Le lancement de la chaîne de télévision privée Khalifa TV avait été motivé par le souci de « soigner l’image de marque de l’Algérie à l’étranger », a affirmé mercredi devant le tribunal criminel de Blida, Abdelmoumene Khelifa, principal accusé dans l’affaire Khalifa Bank.
Abdelmoumene Khelifa a soutenu que la création de la chaîne de télévision qui portait son nom était motivée « par le souci de donner une bonne image de l’Algérie à l’étranger, au moment où les échos qui parvenaient du pays étaient faits uniquement de feu et de sang pendant la décennie 1990″.
En plus de son premier investissement dans le secteur bancaire, l’ex-milliardaire a été auditionné au troisième jour du procès par le juge Antar Menouar sur ses autres acquisitions ainsi que les sociétés créées dans le cadre de ce qui est devenu le groupe Khalifa .
« J’ai voulu prouver aux étrangers que les Algériens pouvaient créer une chaîne de télévision sur leur propre sol, en plus de vouloir offrir un autre son de cloche que celui véhiculé par la télévision publique qui ne dit pas toute la vérité », a-t-il ajouté à ce sujet.
« Pourquoi courir plusieurs lièvres à la fois », s’est interrogé le président du tribunal criminel de Blida, abordant la création de la compagnie aérienne Khalifa Airways, à peine six mois après Khalifa Bank.
« La banque sert à transférer de l’argent, une compagnie aérienne sert à transporter des personnes », s’est contenté de répondre l’accusé, ajoutant que le capital de Khalifa Airways était fixé à 150 millions DA et qu’il avait hypothéqué son entreprise de pharmacie basée en France comme garantie auprès d’Airbus.
Quant à savoir si la compagnie aérienne était créée sur les propres fonds de Khalifa Bank, leur ex-propriétaire a assuré que la première était une cliente auprès de ladite banque, au même titre qu’elle était auprès d’autres banques. « Pourtant plus de 70% des placements de la compagnie aérienne se faisaient auprès de votre banque », a rebondi alors le juge.
Un excédent de 7 millions d’euros dégagé par Khalifa Airways
« L’expertise française a démontré un excédent de 7 millions d’euros dégagé par Khalifa Airways », a observé Abdelmoumene Khelifa, pour signifier le bon état de santé financière de l’ex-compagnie aérienne au moment de sa dissolution.
Le juge a également interpellé l’accusé sur la question de l’achat de stations de dessalement de l’eau de mer par l’accusé. « L’achat de ces stations n’était qu’un prétexte en vue d’obtenir des devises auprès de la Banque d’Algérie.
De plus, la facture pro-format de l’achat des stations était fausse alors que les deux stations pilotes étaient en très mauvais état et contenaient de l’amiante », a indiqué le juge, se référant à une expertise scientifique.
L’ex-groupe Khalifa avait décidé en 2001 de faire don à l’Algérie de deux stations pilotes de dessalement de l’eau de mer d’une valeur de 3,5 millions de dollars, lesquelles avaient été effectivement réceptionnées. Ce qui n’avait pas été le cas des trois autres, acquises au montant de 26 millions de dollars et n’ayant jamais été acheminées vers l’Algérie, lui a signifié le juge.
A cela, le prévenu a répondu que la facture en question était signée par une société saoudienne de renommée internationale et dont il ne pouvait, par conséquent, en douter de la probité. « J’ai cru bien faire et rendre service au pays au moment où une menace de sécheresse guettait les Algériens, mais j’ai fini par le regretter.
Des spécialistes m’avaient pourtant dissuadé de le faire mais j’étais persuadé que c’était la solution la plus rapide pour régler ce problème », a-t-il lâché, à ce sujet.
Interrogé, par ailleurs, sur le transfert « illégal » de la somme de 45 millions d’euros ayant servi au payement de sa villa à Cannes (France) alors que sa valeur initiale était de 100 millions d’euros, le prévenu a expliqué qu’il s’agissait de 30 millions d’euros seulement qui représentaient un investissement de la défunte compagnie aérienne alors que l’immobilier en question lui a été vendu par « une personne en faillite ».
Énumérant le reste des sociétés détenues par le groupe et liées notamment aux domaines de l’informatique, du catering, du graphique, le juge Menouar lâche cette question: « Maîtrisez-vous le transfert des fonds de toutes ces sociétés ».
Ce à quoi l’accusé rétorque, avec une assurance évidente, en affirmant détenir une « dose de nationalisme » suffisante pour qu’il investisse autant de domaines.
Le procès après cassation de l’affaire Khalifa Bank s’est ouvert lundi au tribunal criminel de Blida, huit années après le premier procès en janvier 2007 au niveau du même tribunal.
Au total, 75 prévenus, dont 21 détenus en plus de l’accusé principal Abdelmoumene Khelifa, comparaîtront pour la deuxième fois lors de ce procès qui verra, par ailleurs, la présence de plus de 300 victimes et partie civile.(Aps)