Affaire des faux diplômes universitaires à Oran,Les dessous d’une grande tromperie

Affaire des faux diplômes universitaires à Oran,Les dessous d’une grande tromperie

Une affaire qui ternit l’image de l’Université d’Oran

Les résultats de la session du baccalauréat de 1992, qui ont été annulés en raison du scandale des fuites des sujets, n’a pas servi de leçon.

Rebondissement dans l’affaire des faux diplômes du baccalauréat: les avocats de la défense des trois mis en cause ont introduit avant-hier des requêtes à travers lesquelles ils ont demandé la levée du contrôle judiciaire prononcé contre leurs mandants. Les recours, qui ont été introduits auprès de la chambre d’accusation près la cour d’Oran, concernent une étudiante et deux employés de l’université. Aucune réponse n’est encore venue du parquet. L’affaire n’est pas aussi simple, puisqu’elle porte le sceau du «trafic d’influence et abus de pouvoir, faux et usage de faux» perpétrés, jusqu’à preuve du contraire, lors de leur jugement, par 48 personnes dont le doyen de la faculté de droit. Ce dernier a été placé, lui aussi, sous contrôle judiciaire. Cette affaire, dont l’enquête a été diligentée l’année dernière par les éléments de la brigade de recherche du groupement de la Gendarmerie nationale d’Oran, continue à alimenter les débats.

A la quête de nouveaux éléments

Les résultats de la session du baccalauréat de 1992, qui ont été annulés, en raison du scandale de fuites de sujets, n’a pas servi de leçon aux responsables de l’Education nationale, en particulier ceux d’Oran. Pour cause, une dizaine d’années après, un autre scandale, portant la griffe du faux Bac, vient secouer sérieusement la wilaya d’Oran. Fuites de sujets d’examens ou fausses attestations de réussite à l’examen du baccalauréat? Fausses notes ou achats de notes et de diplômes? C’est à ces deux questions auxquelles les enquêteurs ont tenté de répondre avant d’aboutir à des conclusions tout aussi graves. Des dizaines de personnes, exerçant dans deux secteurs devant refléter une image d’intégrité, se sont retrouvées au centre du scandale. Les recherches, ayant nécessité neuf mois d’investigations, ont concerné la faculté de droit de l’Université d’Oran. Dans le tas, les enquêteurs ont pu déceler 36 dossiers d’étudiants inscrits à la faculté de droit sous de faux documents d’inscription. Parmi ce groupe, 29 étudiants ont opté pour le droit et sept autres ont été inscrits en sciences politiques. Un deuxième «lot», constitué de 35 autres dossiers d’étudiants concerne la faculté des sciences économiques, commerciales et de gestion. Le scandale a été sérieusement pris en compte dans tous ses détails par les enquêteurs qui ont abouti à des révélations fracassantes: des faux étudiants seraient devenus médecins. D’autres auraient été recrutés par Sonatrach pendant que d’autres auraient bénéficié de bourses à l’étranger. Les enquêteurs ont signalé que le trafic de faux diplômes de réussite au baccalauréat a commencé durant les années 2003 – 2004. Des candidats repêchés grâce à des complicités difficiles à détecter, on y trouve des fils de hautes personnalités, ceux des hommes politiques et ceux des médecins et d’avocats, d’enseignants universitaires et autres notables. Le tout a été accompagné par la délivrance de fausses déclarations de réussite à l’examen du baccalauréat pour les pseudos et futurs faux cadres de la nation afin de leur permettre de poursuivre paisiblement leurs études supérieures. L’affaire des faux Bacs n’a pas encore livré tous ses secrets, elle devrait déboucher sur d’autres conclusions aussi stupéfiantes. Ainsi, les révélations de plusieurs témoins auraient permis aux enquêteurs d’aboutir à des conclusions tout aussi graves. «Pour les besoins de l’instruction, tous ces témoins seront mis à la disposition du juge d’instruction et cela, au fur et à mesure de l’évolution de l’instruction», a-t-on appris auprès des sources proches du dossier, ajoutant que «des convocations leur seront transmises en fonction des nouvelles révélations». En tout, 200 personnes ont été auditionnées par le magistrat instructeur et ce, dans le cadre d’une instruction qui a duré une journée entière. Les auditions se sont poursuivies jusqu’à une heure tardive de la nuit du même jour. La présentation des mis en cause dans l’affaire a abouti à la mise sous mandat de dépôt de trois personnes pendant que 48 autres ont été placées sous contrôle judiciaire. Dans cette mesure prononcée en attendant celles de la chambre d’accusation, de hauts responsables de l’Université d’Oran sont également concernés. Selon les premiers éléments de l’enquête recueillis par L’Expression, des dépassements graves ont été soulignés par les enquêteurs dans leur rapport. Il s’agirait du laisser-aller et la passivité caractérisée du rectorat de l’université, très précisément au niveau du vice-rectorat. Sinon, pourquoi cette instance n’a pas jugé utile de mettre fin, sinon tout au moins, signaler la multiplication des dépassements aux services de sécurité. Le moins que l’on puisse dire est que cette scabreuse affaire a souillé davantage l’image de l’Université et celle de l’Education nationale».

Des étudiants consternés

«À Oran, le risque de se faire soigner par un faux médecin ou assisté d’un avocat Taïwan n’est pas à écarter, au vu du nombre impressionnant de ces faussaires ayant rejoint le monde du travail. «Ils ont agi de la sorte dans le but de défiler chaque matin et chaque soir avec leurs voitures et copines aux portails de l’université», déplore un jeune étudiant. Pis encore, a-t-il ajouté «ce sont ces pseudo-étudiants qui raflaient les meilleures notes chaque semestre pendant que nous, enfants du peuple, en pâtissions avec nos professeurs pour le bouclage de l’année». «Je ne vous parlerais pas des sempiternels harcèlements sexuels perpétrés par des professeurs et enseignants contre des dizaines d’étudiantes issues de familles modestes. Faut-il ouvrir des enquêtes là encore?» a-t-il regretté.

Des dizaines de prétendants à la fac n’ont donc pas pu obtenir le visa d’avenir. «C’est à coup de millions et autres somptueux cadeaux de luxe qu’ils ont conquis les fameuses attestations de réussite alors qu’en réalité, ces documents ont été falsifiés», a indiqué une source qui a requis l’anonymat, ajoutant qu’«ils ont été aidés dans cette besogne par des cadres de la direction de l’éducation de la wilaya d’Oran. Affaire à suivre…