Comme beaucoup de ses compagnons qui ont été aux avant-postes au front de guerre, l’histoire officielle ne dit pas grand-chose sur cet historique.
Depuis l’annonce de son décès, Hocine Ait Ahmed, sa vie, son parcours et ses idées sont scrupuleusement passés au crible par les générations. Pour savoir ce que connaissent les moins de 20 ans sur ce grand homme, nous nous sommes joints à leurs discussions et nous leur avons même posé des questions.
En fait, sa grandeur fait l’unanimité parmi cette catégorie de jeunes nés en majorité après l’an 2000. «Je ne le connais pas. J’ai toujours entendu mon père parler de lui. Tout ce que je sais de lui, je l’ai appris depuis le jour de sa mort», affirme Samir, un jeune de Boudjima.
Beaucoup de jeunes affirmaient connaître son parcours mais s’étonnent de ne pas retrouver de traces d’Ait Ahmed dans les manuels scolaires. Comme beaucoup de ses compagnons qui ont été aux avant-postes au front de guerre, l’histoire officielle ne dit pas grand-chose. «Je ne connais de Hocine Ait Ahmed que ce qu’on m’a appris à l’école. Deux ou trois phrases seulement» regrette Karim, élève au lycée polyvalent de la ville de Tizi Ouzou qui accompagnait son père au siège du FFS de Tizi Ouzou par ces journées de vacances scolaires.
En effet, les jeunes de moins de 20 ans ont soulevé un point très important, à savoir le manque de données sur l’homme dans les manuels scolaires algériens. Mais, en fait, bien qu’ils se posent la question, ils ne sont pas pour autant dupes.
«Je sais que les gens au pouvoir ne voulaient pas que les jeunes générations le connaissent. On se serait posé beaucoup de questions dérangeantes», ironise son camarade.
«Moi, je ne connais de lui que ce qui se dit dans les discussions politiques dans mon village. D’ailleurs, je ne savais pas qu’il était aussi important. Je le voyais comme tous les autres politiciens. C’est depuis le jour de sa mort que j’ai appris que Dda l’Hocine était un grand homme», reconnaît naïvement un autre jeune.
Les avis se suivent et le constat s’affirme de plus en plus. Hocine Aït Ahmed a été sciemment effacé des manuels scolaires. Les jeunes générations ne connaissent de lui que ce qui se dit dans la rue par les personnes intéressées par la politique. Et, quelle politique! «Mon Dieu, je ne savais pas ça. Tout ce que je sais, c’est qu’il a demandé l’intervention de sant’Egidio. Ça on me le dit à chaque fois qu’il y a des élections dans mon village», raconte un autre jeune dont la discussion révèle les dégâts qu’a occasionnés la campagne de dénigrement que Dda l’Hocine a subi de certains politiciens et médias.
«Moi, j’ai toujours débattu de lui avec mon père à la maison. A l’extérieur, mes amis disent du mal de lui alors que mon père à la maison disait le contraire. Même dans notre village, les gens qui font de la politique ne l’aiment pas et disent beaucoup de mal de lui. Quand je raconte à mon père ce qui se dit, il me répond que ceux qui disent du mal de lui ne le connaissent pas et qu’ils se font avoir par des politiciens qui ne lui arrivent pas à la cheville. Cela dit, même mon père ne m’a pas parlé de sa vie avant 1989», raconte un autre jeune d’un village d’Aghribs.
Des discussions qui révèlent la volonté d’effacer l’ombre de ce grand révolutionnaire qui a dédié toute sa vie à l’Algérie. Son exclusion des manuels scolaires a en effet favorisé le travail de dénigrement mené par ses détracteurs depuis l’indépendance et surtout depuis l’ouverture démocratique de 1988.
Enfin, la vie de Hocine Ait Ahmed rappelle un proverbe kabyle qui dit qu’«on ne peut briser une pierre avec un lopin de terre».