Les ex-cadres de la CNAN impliqués dans l’affaire du naufrage du Béchar sont libres depuis hier. Le verdict a été rendu par le tribunal criminel d’Alger, aux termes d’un procès en appel riche en rebondissements.
Le tribunal criminel d’Alger a prononcé l’acquittement, hier, au bénéfice des six anciens cadres de la CNAN poursuivis dans le naufrage du navire Béchar en 2004.
«Justice a été rendue après six longues années de batailles juridiques et judiciaires. Elle est sortie vainqueur aujourd’hui. Le jugement prononcé démontre que le secteur compte des hommes et des femmes compétents qui ne se soumettent qu’à leurs convictions personnelles. La composition du tribunal criminel a honoré l’Algérie et non pas uniquement la justice.
On est vraiment fiers du verdict, les magistrats et jurés ont compris, dès l’ouverture du procès, qui a duré cinq jours, que les accusés n’étaient nullement responsables du naufrage du navire Béchar, car ils ont conclu que les mis en cause n’avaient pas la qualité d’armateur dans cette affaire», a déclaré Maître Chérif Chorfi aux journalistes peu après la prononciation du verdict, au seuil de la salle 5 de la cour d’Alger où s’est déroulé le procès.
La joie se lisait sur les visages des parents et proches des acquittés au moment du verdict prononcé par le président du tribunal criminel d’Alger, M. Adelmalek Boubattra, épaulé par Melle Maïza M’barka et M. Manseur Ouchene et de deux jurés dont l’un n’a pas cessé, tout au long des débats, de prendre note. Des cris et des youyous fusaient de partout de la salle. Cette ambiance s’est poursuivie dans le hall de la cour d’Alger où les familles se félicitaient.
Quant aux familles des victimes, elles se sont regroupées dans un coin isolé de la cour et versaient de chaudes larmes. Certains ont piqué des crises de nerfs et clamé haut et fort : «Les victimes ont été encore une fois tuées. Elles devaient être rétablies même si elles sont mortes. Les familles des personnes acquittées devaient nous respecter car il y a mort d’homme.»
En effet, le 5e et dernier jour du procès des ex-cadres de la CNAN a été consacré aux répliques des parties civiles et à celles du procureur général aux plaidoiries jugées parfois «provocatrices».
Le représentant du ministère public, à savoir M. Farak Mohamed, a tenu à préciser aux avocats qu’il n’a fait que son devoir en qualité de représentant du parquet général près la cour d’Alger : «Certains avocats se sont acharnés sur moi pour la simple raison que j’ai dressé un dur réquisitoire à l’encontre des accusés. Je n’ai rien inventé, j’ai formulé des demandes conformément au dossier que j’ai en main.»
Et d’ajouter à la direction du président : «Je suis là pour défendre l’intérêt des parties civiles. L’ombre des victimes plane aujourd’hui dans la salle d’audiences.
Les peines requises à l’encontre des accusés sont bel et bien stipulées dans les lois de la République, plus précisément dans le code maritime.» Invités à prendre la parole pour la dernière fois, les accusés, à l’instar de l’ex-président directeur général, en l’occurrence Ali Koudil, Ammour Mohand Ouramdane, Zaoui Salah, Ikhaladène Kamel et Debbah Mustapha ont clamé haut et fort leur innocence, affirmant que les responsabilités pénale et criminelle dans le naufrage du navire Béchar ne leur incombe pas.
Ils ont tenu à préciser que le naufrage du bateau est dû à une catastrophe naturelle. Kamel Ikhalèdene, ex-directeur technique au niveau de la Cnan et qui gérait le navire Béchar, a déclaré qu’il n’oubliera jamais cette journée fatidique : «J’entretenais de très bonnes relations avec les victimes. Elles jouissaient d’une très bonne réputation. Les défunts ont sacrifié leur vie.»
A signaler enfin que les avocats de la partie civile ont dénoncé les mesures entreprises à l’encontre des parents et proches des victimes au lendemain de la tenue de leur premier jugement.
Ces derniers ont été purement et simplement révoqués, car ils ont refusé de se désister de la poursuite judiciaire, que ce soit lors de l’enquête préliminaire ou l’instruction judiciaire, selon les avocats des parties civiles lors des plaidoiries consacrées aux réparations matérielles aux préjudices causés aux ayants droit.
A noter que le tribunal a jugé que toutes les accusations portées contre les accusés sont infondées, comme le démontrent les réponses rendues aux 96 questions posées lors des délibérations.
Redouane Hannachi