Mehdi Abeid était l’invité de l’émission «Fou de foot» sur la radio Beur FM, où il répondait aux questions des chroniqueurs de cette émission, dont notre correspondant en France. Le joueur de Newcastle a, entre autres, parlé de sa nouvelle vie à Newcastle, des raisons qui l’ont fait quitter Lens, de l’équipe olympique, et bien sûr de l’équipe nationale A, qu’il rêve d’intégrer.
– Mehdi Abeid, lors de cette trêve du football mondial pour cause de fête de fin d’année, vous, «les Anglais» êtes les seuls à faire l’actualité. N’est-ce pas frustrant ?
– Non ce n’est pas frustrant, bien au contraire. Le «Boxing Day» comme on l’appelle ici, en plus d’être une véritable institution, est un moment très important et cela pour plusieurs raisons. Sur le plan général, c’est souvent lors de cette journée du «Boxing Day», qui a lieu le 26 décembre, que le championnat d’Angleterre se perd ou se gagne, tout dépend de quel point de vue on se place. Et sur un plan plus personnel, c’est l’occasion pour des jeunes joueurs comme moi, d’avoir notre chance et d’obtenir du temps de jeu.
– Vous ne regrettez donc pas d’avoir quitté la France ?
– Non, je ne le regrette vraiment pas. A Lens, certains dont je tairais le nom, m’avaient vraiment mis des bâtons dans les roues et refusaient, malgré mes bonnes prestations à l’entraînement, de me donner ma chance. Je sentais que je stagnais, que je n’évoluais plus. Newcastle me voulait vraiment, ils m’avaient supervisé à de nombreuses reprises et lorsqu’ils m’ont approché, on a tout de suite été dans le concret, il n’y avait pas de zone d’ombre, le plan de carrière qu’ils avaient tracé pour moi et qu’ils m’avaient proposé était net et sans bavures et j’ai signé sans aucune appréhension. Je ne le regrette pas, car j’ai été accueilli très chaleureusement ici à Newcastle et les relations avec mon club sont au beau fixe.
– Ce sont donc ces bonnes relations qui vous ont permis de jouer la CAN U23 hors date FIFA ?
– Exactement, lorsqu’on est correct et honnête, on est récompensé. J’ai demandé à l’entraîneur en chef de Newcastle, Alan Pardew, une autorisation pour disputer cette CAN U23, lui expliquant que c’était aussi qualificatif pour le tournoi olympique. Au début il était contre, mais voyant que je voulais vraiment y aller, il m’a autorisé à me rendre au Maroc en me disant : «Cette compétition va te permettre de t’aguerrir, mais fais attention ne te blesse pas.»
– Vous avez signé en professionnel à 15 ans et demi à Lens, puis depuis le mois de juillet, vous êtes à Newcastle, et vous avez aussi disputé une CAN U23. Quelles sont les différences entre la Ligue 1 française, la Premier League et l’E.N ?
– Tout d’abord, l’équipe nationale c’est incomparable, on a une pression énorme, on joue pour son pays, on a des frissons de partout et on donne tout pour que le pays gagne. Mais en ce qui concerne la différence entre deux équipes professionnelles, comme Lens et Newcastle, dans lesquels j’ai évolué, je vous dirais que le fossé est plus idéologique qu’autre chose. Même si à Lens, comme à Newcastle, nous bénéficiions de conditions d’entraînement et de jeu formidable, la philosophie du jeu n’est pas la même. En Angleterre il ya plus d’engagement physique, ça joue à 100 km à l’heure et il y a beaucoup moins de tactique et de défense qu’en France. Là-bas, il faut attaquer de la première à la dernière seconde de jeu, et à une vitesse folle et si vous avez tout donné, défaite ou victoire, vos supporters vous applaudissent. Moi, j’aime bien ce jeu total, qui régale les spectateurs sans calcul et à bloc.
– Cela nécessite quand même une condition physique irréprochable non ?
– Si, bien sûr, mais je bosse dur au quotidien pour ça. Vous savez, pour réussir dans le football moderne, il n’y a pas de secret, il faut de l’humilité, écouter les anciens, du travail et une hygiène de vie irréprochable. A mon arrivée à Newcastle, lors de la première séance d’entraînement avec les Magpies, je m’attendais à trouver le même rythme d’entraînement qu’en France, eh bien croyez-moi, je m’étais lourdement trompé. Lorsque vous vous entraînez avec des Coloccini et des Ben Arfa, cela va très très vite, et au bout de 5 minutes, j’étais déjà très éprouvé. Ensuite, j’ai pris le rythme et el hamdoullah, je m’y suis habitué et cela m’a fait progresser.
– Depuis votre retour, vous êtes souvent dans le groupe pour la Premier League, on vous voit sur le banc, mais vous n’entrez pas. Cela n’est-il pas frustrant ?
