Afghanistan : Biden met la pression sur l’Europe

Afghanistan : Biden met la pression sur l’Europe

Le vice-président américain a demandé mardi aux alliés qui traînent des pieds «d’honorer leurs engagements».

Cinquante jours après l’investiture de Barack Obama, la pression monte sur l’Europe. Le vice-président américain Joseph Biden est venu mardi demander en personne l’aide des pays de l’Otan face à une situation «qui se détériore» en Afghanistan et dans la région. Officiellement, Joseph Biden a fait le déplacement de Bruxelles pour «consulter et écouter», une tonalité qui sonne agréablement aux oreilles européennes après les aigreurs de la présidence Bush. Avec les voyages du chef du Pentagone, Robert Gates, et de la secrétaire d’État, Hillary Clinton, la visite du vice-président témoigne d’un empressement qui culminera avec la venue de Barack Obama, les 3 et 4 avril au sommet de l’Alliance atlantique à Strasbourg-Kehl.

Cette succession, graduée, traduit aussi une insistance et une fermeté croissantes. «Je sais que les gens sont fatigués de cette guerre (…) mais aucun d’entre nous, je dis bien aucun d’entre nous, ne peut fuir sa responsabilité face aux menaces qui s’accumulent dans la région», a martelé Joseph Biden à l’issue de deux heures d’entretien avec les vingt-six ambassadeurs du Conseil de l’Atlantique Nord.

C’est là, aux confins de l’Afghanistan et du Pakistan, qu’ont germé les attaques du 11 septembre 2001 et presque tous les attentats qui ont suivi. «C’est là aussi qu’al-Qaida se régénère.» Washington a décidé l’envoi de 17 000 hommes supplémentaires, qui s’ajouteront aux 70 000 soldats étrangers déjà déployés en Afghanistan, dont 38 000 Américains. Face à cette montée en puissance, les Européens traînent des pieds, disant attendre que la Maison-Blanche honore d’abord sa promesse d’une «révision d’ensemble» de sa stratégie. C’est désormais une affaire de semaines, voire de jours. Joseph Biden a confirmé mardi que la nouvelle politique afghane serait connue à temps pour le sommet de l’Alliance.

«La guerre n’est pas perdue»

Rompant avec l’ère Bush, l’innovation devrait être une main tendue aux talibans les plus modérés, dans l’espoir de pacifier l’Afghanistan. «Cela vaut le coup d’être essayé», assure le vice-président américain en faisant sienne l’analyse selon laquelle 5 % seulement des rebelles afghans seraient de vrais irréductibles, les autres étant soit hésitants, soit motivés par l’argent. C’est l’ouverture politique que les alliés de Washington attendent depuis des années. «Il n’y a pas de solution purement militaire en Afghanistan», répétait Javier Solana, diplomate en chef de l’union, avant de recevoir mardi le vice-président à sa table. Plus qu’à un effort militaire, l’Europe veut contribuer à la renaissance de l’État de droit et de la société civile en Afghanistan.

À ses alliés de l’Otan, Joseph Biden s’est gardé mardi de soumettre des demandes précises. Les chiffres s’inscriront dans une «stratégie commune» qui reste à convenir et que Washington entend bien façonner dans le mois. «Une fois qu’on y sera parvenu, les États-Unis attendront de chacun qu’ils honorent leurs engagements», a prévenu le vice-président. L’apport européen, laisse-t-il entendre, pourrait faire la différence dans «une guerre que nous ne gagnons pas, mais qui est encore loin d’être perdue». Le candidat Obama avait suscité l’euphorie en Europe, sa présidence est loin de gommer les divergences. L’Afghanistan n’est qu’un exemple d’un rapide retour aux réalités de part et d’autre de l’Atlantique. Ces derniers jours, les critiques de la Maison-Blanche sur la faiblesse des politiques de relance économique, ou l’inexistence d’un plan de soutien aux pays financièrement fragilisés à l’Est ont été plutôt mal reçues en Europe. D’un abord plus conciliant, la nouvelle Administration américaine s’annonce exigeante dans l’exécution.