Les agressions que l’on fait subir à nos vergers n’interpellent ni le simple citoyen, encore moins le responsable politique.
L’Algérie décide de réduire ses importations et la filière des pommes françaises des Alpes sombre dans la crise et voilà une affaire d’Etat. Le président de la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur (Paca), Christian Estrosi, monte au créneau, alerte, avertit et demande à son Premier ministre d’intervenir auprès de l’Algérie pour solutionner la crise. Voilà un bel exemple qui doit nous inspirer en ces moments de débats stériles sur les importations de bananes. La France protège ses pommes, celle des Alpes, mais qui protègera les pommes algériennes, celle de Khenchela? Les agressions que l’on fait subir à nos vergers n’interpellent ni le simple citoyen, encore moins le responsable politique. L’abricot de N’gaous à Batna, la datte de Tolga à Biskra, la fraise de Skikda, la pastèque d’Azeffoun, le melon de Oued Rhiou à Chlef, sont des produits phares qui, chaque année, se perdent dans l’indifférence la plus totale. La pomme de Bouhmama, au nord-ouest de Khenchela, un véritable capital qui se perd en raison du manque de «marché national de la pomme».
Cet espace commercial pourra favoriser le développement de cette arboriculture fruitière. Il permettra surtout de mieux maîtriser la distribution de ce fruit, produit à profusion par ces régions et de répondre à la demande locale et nationale.
Qui se souvient du «bal des cerises» à Larbaâ Nath Irathen ex-Fort National, en hommage à ce fruit magique d’une douceur exquise et aux qualités nutritionnelles certaines. Plus qu’une fête, c’est un festival culturel et économique instauré depuis les années 1940, mais depuis, la Kabylie a perdu près de 60% de ses cerisiers.
Que devient la fête des oranges, célébrée jusqu’en 1980 dans la wilaya de Chlef? Il était une fois la «Washington», la «Thomson navel», la «clémentine» et la «double fine».
Qu’est devenue la fête de la fraise à Skikda qui était autrefois un moment de festoiement, et une manifestation culturelle et sportive? Le fameux abricot rosé de N’gaous, dans la wilaya de Batna n’est pas mieux loti. Il souffre d’un déficit qui ne relève pas de la grande technologie et ne demande pas de gros moyens. Il s’agit tout simplement de l’absence d’une unité de transformation, un déficit quant au développement et la modernisation de la culture de l’abricot.
Regrettable situation pour les plus importants exploitants de vergers d’abricots de la wilaya, selon lesquels ce produit était pourtant exporté, par le passé, vers la France. Le même destin est connu par la figue de Beni Maouche et celle de Barbacha. Pour l’histoire, cette dernière a gagné la Palme d’or en 1963, déjà à Bruxelles. C’est la figue turque qui lui fait concurrence aujourd’hui en Algérie même quand le même produit algérien est bradé aux frontières pour rentrer dans les quotas du Maroc et de la Tunisie, destiné par la suite à l’UE. A ce titre, le cas de la Deglet Nour est instructif.
La meilleure datte au monde, la plus succulente, qui est d’origine algérienne, est transportée frauduleusement en dehors des frontières pour être vendue en Europe sous le label marocain ou tunisien. Il a fallu attendre l’année dernière pour rétablir quelque peu la situation quand des dattes algériennes de la marque Phoenix ont été sacrées comme l’un des meilleurs produits bio de l’année 2016 en France.Ces dattes, produites par Biodattes Algérie, dans des terroirs de Tolga, dans la wilaya de Biskra notamment, sont commercialisées par la société française Biofruisec sous la marque Phoenix.
Que dire alors de ce fameux raisin d’Algérie tant convoité par les colons qui en ont fait un label pour ses douces saveurs dues au climat particulier et un ensoleillement exceptionnel.
Dans un contexte de forte concurrence internationale où les produit bio sont très recherchés, la filière agricole algérienne peut s’offrir une très grande opportunité pour peu qu’elle opère sa mutation.
Il s’agit d’organiser d’abord le marché domestique, huiler les circuits de distribution, de transport et de concertation et surtout entamer la certification et la labellisation des produits agricoles afin d’assurer leur protection sur le marché international. Mais quand c’est avec une nostalgie qu’on évoque ce patrimoine arboricole fruitier, cela signifie qu’on a dilapidé des joyaux qu’on n’a pas su conserver.