Aït Ahmed dénonce la complicité internationale avec le régime algérien

Aït Ahmed dénonce la complicité internationale avec le régime algérien

Dans un discours prononcé à Paris, en début de semaine, lors d’une conférence internationale sur « Le droit international : Etats puissants et mouvements de résistance », le président du Front des forces socialistes (FFS), Hocine Aït Ahmed, a tenu à rendre hommage au Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) en tant que « premier et dernier gouvernement algérien pluraliste et démocratique ».

Dans son intervention qui coïncidait avec la célébration du 51e anniversaire de la naissance du GPRA, le premier responsable du FFS a fait appel à sa mémoire de militant pour la libération du peuple et du pays pour dire que « le GPRA a symbolisé le respect des droits humains et du droit humanitaire en dépit de l’état de guerre ».

Comme pour rappeler au monde que face à l’injustice imposée par « la raison du plus fort » traduite par les puissances coloniales, les mouvements de résistance qui étaient en quête de droit étaient les plus à même de connaître et d’appliquer le respect des droits de l’homme.

Prétendre jouir d’un droit, c’est aussi faire preuve de le concéder aux autres, chose que les puissances coloniales refusaient de reconnaître puisqu’elles étaient en position de domination.

Revenant sur le congrès de la Soummam de 1956, le leader du FFS explique qu’il y a eu une prise de conscience de l’impératif stratégique « de mobiliser des actes de solidarité internationale avec l’Algérie combattante et de soutien des institutions onusiennes ».

Mais aussi d’adopter « deux résolutions fondamentales : l’une consacre la primauté du politique sur le militaire, l’autre impose le principe de la collégialité, garante d’une cohérence démocratique et d’une cohésion politique ».

Le congrès de la Soummam, continue Hocine Aït Ahmed, a mis en branle « une dynamique révolutionnaire au sens politique, démocratique, rationnel et réaliste… Elle préparera la renaissance de la Dawla – l’Etat – grâce à la légitimation populaire du GPRA », dit-il.

Les résolutions du congrès de la Soummam ont été foulées aux pieds

Le Gouvernement provisoire, témoigne le leader du FFS, « ne cessait de rappeler à l’ordre l’état-major des frontières pour condamner les violations des droits humains et dénonçait avec fermeté les liquidations sans justice et les emprisonnements arbitraires parmi les compatriotes commis sur les sols marocain et tunisien ».

Et malgré la férocité de la répression coloniale, le GPRA s’était opposé à l’exécution des prisonniers français.

« C’était pour lui une décision humaniste mais surtout une manière de jouer le jeu de la légalité internationale et d’asseoir le prestige de la révolution en faisant respecter les normes du droit international humanitaire, alors que l’armée coloniale, qui se targuait de comportements civilisés, continuait à défier la communauté internationale en poursuivant la stratégie des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité », souligne le premier responsable du FFS et militant pour la démocratie.

Ceci et de regretter qu’au lendemain de l’indépendance, « toutes les stratégies qui avaient contribué à la victoire de la révolution algérienne contre le colonialisme français ont été détournées de leur but initial qui était la liberté pour la souveraineté du peuple, pour devenir les instruments d’un régime de domination impitoyable ».

Et d’ajouter que même « la solidarité internationale avec l’Algérie combattante est devenue une complicité internationale avec le régime. Le soutien des institutions onusiennes est passé du peuple en lutte au régime en place ».

Aït Ahmed estime que les résolutions du congrès de la Soummam ont été foulées aux pieds, qu’il s’agisse de la primauté du politique sur le militaire ou du principe de collégialité, de cohérence démocratique, de cohésion politique ou de pluralisme effectif et de consensus national.

« Le pouvoir algérien a réussi là où Soustelle a échoué : la division et la récupération des élites. » Aït Ahmed tire deux exemples de l’actualité, à savoir l’affaire Mécili et celle de Tibhirine pour affirmer que « la collusion des intérêts a prévalu sur le droit.

Si on leur ajoute les massacres à grande échelle des années 1997/1998 sur lesquels un odieux silence s’est abattu, on prend la mesure de la folie criminelle que déclenche l’abandon du droit », indique l’opposant politique.

Ceci le mène à la conclusion que la complicité internationale avec les régimes despotiques est à même de détruire tout idéal de quête pour les droits.

« C’est la négation, sur la scène internationale, des principes démocratiques les plus élémentaires. C’est le non-respect du droit international par les puissants dans leurs pratiques (publiques ou secrètes) et dans le soutien qu’ils apportent à des régimes qui eux-mêmes violent les droits de leurs propres peuples », dit-il.

Et de regretter que même le droit humanitaire est aussi utilisé par des Etats comme un élément de domination parmi d’autres.

« Le droit humanitaire a-t-il encore une chance de se faire entendre en dehors des stratégies de domination et d’agression ? » s’interroge Aït Ahmed.

Nadjia Bouaricha