Avec plus de six mois de retard, la 4e session du conseil national du RND s’est ouverte jeudi dernier à la Mutuelle des travailleurs des matériaux de construction à Zéralda. Comme il est de tradition, c’est le secrétaire général du parti qui a ouvert les travaux avec une allocution.
D’emblée, Ahmed Ouyahia s’est excusé du retard et a indiqué que si la session s’était déroulée il y a quelques mois, «elle se serait focalisée sur une année 2010 bien réussie». Et le SG de RND de rappeler toutes les réalisations et les mesures prises durant l’année écoulée. Il tempérera toutefois les ardeurs en précisant que tout cela ne voulait pas dire que l’Algérie était devenue un paradis «sans lacunes, sans difficultés à résoudre ou sans problèmes qui persistent».
Pour Ahmed Ouyahia, les progrès réalisés «ne sauraient camoufler aussi la plaie de la corruption, y compris celle qui salit parfois les prestations de certains services publics en relation directe avec les citoyens». Ces lacunes et la «brutale hausse des prix de certaines denrées alimentaires de base ont été exploitées pour le déclenchement de la vague de troubles que notre pays a vécus en janvier dernier». Convaincu de cette exploitation des troubles, le secrétaire général du RND reconnaît tout de même que le terreau s’y prêtait. «Nous reconnaissons aussi que beaucoup de nos jeunes souffrent encore du chômage, nourrissant des inquiétudes pour leur avenir
. Nous reconnaissons également que les familles souffrant de la crise du logement se comptent par milliers.» Ahmed Ouyahia a rappelé les différentes mesures prises et qui ont permis, selon lui, de préserver la stabilité du pays, «ainsi que la mise en échec des attentes et des manœuvres de ceux qui espéraient voir l’Algérie sombrer de nouveau dans une spirale infernale». Il rappellera également que l’Algérie a vécu, il y a vingt ans, son printemps démocratique. «Ils ont oublié que l’Algérie a déjà payé un prix sanglant aux calculs politiciens et à la quête du pouvoir pour le pouvoir. La sévérité du ton de l’opposition ou de certains titres de presse, que nous respectons les uns et les autres, est une preuve que la démocratie et la liberté ne sont pas à inventer en Algérie.» A l’issue du conseil national, le secrétaire général du RND a de nouveau pris la parole pour rappeler les positions de son parti, lequel au demeurant s’est prononcé, et c’est la première fois, de manière aussi explicite pour la révision de la Constitution à laquelle il prendra part au débat. Mais c’est sans doute lors de la conférence de presse tenue à l’issue de ce conseil que Ouyahia se fera plus explicite sur certaines questions. A commencer par celle de savoir si l’Etat n’était pas en train de s’affaiblir en répondant tous azimuts à toutes les revendications, même si certaines semblent infondées. «L’Etat ne s’est pas affaibli. Il gère les situations», répondra-il à une question de La Tribune. «L’Etat n’est pas faible. Mais il réagit comme une mère impuissante devant ses enfants. Toujours en relation avec la contestation, mais surtout avec les événements de janvier dernier, Ahmed Ouyahia n’a pas manqué de pointer un doigt accusateur à l’adresse des barons de l’informel et des lobbys qui pourraient, si cela continue, prendre le pouvoir. «Les tenants de l’argent sale ont gagné. Plus de facture, plus de paiement par chèques. Mais ce n’est que partie remise», a-t-il averti sans pour autant citer les noms, estimant que ce n’était pas le plus important, d’autant que d’aucuns les connaissent.
Le secrétaire général du RND a également indiqué que l’échec de la gestion par un ministre de son département ne signifiait nullement qu’il y avait crise politique. Revenant sur les réformes politiques annoncées par le président de la République, dont la révision de la Constitution, il rappellera que la question ne date pas d’aujourd’hui. Le Président s’était prononcé pour un changement radical de la Constitution en 1999 déjà. Tout comme toutes les autres réformes.
«Nous n’avons pas attendu la révolte dans les pays arabes», affirmera-t-il, dont il dira que les discours de démocratie entretenus en ce moment dans ces pays ne sont que de vagues promesses. Il affirmera cependant que le président de la République n’a encore consulté aucun parti politique sur la question. Les négociations sur la révision de l’accord d’association avec l’Union européenne sont plus que jamais d’actualité, selon Ahmed Ouyahia, dès lors que cet accord ne profite pas à la relance de l’économie algérienne. A une question sur le devenir de trois entreprises publiques de récupération de métaux ferreux et non ferreux, dont l’exportation a été suspendue par l’article 43 de la LFC pour 2010, le conférencier nous renvoiera à ce que perdent Sonelgaz et Algérie Télécom conséquemment aux vols des câbles. Toutefois, il n’a pas exclu que le gouvernement pourrait trouver des solutions à ces entreprises. Sur le volet social, il indiquera qu’aucun pays au monde ne dépense autant d’argent en matière de transferts sociaux. A propos des marches interdites dans la capitale, il a affirmé que l’Algérie n’était pas récidiviste et qu’elle a déjà tiré les enseignements du passé.
«On a vu à quoi nous ont menés les manifestations insurrectionnelles de 1991. Nous ne voulons plus voir les Algériens se cogner entre eux. Si nous ne savons pas marcher sereinement et assurer l’ordre, il vaut mieux s’en abstenir», dira-t-il tout en précisant que les marches sont autorisées dans 47 autres wilayas du pays. A propos de la marche interdite à Oran, il dira : «Le Premier ministre m’a fait savoir que les organisateurs n’ont déposé aucune demande pour ce faire, comme le stipule la loi.» Il n’y a pas eu d’absence de la diplomatie algérienne par rapport à la Libye. «Nous ne pouvons prendre position contre l’une ou l’autre des parties. C’est au peuple libyen de choisir et nous n’interférons pas dans les affaires internes des pays.»
Cela dit, Ahmed Ouyahia a affirmé que l’Etat algérien ne peut en aucun cas accepter qu’un peuple se fasse massacrer. S’agissant d’un pays voisin, il y allait de la sécurité de l’Algérie. Catégorique, il tranchera : «Aucun peuple, si cher soit-il, ne mérite que le sang d’un Algérien coule pour lui.» Il rappellera que lorsque les enfants de l’Algérie se faisaient égorger par la horde terroriste, personne n’a pipé mot. Mieux, il donnera l’exemple de la réunion des ministres arabes de la Communication à laquelle avait assisté Habib Chawki, à l’époque membre du gouvernement, et pendant laquelle il s’est vu refuser une poignée de main d’un ministre arabe qui lui avait rétorqué : «Vos mains sont tachées de sang.» Et Ouyahia de conclure sur le sujet : «Nous ne pouvons pas mener la guerre à toute la planète.»