Le passage du secrétaire général du RND et Premier ministre à l’émission politique Hiwar Essaa de l’ENTV était très attendu.
Il ne s’était pas beaucoup exprimé depuis le début de l’année sur les événements qui agitent la scènenationale et régionale. Il a surtout plaidé pour la stabilité du pays qui, selon lui, n’a pas de prix et dépasse même le besoin de réformes politiques». Les réponses sur celles-ci ont pris la part du lion du débat animé par deux confrères. Ouyahia est catégorique.
«Il n’y a pas dans notre pays de crise politique majeure nécessitant la dissolution du Parlement et le départ du gouvernement. «En Algérie, dira-t-il, le changement est intervenu en 1989. Il y a plus de 30 partis politiques, une centaine de titres de presse, nous n’avons pas d’opposants politiques en prison, ni d’exilés politiques. Le développement économique profite à toutes les régions du pays».
Aussi s’est-il montré opposé à une constituante ou à la tenue d’une conférence nationale. «Elle signifie le reniement de tout ce qui a été fait depuis l’indépendance». «Après va-t-on s’entendre sur quel type d’Etat ? islamique ? laïc ? républicain ?», s’est-il interrogé. Le chef du RND a reconnu, par contre, l’existence d’une crise sociale dans le pays. « Le front social est en ébullition», a-t-il dit. Les aides sociales de l’Etat restent insuffisantes malgré leur importance, la crise du logement n’a pas disparu, a-t-il dit. «Il y a un problème de transparence dans le logement», a ajouté
M. Ouyahia. Evoquant la colère des étudiants qui demandent la suppression du système LMD, il s’est interrogé : «il y a 600 000 étudiants inscrits au LMD. Comment peut-on supprimer ce système ?».
NON À LA CONSTITUANTE
Le patron du RND s’est montré attaché aux urnes expliquant que «son parti était contre l’arrivée au pouvoir par les crises. «On est contre la dissolution du parlement et le départ du gouvernement parce qu’on n’est pas en crise politique», a insisté M. Ouyahia. Il a confirmé la réunion des hauts dirigeants de l’Etat. Il s’est par contre prononcé pour « une révision profonde de la Constitution et l’instauration d’un système semi-présidentiel. «Le système parlementaire pourrait être une solution viable à long terme». Au passage, il décochera une flèche au leader du MSP. «S’il n’était pas content de l’alliance présidentielle, il n’était pas obligé d’y rester». «Nous avons surtout un grand respect pour cheïkh Nahnah mais 2012 est proche pour ceux qui sont adeptes du changement ». Le Premier ministre a démenti toutes les rumeurs sur sa démission et affirmé : «je suis un serviteur de l’Etat et j’en suis fier». Même en cas de fin de mission, il ne se voit pas «rejoindre les rangs de l’opposition».
Ahmed Ouyahia est revenu sur la crise du sucre et de l’huile. Il a dit que les émeutes ont été préfabriquées à 60% par les barons de l’informel. Il a justifié le report de l’utilisation du chèque dans les transactions commerciales supérieures à 500.000 dinars par la nécessité de stabiliser le pays. «La contrebande et l’informel, si on les combat frontalement, on risque de déstabiliser le pays. On le fait par étapes», a-t-il dit. L’instabilité ferait l’affaire des perturbateurs. «L’État n’est pas contre les jeunes, ne peut pas tourner le dos à la société, mais il l’est contre ces barons», a-t-il ajouté.
L’ETAT COMBAT LA CORRUPTION
Evoquant les enquêtes à Sonatrach et celles concernant l’autoroute est-ouest, M. Ouyahia a souligné que les affaires de corruption n’ont pas été révélées par la presse ou par des détectives privés, mais par les services de l’Etat. Sur l’économie, le Premier ministre a expliqué que les aides accordées par l’Etat au secteur public étaient destinées à relancer les entreprises publiques pour sauvegarder des emplois.
Il a au passage répondu aux patrons privés qui veulent bénéficier de l’aide de l’Etat. «Nous accordons des aides au secteur public parce qu’il appartient à l’Etat. Si ces entreprises font des bénéfices, l’Etat va en bénéficier. Nous sommes prêts à aider le privé à condition qu’il accepte d’ouvrir son capital à l’Etat». Au sujet de l’accord d’association avec l’UE, le Premier ministre a expliqué que les négociations actuelles portent sur le report de la date d’entrée de la zone de libre échange fixée à 2017. «On peut négocier le report ou le retrait, mais on ne peut pas se retirer», a-t-il dit.
CRÉDITS POUR LES JEUNES
Il a annoncé que de nouvelles mesures à caractère social et économique seront prochainement rendues publiques. Sans en préciser la nature, il dira «qu’elles allaient coûter à l’Etat des dépenses considérables et s’inscrivent en prolongement de celles déjà arrêtées par le Conseil des ministres lors de sa réunion du 22 février dernier». Celles-ci concernaient surtout l’octroi de micro-crédits et des facilités d’accès au logement. 50.000 logements promotionnels furent inscrits pour être réservés aux jeunes, sous la forme de la vente à tempérament et l’accélération du lancement de 400.000 unités delogement rural. La jeunesse algérienne a, selon lui, «besoin de nouvelles opportunités.
Les jeunes promoteurs peuvent également prétendre désormais à un relèvement du montant du crédit sans intérêt, alloué à l’acquisition de matières premières, et le relèvement du crédit destiné à l’acquisition de matériels et équipements pour exercer une activité manuelle. Des améliorations des dispositifs déjà mis en œuvre pour assurer l’insertion dans le monde du travail des diplômés universitaires et techniciens supérieurs au sein de l’administration publique ou des entreprises économiques avaient en outre été décidées».
Sur ses ambitions présidentielles, Ouyahia a paraphrasé l’ancien président français Giscard d’Estaing qui a dit un jour : «il y a un destin entre moi et la présidence». Enfin, le Premier ministre a donné la position de son parti sur les révoltes qui secouent les pays arabes. «Ce qui se passe dans ces pays relève de leurs affaires internes. Pour la Libye, nous sommes contre l’utilisation de la violence pour régler les problèmes. Nos préoccupations sont liées à la stabilité de la région, la sécurité de nos frontières, le développement du terrorisme et l’avenir de la présence étrangère».