Alain Michel : « Au MC Alger, c’est la rue qui dirige le club ! »

Alain Michel : « Au MC Alger, c’est la rue qui dirige le club ! »

Il avait quitté le MC Alger fin 2009, le temps pour son compatriote François Bracci d’aider le club de football de la capitale algérienne à conquérir le titre national au printemps dernier.

Alain Michel, accessoirement professeur agrégé d’histoire et dont le nom fut évoqué quand la fédération algérienne cherchait un successeur à Rabah Saâdane, est finalement revenu au MC Alger. Avec l’ambition de remporter le premier championnat professionnel algérien.

Jeune Afrique : La professionnalisation du football algérien est-il une bonne chose ?

Alain Michel : Bien sûr. Cela va permettre aux clubs d’améliorer leurs infrastructures, puisque des stades devront être mis aux normes et que l’obligation leur a été faite d’avoir un centre de formation dans les prochaines années. Cela aidera aussi à mettre fin à certaines pratiques, comme le travail au noir et donc l’absence de paiements de charges sociales. Enfin, en théorie, on dépensera uniquement l’argent que l’on possède.

Tout cela risque de prendre du temps…

C’est normal. La fédération algérienne veut laisser du temps aux clubs pour intégrer les nouvelles exigences, mais elle est déterminée à prendre des sanctions si certains devaient ne pas jouer le jeu. En Algérie, la gestion des clubs est volontairement opaque. Des sommes importantes circulent, sans que l’on en connaisse toujours l’origine.

On a tendance à dire que les meilleurs joueurs gagnent dans les 100 000 euros par an, mais il y en a qui peuvent gagner plus du double. Ils sont rares, mais cela existe. Avec le passage au professionnalisme, la fédération souhaite que l’ouverture des capitaux attire des grosses entreprises, qui stabiliseront les clubs.

Le professionnalisme pourrait-il apaiser les relations parfois tendues qu’entretiennent les clubs algériens ?

Je l’espère, car le football est une micro guerre civile en Algérie ! Il n’y a pas assez de solidarité entre les clubs. Parfois, on entend des déclarations tapageuses, sur le thème de la défense du territoire, sur les velléités destructrices de pseudo-opposants, qui sont parfois inventées pour renforcer l’unité. Le professionnalisme va bousculer certains notables locaux qui avaient mis sur pied des parodies de Sociétés Sportives Par Actions (SSPA).

Cette réforme aura-elle aussi une influence sur la violence qui perturbe le football algérien ?

La société algérienne est inégalitaire. Le stade est un lieu de défoulement, où certaines attitudes sont tolérées, alors qu’elles ne le seraient pas en dehors ! Des gosses désœuvrés viennent au stade, s’identifient à une équipe et se croient tout permis.

Récemment, lors de notre victoire à Khroub (3-2), des pierres ont été lancées sur le terrain, avec les risques physiques que cela comporte pour les joueurs et les staffs techniques. Les clubs n’y sont pour rien, mais ils sont sanctionnés par des matchs à huis-clos. Je pense qu’il faut donner du sens à la passion de ces jeunes, en leur donnant des valeurs éducatives. Pour cela, il faut aussi une volonté des pouvoirs publics.

Vous êtes revenu au MC Alger après l’avoir quitté en novembre 2009 parce que vous n’étiez plus payé…

J’en avais effectivement assez des retards de salaire. Là, je suis revenu, car les choses ont officiellement changé. Tout n’est cependant pas reglé. Mon contrat d’un an est prêt, mais pas encore signé. Vous savez, c’est difficile d’entraîner en Algérie. L’espérance de vie d’un entraîneur va rarement au-delà de deux défaites de suite. Et un étranger est payé pour gagner ! Au MC Alger, c’est la rue qui dirige le club !

Quelles sont les ambitions du MC Alger ?

Le club n’avait plus été champion depuis 1999. On va essayer de se maintenir parmi les trois premiers. La concurrence s’annonce rude, avec la JSK, Sétif, ou l’USMA. Au MC Alger, l’effectif est jeune, mais il a de grosses qualités. Et on va disputer des compétitions continentales, ce qui est bon l’expérience