309 jours après leur enlèvement suite à un acte de piraterie en haute mer, en Somalie, les 25 marins de l’équipage du navire MV Blida dont 16 Algériens ont été libérés jeudi matin au grand soulagement de leurs familles, lesquelles ont toujours été rassurées par les autorités algériennes qui suivaient de très près l’affaire jusqu’à son dénouement heureux.
En effet, 10 mois après son détournement, l’équipage du navire MV Blida est enfin libre. Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, M. Amar Belani, a indiqué jeudi dernier, dans un communiqué, « c’est avec une grande joie et un profond soulagement que nous annonçons la libération, ce matin, des 25 marins de l’équipage du navire MV Blida, otages des pirates somaliens ». Toutes les dispositions ont été prises par l’Etat algérien pour procéder, dans les meilleures conditions possibles, au rapatriement des ressortissants algériens dont l’état de santé n’inspire pas d’inquiétude, a-t-il souligné. Selon les déclarations de M. Belani, le navire se trouve actuellement en haute mer.
« Il est sécurisé par les forces navales internationales opérant dans la région sous mandat des Nations unies », a-t-il précisé. Ajoutant que « le navire mettra environ 3 jours pour rejoindre le port de Mombasa au Kenya ». Par ailleurs, le porte-parole du MAE a indiqué que “l’Algérie, tout en se félicitant de cet heureux dénouement qui met un terme à une longue et éprouvante captivité, ne ménagera aucun effort pour que les auteurs de cet acte de piraterie soient poursuivis et jugés par les instances compétentes”.
En somme, la libération des marins algériens est le fruit d’intenses efforts du gouvernement algérien qui était resté pleinement mobilisé à cet effet. Les autorités avaient ainsi suivi de très près et avec une attention soutenue la situation jusqu’à l’aboutissement final qui est la libération des ressortissants algériens. Précisons que l’Algérie est le premier pays à avoir demandé, devant l’Assemblée générale des Nations unies, la criminalisation du paiement de rançons dans les actes de prise d’otages. Elle est ainsi restée attachée à son principe. Sachant que le paiement de rançons signifie clairement l’encouragement des criminels et le financement du terrorisme. En effet, les autorités algériennes avaient réaffirmé, à maintes reprises, leur ferme opposition à toute idée de paiement de rançons aux ravisseurs. C’est dans ce sens, plus précis, que le chef de la diplomatie algérienne, M. Mourad Medelci, avait appelé l’Afrique et la communauté internationale à se mobiliser pour mettre fin au terrorisme et à la piraterie qui déstabilisent la Somalie. Pendant les dix mois de captivité, il y a eu des moments de silence. Mais les autorités algériennes ont toujours opté pour la discrétion « qui doit être de rigueur dans pareilles circonstances », ne serait-ce que « pour préserver l’efficacité des efforts en cours en vue de libérer les otages », avait-on indiqué au MAE.
Ce dernier avait été amené aussi à démentir des informations infondées, comme celle relatives à la mort d’un des otages. En parallèle, le contact a été régulièrement maintenu pour aboutir à cette libération.
De son côté, M. Nacereddine Mansouri, le directeur général d’International Bulk Carriers (IBC), armateur du navire, avait constamment rassuré que « les contacts n’ont jamais été rompus et les négociations se poursuivaient toujours ». A noter qu’en date du 12 octobre dernier, deux otages, dont un Algérien et un Ukrainien, avaient été libérés pour des raisons de santé. Les deux marins ont été pris en charge par la force internationale qui réprime les actes de piraterie dans les eaux territoriales somaliennes.
Ce jour-là, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, avait annoncé que « les autorités algériennes restent pleinement mobilisées pour obtenir la libération de tous nos compatriotes dans les meilleurs délais possibles ». Pour rappel, le vraquier battant pavillon algérien, MV Blida, avait été victime le 1er janvier 2011 d’un acte de piraterie en haute mer, alors qu’il se dirigeait vers le port de Mombasa au Kenya. Comptant à son bord un équipage de 27 membres, dont 17 de nationalité algérienne.
