L’Afrique du Sud a déployé l’armée, notamment dans le township d’Alexandra à Johannesburg, pour aider la police à enrayer les violences xénophobes qui ont fait au moins sept morts en avril dans le pays.
Réclamée par les associations de la diaspora africaine en Afrique du Sud depuis plusieurs jours, la mobilisation exceptionnelle de l’armée est «le dernier recours», a déclaré la ministre de la Défense Nosiviwe Mapisa-Nqakula. «La décision n’a pas été prise à la légère», a-t-elle souligné.
«L’armée va être utilisée comme force de dissuasion contre la criminalité que nous observons», a-t-elle argumenté. «Nous ne sommes pas un Etat militaire. Ce n’est pas trop tard, c’est le bon moment». A Alexandra, township adjacent aux beaux quartiers de Johannesburg, une nouvelle agression a eu lieu dans la nuit de lundi à mardi, visant un couple de Zimbabwéens. «Ils ont pu sortir (de l’hôpital) et sont hors de danger», a précisé la ministre. Samedi dernier, un Mozambicain, Emmanuel Sithole, y a été poignardé à mort. Ses quatre agresseurs présumés ont été déférés hier, à un juge, qui les a maintenus en détention. Officiellement, les violences ont déjà fait sept morts : trois Sud-Africains et quatre étrangers selon la police, dont un Ethiopien brûlé vif de nuit dans sa maison. Mais le bilan n’est pas fiable. Les autorités mozambicaines déplorent par exemple trois morts, un à Alexandra et deux à Durban, soit un de plus que la police sud-africaine. Les violences ont aussi fait plusieurs milliers de déplacés, dont plus de 900 ont décidé d’être rapatriés.
«Certains s’étaient inscrits mais ont changé d’avis quand les bus sont arrivés», a précisé le ministre de l’Intérieur Masuli Gigaba. A leur arrivée dans leur pays, ceux qui ont préféré partir se juraient de ne plus revenir, comme Trust Mhlanga, ouvrier zimbabwéen du BTP depuis quatre ans à Durban. «J’ai tout perdu», a raconté un de ses compatriotes charpentier, Melusi Ndiweni, en transit à la frontière. Mardi soir, plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées devant la Cour constitutionnelle à Johannesburg pour une veillée aux bougies.

Les bougies étaient disposées de façon à représenter deux continents africains et un «X» symbolisant le rejet de la xénophobie. Une femme tenait une pancarte sur laquelle étaient écrits les mots : «Honte à nous». Les violences xénophobes sont récurrentes en Afrique du Sud, qui accueille deux millions d’émigrants africains officiellement recensés et de nombreux réfugiés et sans-papiers. Alors que Pretoria mise sur le tourisme et a pris l’habitude de se servir de l’image de Nelson Mandela comme étendard diplomatique, ces violences sont un coup dur économique et diplomatique.
R. I. / Agences