ainsi défendu avec une extrême intelligence l’honneur algérien, passant, à juste titre d’ailleurs, comme le “vrai sauveur” des Verts, surtout après leur mésaventure au Cairo Stadium. Ce n’est pas pour rien que les supporters de l’EN présents au Soudan clamaient haut et fort qu’ils voteront pour lui, “même pour un dixième mandat !”
C, comme Cairo Stadium, là précisément où le rêve algérien de se qualifier à la Coupe du monde 2010 s’est évaporé dans les ultimes secondes. C’est là également où plus de 80 000 (près de 100 000 selon certains médias égyptiens) supporters des Pharaons ont porté aux nues leur sélection, l’aidant activement à décrocher son billet pour le match d’appui. Impressionnant chaudron populaire aux normes internationales, le Cairo Stadium n’a, cependant, rien d’un bon souvenir pour les coéquipiers de Karim Ziani qui, rien qu’en pénétrant sur sa pelouse, avaient déjà perdu une bonne partie de leurs moyens.
D, comme dérapages des médias lourds égyptiens qui, à l’instar des chaînes Nile Sport, Modern Sport, Dream ou El-Hayat n’ont cessé de colporter des calomnies à propos de l’Algérie à force d’insultes, d’outrages, de diffamations, de manipulations, de montage d’images et d’analyses et de commentaires bidons d’invités pas peu loquaces. Ridicule !
E, comme égypte, ou le rival historique du football algérien qui, en dépit de disposer de cette génération dorée double championne d’Afrique des Abou Trika, El-Hadhary, Gomâa, Ahmed Hassan, Zaki, Zidan et autres El-Saqqa, El-Mohammadi, Abd Rabbo et Barakat, n’a rien pu faire face à la volonté décuplée d’une Algérie, désormais inévitable bête noire.
F, comme fêtes populaires jusqu’au lever du jour, ou cette joyeuse manière de célébrer le triomphe des Verts qui ont remis l’Algérie dans le circuit international. À travers les 48 wilayas, ces fêtes prolongées ont réconcilié les Algériens avec leurs habitudes allègres.
G, comme gardien géant, le bien nommé Fawzi Chaouchi qui a été l’une des clefs de la qualification au Mondial 2010 grâce à ses extraordinaires interventions et ses géniales parades qui ont annihilé toutes les tentatives égyptiennes. Plus que jamais il a confirmé qu’il demeurait un dernier rempart de choix pour
les Verts.
H, comme Halliche ou l’infranchissable muraille défensive algérienne qui, même le front bandé lors des fameux évènements de l’Iberotel, a réussi deux prestations de très haut niveau lors de cette double confrontation face aux Égyptiens. Sa sortie sur blessure au Caire a été si ressentie et laissé un si grand vide que l’EN n’a pu combler, encaissant dans les arrêts de jeu un second but, synonyme de barrage.
I, comme Iberotel, ou l’établissement hôtelier à l’entrée duquel le bus transportant l’équipe nationale a été pris dans un ignoble guet-apens au cours duquel trois joueurs et l’entraîneur des gardiens ont été blessés, soufflant du reste un vent de colère sur la rue algérienne, indignée et choquée par ce scandaleux et inattendu scénario.
J, comme jeunesse algérienne, celle-là même qui n’a pas hésité une seconde à répondre favorablement à l’appel de la patrie, ralliant Khartoum en conquérant pour prêter main-forte à son EN opprimée
au Caire.
K, comme Khartoum, la très hospitalière capitale soudanaise où les joueurs et supporters de l’EN se sont sentis comme chez eux, tant l’accueil qui leur a été réservé par la population locale différait totalement de ce qu’ils avaient vécu au Caire.
L, comme Lemouchia, dont la terrible image de son visage ensanglanté a tenu le haut du pavé de la presse nationale et internationale. Très précieux dans la récupération lors du match du Caire, il a manqué la rencontre d’appui en raison d’une suspension.
M, comme Motaëb Imad, le joker-buteur égyptien qui, à la faveur de son but de la tête inscrit dans les toutes dernières secondes des six minutes de temps additionnel au Caire, a contraint les Algériens à reporter les festivités.
