Adapter l’économie algérienne aux stratégies énergétiques mondiales

Adapter l’économie algérienne aux stratégies énergétiques mondiales

Le cours du Brent  avait été coté à plus de 105 dollars il y a de cela près d’une année. Il vient de clôturer le 21 décembre 2015 à 36,40, et le WIT à 35,80 avec un cours euro/dollar de 1,0921.

Aujourd’hui, il s’agit d’analyser objectivement les tendances futures  des stratégies énergétiques mondiales  et d’adapter l’économie algérienne à ces nouvelles situations, si l’on  veut éviter les effets pervers des impacts de la crise de 1986

A- C’est connu : l’économie algérienne est caractérisée par la dominance  des hydrocarbures qui irriguent toute la société algérienne : environ 98% des exportations proviennent des hydrocarbures  y compris les dérivées d’hydrocarbures (plus de 60/70% des exportations hors hydrocarbures) et important 70% des besoins des ménages et des entreprises publiques et privées dont le  taux d’intégration ne dépasse pas 15%. Contrairement aux discours déconnectés de la réalité, sous le couvert chauviniste de donneurs de leçons du  nationalisme, mais en réalité  protégeant des intérêts de rente, du fait que l’Algérie supporte tous les  surcoûts,  la règle des 49/51% dont il convient de ne l’appliquer qu’aux   secteurs stratégiques à définir, et non la généraliser aux PMI/PME, avec l’instabilité du cadre juridique et le manque de visibilité et de vision stratégique  dans la politique économique  a accentué la méfiance des investisseurs tant locaux  qu’ étrangers qui s’orientent vers les  activités lucratives à court terme. En cas d’une baisse durable du cours du pétrole, le prix de cession du gaz lui étant indexé, cela aura plusieurs incidences du fait  de l’incompressibilité de certaines dépenses, en raison  du dépérissement du tissu productif : environ  83% de la superficie économique globale est  constituée de petits services/ commerces, le secteur industriel pesant moins de 5% du PIB et sur les 5%, plus de  95% sont des entreprises familiales peu initiées au management stratégique demandant  toujours  des soutiens à l’Etat. Il ya risque d’assister à trois effet négatifs avec des incidences sociales, voire politiques en cas  d’immobilisme, mais pouvant  dépasser  cette situation que par  de profondes réformes structurelles qui déplaceront d’importants segments de pouvoir d’où des résistances des tenants de la rente  :

1- Un ralentissement de la dépense publique qui tire la croissance à plus de 80% donc sur le   taux de croissance  et le taux d’emplois  (entendu emplois productifs) ;

2- Sur le fonds de régulation des recettes du fait de l’importance du déficit budgétaire qui risque de s’puiser courant 2017 ;  

3- Sur le niveau des réserves de change  avec un impact sur la valeur de la monnaie corrélé à plus de 70%, autant que l’emploi, à la rente des hydrocarbures, comme en témoigne  le cours du dinar algérien qui  continue  sa chute amorcée depuis juin 2014 (75 dinars un dollar)  étant coté le 21 décembre 2015 à 117,0647 dinars un euro  et 107,1750  dinars un dollar. Le gouvernement algérien devrait éviter l’illusion monétaire car la valeur du  dinar algérien  est passée de 5 dinars un dollar vers les années 1975, puis 45 dollars après l’accord avec le FMI  en 1994 et actuellement plus de 107 dinars un dollar et cela n’a pas permis de dynamiser les exportations hors hydrocarbures. Cela montre  que le blocage est d’ordre systémique, que les recettes économiques pour un pays développé produisent des effets pervers dans une économie non structurée, rentière,  sous développée ou en voie de développement.  Le capital argent n’est qu’un moyen et se pose cette question stratégique :  quelle est la part du chiffre d’affaire  que consacrent les entreprises publiques et privées  algériennes à la recherche développement et à la formation permanente ?

B– Quelles sont les tendances futures  sur le plan énergétique ? Force est de constater  que  les perspectives énergétiques  mondiales ne vont pas à l’optimisme. Je recense huit  contraintes pour les pays qui ont vécu de l’illusion de la  rente éternelle  des hydrocarbures, sans diversifier leur économie, ayant ignoré les fondamentaux du développement du XXIème siècle  à savoir l’adaptation à la  mondialisation, la  bonne gouvernance et l’économie de la connaissance.

Première contrainte,  le retour de l’Iran sur le marché mondial dès le 01 janvier 2016 ayant les capacités  d’exporter à court terme plus d’un millions de barils jour supplémentaire , sans compter qu’il est le deuxième réservoir de gaz traditionnel au niveau mondial, après la Russie , suivi du Qatar  et   d’environ 3 millions de barils supplémentaire d’exportation  à moyen terme horizon 2018 ayant un besoin de financement pour reconstruire son économie.

