Al Barghati: «Les milices armées avancent vers l’Algérie, la Tunisie et l’Égypte»

Al Barghati: «Les milices armées avancent vers l’Algérie, la Tunisie et l’Égypte»

Nombreux sont ceux qui pointent du doigt les Etats occidentaux quant à la situation désastreuse qui prévaut en Libye depuis plus de trois ans. Dans un entretien accordé à Echorouk, Mohamed Al Barghati, ancien ministre libyen de la Défense estime que la Libye est sur le point d’être livrée à une guerre civile totale. Pour empêcher cela selon lui, il appartient aux pays de voisinage, à l’image de l’Algérie, l’Égypte et la Tunisie et les autres grandes puissances d’agir vite en sauvant l’Etat libyen d’une chute.

Quelles sont, selon vous, les raisons de la détérioration de la situation en Libye ?

La dégradation de la situation en Libye résulte essentiellement des fissures entres les Frères musulmans libyens et l’Alliance des forces nationales (AFN, libérale) ainsi que du différend entre le Congrès général national (CGN) et le gouvernement, ce qui a fait que chacune des parties soutienne une brigade armée. De plus, en l’absence d’une forte armée pro-Etat tous les conditions de vie se sont détériorées et l’incapacité des Islamistes de faire partie du Congrès a aggravé davantage la crise.

A la lumière de la situation qui prévaut dans le pays, où, selon vous, la Libye se dirige-t-elle ?

Elle se dirige vers plus d’escalade et vers une intervention d’autres parties. En cas de non intervention des Etats régionaux en premier lieu et les grandes puissances en second lieu, la chute serait certaine et la Libye serait plongée dans une guerre civile.

Vous parlez d’intervention des pays de voisinage, cependant l’Algérie, la Tunisie et l’Égypte ont refusé d’intervenir en Libye ?

Nous savons bien que les pays voisins ne puissent intervenir militairement dans le pays, mais je veux dire là-dessus que l’intervention se fasse à travers la multiplication des efforts à l’échelle régionale et internationale et rendre effectives les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU, surtout que la Libye fut placée depuis un moment sous le chapitre VII concernant la protection des civils. Les efforts régionaux pourraient mener vers une stabilité politique qui aboutirait à la formation d’un gouvernement après l’élection d’un président qui aura pour mission de remettre le pays sur les rails.

Quelle est la menace qui plane sur les pays du voisinage ?

La Tunisie sera le premier à être sérieusement touché tant sur le plan sécuritaire qu’économique car elle est face à un important flux de Libyens. Ce qui constitue un fardeau en plus pour les autorités tunisiennes qui sont déjà confrontées à des difficultés. Certes que l’Algérie n’est pas dans une même situation, mais la situation en Libye en général pourrait favoriser la propagation de pensée intégriste, la prolifération des armes et les camps d’entraînement pour les organisations armées compte tenue de la grande superficie du pays et de l’incapacité du pouvoir en place de les contrôler. Autrement dit, le Libye pourrait devenir un point de départ des groupes d’extrémistes en direction des pays voisins.

Avez-vous en votre possession des statistiques sur le nombre des armes hors du contrôle des services de sécurité libyens ?

Il n’y a pas de statistiques officielles et précises, mais d’après ce que j’ai pu constater lorsque j’étais ministre, il y a d’importantes quantités de tous types d’armes qui circulent dans toutes les régions du pays, et une partie serait acheminée au-delà des frontières. Vu les événements qu’a vécus la Libye ces quatre derniers mois témoignent des capacités limitées du général Khalifa Haftar et que ce sont les autres factions qui prennent le contrôle.