N, comme note salée qu’ont dû payer les Algériens pour espérer quitter le stade puis Le Caire. Un mort, plus de 150 blessés, des litres de sang qui ont coulé non loin des célèbres pyramides et des blessures non encore cicatrisées : un lourd tribut que personne n’est près d’oublier et que rien ni personne ne peut justifier.
O, comme Oumdurman, où l’EN a eu à disputer son match d’appui et gagné le droit de présence en Afrique du Sud, l’été prochain. Après Constantine en 1981 et Alger en 1985, Oumdurman restera dans l’histoire comme la ville porte-bonheur des Verts, point de passage à la Coupe du monde.
P, comme passeport algérien, ou le seul document exigé pour pouvoir rallier Khartoum et assister à la confrontation de la décennie. Ni visa, ni dossier, ni pièce justificative ou quelconque autre bout de papier exigé d’habitude : le simple passeport vert assurait à son détenteur le transport, le gîte, la nourriture, le billet d’entrée au stade et même le retour à Alger !
Q, comme Qassaman, l’hymne national que le prémédité assourdissant brouhaha du Cairo Stadium a rendu inaudible, mais qui a superbement retenti dans la Forteresse Rouge d’El-Merrikh, repris en chœur par les 20 000 supporters algériens.
R, comme Raouraoua, le président de la Fédération algérienne de football qu’il a su restructurer, au grand profit d’une EN professionnalisée. Trahi par une élimination de la CAN 2006 qui a plombé son premier mandat, Mohamed Raouraoua a pris une sacrée revanche sur le sort en menant l’équipe nationale à une Coupe du monde de la FIFA.
S, comme Saâdane, ou l’entraîneur national qui a réussi l’exploit de hisser le football national de la
107e à la 28e place mondiale. Face au génie reconnu d’Hassan Shehata, Saâdane a confirmé l’étendue de sa science tactique, alignant une EN équilibrée qui a mérité son nouveau statut de mondialiste.
T, comme traquenard ou l’ignoble attaque qu’a subie l’équipe nationale à l’arrivée de son hôtel. Police complice, ultras déchaînés, portail fermé, sécurité affaiblie et rafales de pierres enchaînées étaient les ingrédients de ce vil attentat calculé, un grave précédent dans le monde du football international.
U, comme union sacrée de tous les Algériens épris de football qui se sont tous rassemblés sous l’étendard vert pour porter, tel un seul homme, l’EN aux nues et confirmé que, dans la difficulté et à l’étranger, la solidarité à l’algérienne est toujours exemplaire et sans faille.
V, comme victoire, très certainement et sans contestation aucune l’une des plus belles de l’histoire de l’Algérie indépendante et la plus célébrée depuis deux décennies. Victoire également sur cette égypte trop fière et si orgueilleuse. Victoire, enfin, pour cette jeunesse algérienne qui, l’espace d’une phase éliminatoire… victorieuse, a laissé de côté ses problèmes sociaux pour suivre et encourager son équipe favorite.
W, World Cup de la FIFA, un rêve inimaginable il y a juste un an mais rendu possible par cette génération des Ziani and Co. Une World Cup qui retrouvera donc l’Algérie pour sa première expérience sur le sol africain.
X, comme xénophilie soudanaise qu’ont ressentie sans exception tous les Algériens qui ont transité par Kahrtoum dans leur rêve de Coupe du monde. Une hospitalité exemplaire et désormais connue de tous et que même les accusations sans fondement d’Égyptiens encore sous le choc de l’élimination n’a pu altérer ou remettre en cause.
Y, comme Yahia Antar, le buteur providentiel et héros de la soirée de mercredi dernier, grâce à cette superbe réalisation qui a mis à terre l’ogre égyptien. Blessé, Yahia n’a pu aller au terme de la rencontre, quittant le terrain en traînant la patte, non sans avoir au préalable marqué, d’une inoubliable manière, le retour de l’Algérie dans le concert des grandes nations du football mondial.
Z, comme Zinédine Zidane l’Algérien, qui, ne pouvant effectuer le déplacement au Caire, a tenu néanmoins à téléphoner à Mohamed Raouraoua pour lui transmettre, ainsi qu’à tous les autres membres du club Algérie, ses encouragements avant la décisive confrontation face aux Pharaons.
RACHID BELARBI