Deuxième contrainte,  le 20 décembre 2015   tous les membres du conseil de sécurité y compris  la Chine et la Russie qui par le passé opposait leur veto, ont voté à l’unanimité   avec l’accord implicite de l’Iran et de l’Arabie saoudite, une résolution pour  mettre  fin au conflit en Syrie qui date depuis plus de quatre années. Cela aura un impact  ce qui aura un  impact  sur toute la carte énergétique  de la région .Une éventuelle stabilisation de cette région pousserai l’Irak dont les couts de production sont inférieurs d’environ 20%  par rapport à ses concurrents, à accroître rapidement ses capacités d’exportation de deux à trois millions de barils jour  et par ricochet la stabilisation en Libye qui pousserait ce pays à exporter plus de deux millions de barils par jour.

Troisième contrainte, la  dernière réunion  de l’OPEP qui représente moins de 33% de la production commercialisée mondiale , 67% se faisant hors OPEP, au lieu de réduire ses quotas de deux millions de barils jour  comme demandé par l’Algérie et le Venezuela a décidé pour tenir compte  de l’accroissement de la production de l’Iran et de l’Indonésie  de porter le quota à 31,5 millions de barils jour.

Quatrième contrainte, les USA pour  la première fois  depuis 40 ans, le Congrès US vient  le 18 novembre 2015 sous la pression des producteurs de  pétrole et gaz de schiste , avec un compromis pour le développement des énergies renouvelables ,  d’autoriser les exportations en dehors des USA notamment en direction de l’Europe ,production actuelle dépassant les 9,5 millions de barils jour malgré la fermeture des gisements marginaux ,  qui seront donc un concurrent sérieux tant pour la Russie que l’Algérie ( la balance commerciale US/Algérie étant passée de plus de 11 milliards de dollars s en 2009 à 5 milliards de dollars en 2014) d’autant  plus que les opérateurs maîtrisent le savoir faire et les circuits de commercialisation .

Cinquième contrainte  ,la Russie vient  pour première  fois de franchir  les 11 millions de barils jour , ayant des besoins de financement à travers  la stratégie offensive  de Gazprom   sans compter qu’elle  détient le premier  réservoir de gaz traditionnel au niveau mondial , comblant le déficit des prix  par l’accroissement de la quantité.

Sixième contrainte, le Mozambique deviendra le troisième producteur  au niveau Afrique  dès 2016, sans  compter  s’’il y a stabilisation au Moyen Orient  l’exploitation des 20.000 milliards de mètres cubes gazeux en méditerranée  orientale.

Septième contrainte, bien que nous assistons à  une légère reprise   aux USA expliquant le prochain relèvement du taux de la FED qui a un impact sur le cours du dollar à la hausse, donc  avec des incidences à la baisse le cours du pétiole, la zone euro est en berne  et  les pays émergents qui tiraient la  croissance de l’économe mondiale dont la Chine, l’Inde , l’Argentine , le Brésil connaissent  un ralentissement de leur économie.

Huitième  contrainte,  les orientations prises à la COP21,  et pour la première fois une prise de conscience planétaire  des impacts du  réchauffement climatique encore qu’il faille attendre les décisions concrètes, qui espèrent mettre en place  un nouveau modèle de consommation énergétique au niveau mondial  reposant sur un Mix énergétique encourageant notamment les énergies renouvelables. Ces derniers verront  un investissement annuel horizon 2020 d’environ 600 milliards de dollars contre 300 en 2014.En étant conscient que l’énergie est au cœur de la sécurité des Etats , sous l’hypothèse  d’une  baisse  des  subventions pour les  énergies fossiles  estimées  par  le FMI à environ 5200 milliards de dollars et d’une réorientation de l’actuelle politique économique et énergétique  au niveau mondial,  cela   devraient ralentir la demande  et donc les prix du pétrole horizon 2030/2040. Et peut être faisons confiance au génie humain une autre source d’énergie reposant sur l’hydrogène.

C- En résumé l’Algérie ne devrait plus vivre de l’illusion de la rente, certains responsables devant éviter  de vendre des chimères et  l’activisme sans résultats palpables,  de continuer à dépenser sans  compter, d’avoir un discours de vérité, tant loin de la sinistrose  que  des discours démagogiques qui ne portent plus afin de mobiliser la population car les ajustements futurs seront douloureux. L’Algérie en a les capacités. Elle doit utiliser à bon escient les réserves de change actuelles pour dynamiser les segments productifs y compris les  services,  ( l’ère matérielle étant dépassée) qui doivent s’appuyer   parallèlement sur l’économie de la connaissance  afin de réaliser le transfert technologique et managérial afin d’être  compétitifs dans le cadre des valeurs internationales. Ces actions dépassent largement le cadre strictement économique et renvoie fondamentalement  au renouveau de la gouvernance  et par là,  à la refondation de l’Etat dont les fonctions sont largement influencées par les nouvelles mutations mondiales.