Contrairement à ce qui était prévisible, le prédicateur égyptien résidant au Qatar Youcef Al-Qaradaoui, n’est pas le bienvenu chez lui en Egypte et plus précisément à la fameuse Mosquée d’Al-Azhar d’où il est issu.
La décision du ministère des Waqfs égyptien, qui l’a autorisé à donner des prêches le vendredi, a reçu une vive contestation de la part du syndicat des imams, alors que cette même décision avait obtenu la bénédiction du syndicat des prédicateurs, en cours de création. La cause de ce refus est que les prêches d’Al-Qaradaoui «revêtent un caractère politique et subversif» et, surtout, partiaux car attaquant des régimes et en épargnant d’autres, allusion au Qatar.
Les opposants d’Al-Qaradaoui ont insisté sur la nécessité de donner leur chance à des imams jeunes, loin de toute influence partisane, se demandant, par ailleurs, pourquoi le cheikh controversé a choisi de revenir en Egypte, dans ce contexte précis où la rue égyptienne s’insurge de nouveau, menaçant le pays d’une nouvelle ère d’instabilité et de chaos. Pour eux, Al-Qaradaoui veut prendre le train du changement en marche et rattraper le temps perdu.
Le syndicat des imams dénonce, dans le même temps, la marginalisation des imams des Waqfs, «qui subissent une véritable persécution». Le ministère des Waqfs, qui a salué la présence d’Al-Qaradaoui, aspire, lui, à travers cette démarche, à réhabiliter le cheikh chez lui, d’autant plus que, estime le gouvernement des Frères musulmans, Al-Qaradaoui «était l’un des plus farouches opposants au président déchu Hosni Moubarak».
Quant à la prestigieuse institution religieuse, elle considère cette invitation et le tollé médiatique qu’elle a suscité comme une «incitation au désordre et à la division». Ce bras de fer qui oppose le syndicat des imams et le ministère des Waqfs, accusé de préparer Al-Qaradaoui pour prendre la tête d’Al-Azhar, ne va pas s’arrêter là. En effet, le syndicat des imams, affilié à Al-Azhar, refuse que les imams égyptiens qui n’ont pas quitté le pays soient mis sur la touche pour laisser place à des prédicateurs opportunistes, et que les Frères musulmans fassent main basse sur cette institution religieuse très influente en Egypte.
Ces mêmes opposants craignent également qu’en faisant appel à Al-Qaradaoui, le gouvernement dirigé par les Frères musulmans vise à placer Al-Azhar sous la houlette d’un Qatar qui s’attèle à toucher les dividendes de sa participation au renversement des régimes dans plusieurs pays arabes, en s’impliquant de façon directe dans les nouveaux choix politiques et économiques, et en imposant le wahhabisme comme doctrine religieuse.
Mohamed El-Ghazi