– Pas du tout, au contraire. Vous vous rendez compte du chemin que j’ai parcouru. Je viens du RC Lens où on ne me faisait pas jouer. J’arrive en fin de mercato à Newcastle, qui, cette année, tourne très bien. Et là, après quelques mois de travail, j’ai disputé les matchs de CUP, alors que je pensais mettre plus de temps à y arriver, vu la densité des joueurs qui composent le groupe pro, et, cerise sur le gâteau, depuis mon retour de la CAN U23 au Maroc, je suis régulièrement dans les 18, et même sur le banc. Incha Allah, il ne me reste qu’à m’accrocher, mettre un dernier coup de collier et franchir ce dernier palier, à savoir jouer en Premier League. Mais pour en arriver là, il faudra convaincre mon entraîneur, Allan Pardew, qui ne reconnaît qu’une seule valeur, le travail.
– Vous semblez respecter énormément Alan Pardew ?
– Comment ne pas respecter cet homme ! C’est un grand entraîneur et manager du football anglais, comme on dit ici, et j’apprends énormément à son contact.
– Il a clairement dit dans la presse anglaise que lors du départ pour la CAN, du titulaire à votre poste, le Sénégalais Cheikh Tiote, il allait vous donner du temps de jeu, ça vous évoque quoi ?
– Que du bon, cela prouve qu’il me fait confiance et j’en suis très heureux. Cela récompense mes efforts et mon travail. En plus, mon aventure avec l’équipe nationale U23 a servi, puisque cela m’a permis d’accumuler du capital expérience et de montrer que j’avais du caractère. Mes récents passages sur le banc, avec la ferveur populaire indescriptible, et le fait de serrer la main à des géants de la planète football et de Newcastle United, comme Allan Shearer, qui vient vous souhaiter bonne chance, me donne envie de me surpasser plus encore.
– Mehdi Abeid est donc prêt pour la Premier League ?
– Bien sûr que je suis prêt. C’est pour cela que je me lève chaque jour. Je ne sais pas si ma première prestation sera réussie ou non, mais je donnerai tout sur le terrain.
– Quel est exactement votre poste ? Sur le terrain, votre polyvalence fait qu’on a du mal à vous situer
– C’est normal, car je suis un milieu entre le 6 et le 8. Je suis à l’aise dans les deux. En football moderne, il n’ya plus de 6 pur, c’est-à-dire de milieu récupérateur ou de 8 pur, c’est-à-dire de relanceur. Aujourd’hui, un milieu récupérateur doit savoir récupérer et aussi relancer proprement pour faire repartir son équipe du bon pied.
– En sélection on vous a vu très nerveux et beaucoup invectiver les arbitres ?
– (Rires) Oui, c’est vrai. Si dans la vie je suis quelqu’un de très doux, sur le terrain je suis un compétiteur, j’ai horreur de la défaite et cela me rend très nerveux. Et c’est vrai que lorsque les arbitres à la CAN prenaient des décisions curieuses, je ne me privais pas pour le leur faire savoir.
– La CAN U23, vous donne-t-elle encore des regrets ?
– C’est clair que, comme tous les Algériens, je suis déçu que notre équipe ne se soit pas qualifiée pour les Jeux olympiques. Nous avions de la place pour passer, mais bon, cela ne sert à rien de ressasser le passé, il faut se tourner vers l’avenir et se dire qu’on a accumulé du capital expérience et que la prochaine fois on saura mieux gérer ce genre d’événement. Je préfère, sur un plan personnel, ne retenir que l’aventure humaine au sein d’un groupe de jeunes Algériens soudé par et pour l’amour du pays. J’ai découvert un groupe de frères, avec un grand frère, Mohamed Chalali, et un petit frère, Jugurtha Hamroun. Je retiendrai, bien sûr, la joie énorme de la victoire face au Sénégal et l’échec de justesse face au Maroc, mais que voulez-vous, c’est ça le football. Personne n’a à se reprocher des choses dans cet échec, tout le monde, joueurs et staff compris, ont fait le boulot. Disons que c’est l’inexpérience, le manque de confiance en soi, et une multitude de petits détails, qui, additionnés, à ce niveau-là, ne pardonnent pas.
– Maintenant, Mehdi Abeid, sociétaire de Newcastle United, pense-t-il à l’équipe nationale A ?
– Bien sûr que j’y pense, comme tout Algérien qui joue au football. C’est mon objectif numéro 1, c’est ce qui me fait me lever chaque jour avec une place de titulaire à United, car les deux sont liés. Il faut que je me fasse une place au soleil dans mon club, pour rêver à l’équipe nationale, je dois donc travailler et encore travailler.
– Si Vahid Halilhodzic vous appelle demain matin pour venir au prochain stage, que lui répondrez-vous ?
– (Rire) Je lui répondrai par un énorme OUI !
– Que peut-on vous souhaiter pour l’avenir ? Un dernier mot ?
– Une bonne et heureuse année et surtout une bonne santé à tous les Algériens. En ce qui me concerne, je souhaite jouer avec Newcastle, essayer de m’imposer, et pourquoi pas, ensuite, jouer en équipe nationale A, la cerise sur le gâteau.
M. B