Affaire du foncier de Sidi-Yahia,Un bien wakf clôturé en catimini

Affaire du foncier de Sidi-Yahia,Un bien wakf clôturé en catimini

Un terrain de plusieurs centaines de mètres carrés situé à Sidi-Yahia a été clôturé en catimini, vendredi après-midi. Cette parcelle, un bien wakf en litige depuis 2008, est l’objet de grandes convoitises.

La «chasse» au foncier reprend à Sidi-Yahia, quartier commercial situé à cheval entre les communes de Hydra et de Bir-Mourad-Raïs. Vendredi après-midi, une clôture métallique a été posée sur une parcelle de terrain située face au chantier du parking à étages. Il s’avère que ce terrain est au cœur d’un litige qui oppose, depuis 2008, un collectif de commerçants, le ministère des Affaires religieuses, la Wilaya d’Alger et l’APC de Bir-Mourad-Raïs. «La palissade a été installée en quelques heures seulement, juste après la prière du vendredi. Les personnes qui ont procédé à son installation ont vite disparu. Nous avons contacté la police et, le soir même, une patrouille est venue constater la situation. C’est incompréhensible et cela ne présage rien de bon», assurent Sadek Hadbi et Sofiane Laadjal, deux membres du collectif des commerçants de Sidi-Yahia. Qui sont ces personnes qui, en plein week-end, ont pris possession de ce terrain ? «Selon les premières informations, la clôture aurait été posée par des ouvriers du chantier du parking à étages. Nous avons contacté un des responsables de ce projet qui dit avoir en sa possession une autorisation signée par le président de l’APC de Bir-Mourad-Raïs et par la Direction des transports de la wilaya d’Alger», souligne Sadek Hadbi. Une déclaration que dément formellement Hamid Habik, le maire de Bir-Mourad-Raïs. «Je n’ai signé aucune autorisation, c’est totalement faux», a-t-il insisté, hier, au téléphone. Notons qu’il nous a été impossible de confirmer l’intervention de la Direction des transports de la wilaya d’Alger dans cette affaire. Mais la pose de cette clôture, quelle que soit sa raison, n’est qu’un nouvel épisode dans une affaire de conquête de foncier qui ne dit pas son nom. Le terrain en question avait été mis à la disposition, au début des années 1990, d’un groupe de 6 jeunes commerçants qui y ont érigé des locaux dans le cadre d’une coopérative. Les bénéficiaires payaient un droit de jouissance auprès de la commune de Bir-Mourad-Raïs. En 1997, le ministère des Affaires religieuses entreprend des démarches pour récupérer ce terrain du fait de son statut de bien habous. Les commerçants sont alors tenus de payer des redevances au niveau de ce département ministériel. Les deux parties entretiendront de bonnes relations durant plusieurs années. Mais la situation se détériore subitement en janvier 2008 lorsque, sous l’influence de la Direction des affaires religieuses d’Alger, l’APC décide de détruire les locaux sous prétexte qu’ils constituent «une source de pollution pour l’environnement».

Les commerçants saisissent une première fois la justice pour exiger la levée des scellés posés par les services de la commune. La situation prend une autre tournure avec l’implication du wali délégué de Bir-Mourad-Raïs de l’époque. Ce dernier adresse un télégramme au maire, Hamid Habik en l’occurrence, pour le sommer de détruire les locaux. Habik passe à l’action le 12 mai 2008. «La justice a été saisie immédiatement après cette opération de destruction. La chambre administrative puis le Conseil d’Etat ont remis en cause l’ensemble des décisions administratives prises par l’APC, la Wilaya déléguée et la Wilaya d’Alger. Mieux, la justice a ordonné notre réhabilitation avec, en sus, un dédommagement pour le préjudice subi», explique Sadek Hadbi. Le 5 mars dernier, la chambre administrative a désigné deux experts pour procéder à une évaluation financière. Le travail de ces experts n’ayant pas encore été entamé, l’affaire qui concerne ce terrain est donc toujours pendante au niveau de la justice. Nul ne peut donc en prendre possession.

«Nous savons que le terrain, que nous avons occupé légalement ces 20 dernières années, est convoité par certaines personnes. Pour l’heure, le droit est de notre côté puisque nous avons une série de jugements en notre faveur. Il est certain que nous défendrons nos droits jusqu’au bout», soulignent les deux représentants des commerçants de Sidi-Yahia. Rappelons que le quartier de Sidi-Yahia a été secoué en 2011 par des émeutes suite à la réalisation d’un parking à étages. Les habitants avaient dénoncé les conditions dans lesquelles ce projet avait été lancé.

T. H.