Accords de 1968 : Paris recule pour « ne pas compromettre la libération de Sansal »

Accords de 1968 : Paris recule pour « ne pas compromettre la libération de Sansal »
Accords de 1968 France – Algérie

À quelques heures d’un vote historique à l’Assemblée nationale, susceptible de raviver les tensions entre Paris et Alger, une volte-face a permis d’éviter une nouvelle escalade diplomatique. Le groupe mené par Éric Ciotti a retiré in extremis sa proposition de résolution visant à dénoncer les accords de 1968 entre la France et l’Algérie.

Une décision surprise, aux résonances diplomatiques fortes. Alors que le verdict du procès en appel de Boualem Sansal a été une nouvelle fois reporté, cette fois au 1ᵉʳ juillet.

Prévu pour être examiné ce jeudi dans le cadre de la niche parlementaire de l’Union des droites pour la République (UDR), le texte avait de grandes chances d’être adopté.

Soutenu par le Rassemblement national, les Républicains et une partie du groupe Horizons, il aurait pu marquer un tournant symbolique majeur dans les relations entre Paris et Alger. Mais Éric Ciotti a finalement opté pour une marche arrière inattendue. Invoquant la nécessité de préserver les chances de libération de l’écrivain.

Résolution retirée contre les accords franco-algériens : un calcul diplomatique face à la situation de Boualem Sansal

Tout indiquait une mobilisation en ordre de bataille du camp Ciotti. Dans les rangs de la droite, les calculs parlementaires faisaient miroiter une majorité suffisante pour faire passer la résolution. Hanane Mansouri, députée UDR, se montrait même confiante à la veille du scrutin : « On a fait nos calculs et on a une grande chance de remporter une victoire ».

Mais à l’ouverture de la session, changement de cap ! Éric Ciotti annonce le retrait du texte. Il invoque un impératif humanitaire et politique : « L’objectif pour nous est la libération de Boualem Sansal. Une grande voix de paix, un grand écrivain ». Arrêté en automne 2024 à l’aéroport d’Alger, Boualem Sansal encourt une peine de dix ans de prison. Le verdict est attendu le 1er juillet. En pleine tension diplomatique, la droite a donc préféré retarder la confrontation.

🟢 À LIRE AUSSI : Procès en appel de Boualem Sansal : ce que l’écrivain a réellement dit à la juge

Rappelons qu’en décembre dernier déjà, une tentative similaire avait échoué de peu à l’Assemblée. Cette fois-ci, l’issue semblait favorable à l’alliance UDR-RN-LR. Mais les considérations géopolitiques ont freiné cette offensive.

Macron et la prérogative présidentielle en matière de diplomatie

La décision de Ciotti n’a pas seulement désamorcé une potentielle crise avec Alger. Elle a également évité un affront direct avec l’Élysée. Emmanuel Macron, attaché à sa prérogative présidentielle sur la diplomatie, avait déjà exprimé son irritation face à l’agitation parlementaire sur ce sujet.

« Je n’avais pas compris que la politique étrangère de la France était définie au Parlement », avait-il lancé avec ironie lors d’un Conseil des ministres en décembre, après un premier vote critique sur les accords.

Si la proposition de résolution n’avait pas force de loi, son adoption aurait envoyé un signal politique fort. De quoi mettre le président dans une position délicate, à l’heure où les relations entre Paris et Alger traversent une nouvelle zone de turbulence.

Une parenthèse refermée… jusqu’à l’automne prochain

Pour le gouvernement français, cette reculade représente un soulagement. Laurent Saint-Martin, ministre délégué au Commerce extérieur, a salué « l’esprit de responsabilité » du groupe UDR. Évitant toute « escalade verbale » susceptible de nuire aux efforts diplomatiques en faveur de Boualem Sansal.

🟢 À LIRE AUSSI : Consulat d’Algérie à Bobigny : l’enfer à ciel ouvert

Ce retrait ne signe toutefois pas la fin du projet. Éric Ciotti a déjà indiqué que la proposition pourrait être réintroduite à l’automne. À l’occasion de la niche parlementaire réservée au Rassemblement national.

Derrière cet épisode parlementaire, une vérité s’impose. Les accords migratoires de 1968 demeurent un sujet inflammable au cœur de la relation franco-algérienne.