Le procureur de la République du pôle national de lutte contre la cybercriminalité près le tribunal de Dar El Beida a requis ce mercredi la peine maximale de 20 ans de prison ferme, assortie d’une amende de 10 millions de dinars, contre les spéculateurs sur la pomme de terre. Il s’est référé à l’article 13 de la loi sur la lutte contre la spéculation illégale.
L’affaire remonte au mois d’avril dernier. Dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux, deux agriculteurs incitaient directement et de manière agressive à la spéculation sur la pomme de terre, allant jusqu’à menacer quiconque tenterait de récolter et vendre le produit au prix courant du marché national.
Quatre accusés ont comparu pour la première fois devant la justice. Il s’agit des agriculteurs « Ch. Abdelkader » et « W. Gh. Laid », un courtier ainsi que l’auteur de la vidéo diffusée sur TikTok.
Les réquisitions du parquet interviennent après un interrogatoire minutieux des accusés détenus, poursuivis pour menaces et spéculation illégale. L’agent judiciaire du Trésor public s’est également constitué partie civile, présentant un mémoire écrit devant la même instance judiciaire pour réparation des préjudices subis.
Les arguments du principal accusé
Le procès a révélé de nouveaux détails à travers les aveux du principal accusé « Ch. Abdelkader ». Le jour des faits, il a fait appel à un correspondant de presse accrédité d’une chaîne de télévision privée pour diffuser officiellement une vidéo, lui proposant 10 000 dinars pour dénoncer le monopole du marché par les « intermédiaires ».
L’accusé a expliqué au juge que la vidéo visait les spéculateurs qui achètent la récolte de pommes de terre aux grossistes à un prix très bas, entre 45 et 50 dinars, pour la revendre ensuite aux citoyens à des prix multipliés atteignant 160 dinars. Cette pratique les a empêchés de vendre « une seule pomme de terre » sur le marché pendant plusieurs semaines.
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Se plaignant devant le juge, l’accusé a souligné que l’agriculteur travaille dur, de la plantation à l’irrigation jusqu’à la récolte, face à la hausse des coûts à sa charge, l’augmentation des prix des engrais et l’intervention des intermédiaires qui vendent la récolte à prix fort aux citoyens.
Cette situation l’a poussé à exploser de colère et diffuser une vidéo pour faire entendre la voix des agriculteurs aux autorités algériennes. Le juge lui a rappelé que s’il avait eu une bonne intention de dénoncer ces intermédiaires, il aurait dû s’adresser aux autorités compétentes et déposer une plainte légale, soit auprès des services de sécurité soit auprès du procureur de la République du tribunal de Mostaganem.
Le juge a souligné que ses actions constituent une incitation délibérée à créer une pénurie sur le marché national, visant à rendre l’État incapable de fournir la production nationale de pommes de terre aux citoyens. Le président de séance a précisé que l’agriculteur n’est pas obligé de traiter avec les intermédiaires, considérant cet argument comme exagéré et non justifié.
De son côté, le deuxième accusé « W.Gh.Laid » a reconnu avoir proféré des menaces dans la vidéo virale contre quiconque récolterait ou vendrait des pommes de terre au prix de 54 dinars. Dans ses déclarations, il a justifié que ses propos visaient uniquement les intermédiaires.
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Les versions contradictoires des autres accusés
Le troisième accusé, dénommé « Ch.Dj.Larbi », a pour sa part déclaré qu’il n’était qu’un simple entrepreneur dans une société. Il a affirmé qu’au moment des faits, il était en état d’ébriété avancée et qu’il avait rejoint par hasard un rassemblement d’agriculteurs. Il s’est dit très surpris de se retrouver impliqué dans cette affaire.
Quant au quatrième accusé, « Harith. B. D », il a reconnu avoir filmé les agriculteurs avec son téléphone portable et avoir diffusé la vidéo sur TikTok. Il affirme cependant ne pas être responsable des autres vidéos qui ont circulé, précisant n’avoir enregistré qu’une seule séquence. Il a tenté de rejeter la responsabilité sur d’autres personnes présentes qui auraient également filmé la scène.
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