Les talibans ont menacé dimanche pour la première fois d’attaquer directement les bureaux de vote lors des élections présidentielle et provinciales de jeudi prochain en Afghanistan, dans des lettres distribuées et affichées dans leurs bastions du sud du pays.
La menace, inscrite sur des tracts affichés et déposés dans des villages du sud, a été authentifiée par un porte-parole rebelle, Yousuf Ahmadi.
Le message, dont l’AFP a eu copie, engage les habitants à ne « pas participer aux élections, pour ne pas devenir une victime de nos opérations, parce que nous allons utiliser de nouvelles tactiques ».
« Nous utilisons de nouvelles tactiques visant les centres de vote. Quiconque sera blessé dans et autour des centres de vote en sera responsable, car il en aura été informé à l’avance », a déclaré Yousuf Ahmadi à l’AFP.
« Nous allons accélérer nos activités la veille et le jour des élections », a ajouté le porte-parole, en précisant que les commandants talibans avaient été chargés d’ordonner à la population de boycotter le scrutin.
Les talibans avaient jusqu’ici seulement appelé au boycott, sans annoncer d’attaques contre les bureaux de vote jeudi.
Ils avaient également invité les Afghans à prendre les armes contre « les envahisseurs » étrangers, c’est-à-dire les troupes internationales qui avaient renversé le régime taliban fin 2001, aujourd’hui fortes de 100.000 hommes et chargées avec les forces afghanes de veiller à la sécurité des élections.
Les lettres de menaces soulignent que les électeurs, en tant qu’alliés du gouvernement afghan et des forces étrangères, seront considérés comme des ennemis de l’islam.
Ces lettres signées de commandants locaux ont été diffusées dans plusieurs autres provinces du sud du pays, a indiqué M. Ahmadi. Mais les talibans vont « viser les bureaux de vote dans l’ensemble du pays », a-t-il précisé.
« J’ai vu ces avertissements. Ils disaient que les bureaux de vote allaient être visés, et que les gens ne devaient pas y aller », a confirmé Ahmad Shah, un habitant de la province de Zaboul (sud).
Des lettres de menace similaires ont également été diffusées à Khost (sud-est). « Il y a aussi des menaces contre les gens qui iront voter aux élections, des menaces de mort », a expliqué à l’AFP Qad Alam Miakhil, candidat aux élections provinciales dans la ville, visée par d’innombrables attaques rebelles ces six derniers mois.
Cette annonce survient au lendemain d’un spectaculaire attentat suicide revendiqué par les talibans devant le quartier général de la force de l’Otan, au coeur même du dispositif des troupes internationales à Kaboul.
L’attaque, qui a fait au moins 7 morts civils et 91 blessés, a prouvé que les rebelles pouvaient frapper n’importe où à cinq jours des élections.
La multiplication des violences ne fait que renforcer la crainte de voir ces scrutins décrédibilisés par une forte abstention.
L’annonce talibane de dimanche dément les annonces faites vendredi par le frère du président Hamid Karzaï, Ahmad Wali Karzaï, qui a affirmé que des chefs talibans du sud du pays avaient accepté de ne pas mener d’attaques menaçant la sécurité des Afghans lors des élections du 20 août.
Le président Karzaï, favoris du scrutin, et ses alliés occidentaux ont appelé plusieurs fois les talibans à engager des pourparlers de paix.
Mais ces derniers on toujours refusé, posant comme préalable le retrait des troupes étrangères du pays.