Cet accord vient démontrer encore une fois que les chances d’une solution politique existent pour la résolution de ce conflit
Brusque accélération des événements, depuis ces trois derniers jours, dans la crise qui sévit au nord du Mali.
Trois grands événements sont venus secouer une situation qui allait s’enliser dans les méandres d’une crise multidimensionnelle: le vote, jeudi dernier, par le Conseil de sécurité d’une résolution autorisant le déploiement de la Mission internationale de soutien au Mali sous conduite africaine (Misma).
La visite du président français François Hollande à Alger et enfin la signature, avant-hier, toujours à Alger, d’une déclaration de partenariat entre le Mouvement national de libération de l’Azawad (Mnla) et le groupe armé Ansar Eddine. Ces événements sont interdépendants l’un de l’autre. Commençons par la signature de la déclaration de partenariat entre le Mnla et Ansar Eddine. Cet accord vient démontrer encore une fois que les chances d’une solution politique existent pour la résolution de ce conflit. Une cause largement défendue et portée à bras-le-corps par l’Algérie. Les deux parties ont réitéré leur engagement au dialogue avec les autorités du Mali pour un règlement pacifique, durable et définitif du conflit. Cela, note la déclaration, «dans le cadre des principes islamiques en harmonie avec les valeurs authentiques du peuple de l’Azawad et dans le respect de toutes les libertés fondamentales sans distinction de race ou d’appartenance ethnique ainsi que des règles universelles pertinentes des droits de l’homme».

Scellés en sept points, les termes de cette déclaration constituent une réelle décantation de la situation dans cette région qui subit un parasitage sécuritaire et un brouillage politique par ailleurs très intentionné. Le premier point stipule qu’il faut s’abstenir de toute action susceptible d’engendrer des situations de confrontation et toute forme d’hostilité dans les zones qui sont sous leur contrôle et tout mettre en oeuvre pour y faire respecter cet engagement. Le second engage les deux parties à sécuriser les zones sous leur autorité à travers la mise en place de forces de sécurité composées des éléments de leurs groupes respectifs. Le troisième mentionne qu’il faut oeuvrer de manière à permettre la libération de toute personne se trouvant en état de captivité. Un quatrième point incite à la collaboration pour assurer une assistance humanitaire d’urgence. Le cinquième point vise à faciliter la circulation des personnes et des biens et la relance des activités politiques, sociales, éducatives, économiques et administratives.
La diplomatie algérienne a convaincu
Un appel lancé aux Maliens pour joindre leurs efforts à ceux des deux parties pour effacer toute déviance et défaillance de gouvernance constitue le sixième point. Enfin, le septième et dernier point consiste à conjuguer et coordonner leurs positions et actions dans le cadre de toute démarche visant la recherche d’une solution pacifique et durable. C’est une véritable plate-forme de sortie de crise et à travers laquelle les deux organisations se démarquent de manière claire et officielle de l’activité terroriste.
Reste maintenant aux parties réticentes de la communauté internationale, dont la France, de se convaincre du caractère nationaliste et du droit légitime de ces deux organisations de s’exprimer et de participer au dialogue qui engage l’avenir du Mali. Le second événement a été l’autorisation du Conseil de sécurité, jeudi dernier, du déploiement de la Mission internationale de soutien au Mali sous conduite africaine (Misma). Cependant, cette autorisation fixe les conditions, qui dépendent des résultats du dialogue politique, des élections et de la formation des troupes militaires africaines.
La résolution 2085 (2012), adoptée à l’unanimité de ses 15 membres, s’articule autour de deux points fondamentaux: le processus politique et le dispositif de sécurité (formation des forces maliennes, déploiement de la Misma sous conduite africaine, appui international, droits de l’homme, financement). Accordant une place importante au processus politique, le Conseil de sécurité a exhorté les autorités maliennes à établir, en tenant un dialogue politique large et ouvert, une feuille de route pour la transition, et à rétablir pleinement l’ordre constitutionnel et l’unité nationale, en tenant dans des conditions pacifiques, des élections présidentielle et législatives crédibles et sans exclusive d’ici à avril 2013.
Aussi, la résolution a exigé que les groupes rebelles maliens rompent tout lien avec des organisations terroristes, en particulier avec Al Qaîda au Maghreb islamique (Aqmi) et le Mouvement unicité et jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao). «Nous apprécions de manière positive et nous nous reconnaissons dans cette résolution qui a été adoptée à l’unanimité par les membres du Conseil de sécurité et surtout par le fait qu’ elle donne une place prépondérante aux négociations politiques», a réagi une source diplomatique algérienne crédible.
Le bruit des bottes s’est atténué
En effet, la résolution accorde une large part au dialogue politique, une option défendue ardemment par l’Algérie. «Ce qui nous réconforte également est que cette résolution met au centre du leadership l’armée malienne», ajoute notre source, précisant également que désormais les cibles sont identifiées.
«Il s’agit d’Aqmi et du Mujao maintenant que le Mnla et Ansar Eddine se sont démarqués de ces organisations narcoterroristes». Il faut dire qu’à ce niveau, c’est une victoire pour la diplomatie algérienne qui s’est démenée pour convaincre la communauté internationale de faire la part des choses dans ce bourbier sahélien. Une action pacifique, avec au bout un rétablissement de l’ordre institutionnel par l’organisation d’une élection présidentielle et des législatives d’ici mai 2013. De même qu’une feuille de route pour un dialogue politique entre tous les Maliens, c’est au bout de toute ces actions que peut intervenir une éventuelle action militaire…
«L’éventuel redéploiement des forces militaires n’est pas pour demain, puisqu’il n’y a aucun calendrier pour cela», souligne notre source. Cela d’une part, d’autre part, l’offensive ne sera déclenchée que si les rapports d’étape que doit faire la Cédéao chaque deux mois et adresser au Conseil de sécurité de l’ONU s’avèrent satisfaisants. On est donc très loin du schéma brutal libyen ou celui mené par la France en Côte d’Ivoire.
Le bruit des bottes s’est donc atténué laissant la chance, toute la chance à la solution politique. Enfin, le troisième événement a été la visite de deux jours de François Hollande à Alger. On ne peut pas dissocier cette visite de ces événements du Sahel. Le président français a relevé, lors de sa conférence de presse, mercredi dernier, à Alger, la convergence de positions de l’Algérie et de la France en précisant qu’il est favorable à une solution politique par le dialogue avec les rebelles touareg qui ont rompu tout lien avec les terroristes. C’est en substance le contenu de la déclaration de partenariat entre le Mnla et Ansar Eddine ainsi que la dernière résolution du Conseil de sécurité. Du reste, la France a largement modéré sa position de va-t-en guerre. «Le temps de l’intervention militaire au Mali n’approche pas», a nuancé M.Hollande qui s’exprimait vendredi dernier, sur la chaîne de radio Europe 1. «Déjà que la France et l’Union européenne ont perdu l’initiative en Syrie au profit de la Russie et des Etats-Unis, ajouté à cela une forte pression et un déclin dans les sondages de M.Hollande. Ce dernier a fait de la question malienne une affaire interne. Il ne voulait pas terminer l’année sur un échec. Il voulait arracher cette résolution, il l’a eu, mais sans plus», explique notre source.