Sihem Oubraham
Soulagement et joie indescriptible des familles “Merci à l’Etat algérien”
Les familles des marins algériens libérés jeudi matin ont fait part de leur « grand soulagement » et leur « joie indescriptible » après une attente éprouvante qui aura duré dix longs mois. Les familles des marins ont toutes été unanimes à affirmer qu’ »aujourd’hui (jeudi) c’est l’Aïd avant l’Aïd » (l’Aïd El Adha sera célébré dimanche prochain, NDLR). « C’est un jour béni et inoubliable pour nous », commente Mme Hannouche, femme d’un marin libéré.
« Ce matin, à 7h30, j’ai reçu un appel de mon mari. Je n’en croyais pas mes oreilles. On dirait un rêve quand j’ai entendu sa voix crier : “Nous avons été libérés, nous sommes désormais libres, tu peux pousser des youyous”, raconte-t-elle avec une voix nouée. « Il m’a encore rappelé à midi pour me rassurer en réaffirmant qu’ils ont été bel et bien libérés. Il m’a chargé de contacter les familles des autres marins pour leur confirmer cette bonne nouvelle », ajoute Mme Hannouche qui n’arrivait pas à retenir des larmes de joie. Mme Hannouche, qui habite à Tizi Ouzou, devait passer la fête de l’Aïd à Alger chez ses beaux-parents. Elle était en route vers la capitale quand son mari (55 ans) l’a appelée au téléphone. « J’ai alors décidé de fêter l’Aïd chez moi et d’attendre, avec mes enfants, mon époux », qui est ingénieur mécanicien. Je devais inventer des arguments pour expliquer à mon fils les raisons de l’absence de son père. Même sentiment de joie chez Mme Achour qui, dit-elle, a souffert avec ses deux enfants en bas âge (5 et 2 ans) de la « longue absence » de son mari. « Depuis l’enlèvement des marins, j’ai senti que les jours étaient interminables avec leur lot de souffrances.
C’était insupportable pour moi dans la mesure où mon mari se trouvait à des milliers de kilomètres et que je ne pouvais pas soulager sa souffrance », confie-t-elle avec émotion. Mais le « plus difficile » pour cette dame, c’est son fils de 5 ans qui n’a jamais cessé de réclamer son père, alors que la fille de deux ans ne s’est pas rendu compte de cette absence du fait de son bas âge, dit-elle. « Mon fils est rentré à l’école pour la première fois cette année. Le jour de la rentrée, il avait exigé la présence de son père.
Chaque jour je devais inventer des arguments pour lui expliquer les raisons de cette longue absence », ajoute Mme Achour. Mêmes souffrances chez la sœur du marin Kahli qui affirme qu’elle s’est sentie « renaître aujourd’hui ». Mme Kahli, dont le frère (60 ans) effectuait son dernier voyage avant de prendre sa retraite, s’est « félicitée » de la fin d’un « calvaire de 10 mois ».
Elle a tenu à adresser ses « remerciements » à l’Etat algérien qui a veillé à ce que les otages soient libérés sains et saufs », affirmant qu’elle est « fière » de l’Algérie qui « n’a jamais renoncé à ses enfants où qu’ils soient ». Cette « femme-courage » a également rendu un « vibrant hommage » au directeur général d’International Bulk Carriers (IBC), armateur du navire MV Blida, M. Nacereddine Mansouri pour son « soutien » aux familles des marins et surtout sa « patience ». Toudji, le premier à avoir retrouver la liberté, est soulagé par la libération de ses collègues. Le marin algérien, Azzedine Toudji, libéré le 12 octobre dernier en raison de son état de santé, a indiqué qu’il se sent à présent « libre à 100 % suite à la libération de ses collègues ». « A présent, je me sens soulagé car après ma libération, je me sentais isolé et j’ai refusé de recevoir famille et amis.
Je n’ai jamais cessé de penser à mes collègues car je m’inquiétais au fond de moi du sort qui allait leur être réservé », ajoute-t-il sur le ton de la confidence. « Mes enfants, surtout les plus jeunes (9 et 12 ans), avaient du mal à comprendre le profond chagrin que j’éprouvais envers mes collègues qui étaient encore en captivité. Maintenant, je peux dire que nous sommes tous libres, le soulagement est total », se réjouit-il. Evoquant les conditions de captivité, il se rappelle que les premiers jours étaient « choquants » et « insurmontables ». Par la suite, les marins s’étaient « adaptés », tout en gardant leur confiance dans les autorités algériennes. Les 25 marins de l’équipage du navire MV Blida, qui avait fait l’objet d’un acte de piraterie en haute mer en janvier dernier, ont été libérés jeudi matin. Selon le directeur général d’IBC, les marins algériens devraient être rapatriés la semaine prochaine.
IBC : « Aucune rançon n’a été payée aux pirates »
Aucune rançon n’a été payée aux pirates pour la libération des marins algériens, a affirmé jeudi dernier M. Nacereddine Mansouri, directeur général d’International Bulk Carriers (IBC), armateur du navire MV Blida.
« Il n’a jamais été question de payer une quelconque rançon pour la libération des otages. La position de l’Algérie à ce propos est ferme et sans équivoque et nous l’appliquons », a déclaré M. Mansouri. « Nous remercions les autorités algériennes, notamment le ministère des Affaires étrangères, qui n’ont ménagé aucun effort pour libérer les otages et se sont montrées constamment disponibles », a indiqué M. Mansouri.
Une nouvelle prouesse de notre diplomatie
n Le calvaire des otages algériens détenus par des pirates somaliens au large de l’océan Indien a finalement connu un dénouement heureux. Et c’est tant mieux pour les otages et leur famille dont on devine toute la détresse. Mais il convient, avant tout, de saluer une nouvelle prouesse de la diplomatie algérienne dont il serait peu de dire qu’elle a déjà inscrit ses lettres de noblesse depuis belle lurette. Il suffit, au besoin, de se rappeler du temps du regretté Mohamed Seddik Benyahia lorsque s’est posée non sans acuité, la problématique de la libération des otages américains, opération diligentée avec célérité et de main de maître par les autorités algériennes, au plus haut niveau donc. Et l’histoire étant un éternel recommencement voici que de nouveau la diplomatie algérienne se retrouve en appel pour une autre histoire d’otage dont sont victimes également des ressortissants algériens.
Une autre opportunité qui aura démontré si besoin est tout le savoir-faire et la diligence de la diplomatie algérienne qui a su et pu, loin de tout effet de manche, malgré toutes les pressions médiatiques qui plus est, marquer d’une autre pierre blanche cet événement inattendu qui a tenu en haleine, outre les propres familles des otages, l’ensemble de la société civile. Attentive comme de juste au sort de ses compatriotes et du fait aussi que par les temps qui courent tout peut arriver en haute mer, et notamment en ces coins et recoins où les pirates profitent d’une certaine impunité pour renflouer leurs caisses et se constituer un véritable butin de guerre par chantage interposé. Quoiqu’il en soit, tout est bien qui finit bien au grand soulagement des parents des victimes certes, au premier chef, mais également des autorités compétentes totalement impliquées dans cette affaire depuis le premier jour jusqu’au baisser de rideau. Enfin et omettre leur rôle dans cette affaire d’otage serait pour le moins inélégant, respect et considération à nos représentations diplomatiques de Nairobi, Addis-Abeba et Paris, pour avoir été, elles aussi, à la hauteur de la réputation fort établie de notre diplomatie.
A. Z.