Bouguerra Soltani passe la main après 10 ans de règne
Le choix porté sur Mokri témoigne amplement de la nouvelle politique qu’adoptera le MSP lors des prochains rendez-vous politiques. Le MSP semble donc avoir choisi la voie de la rupture définitive avec les partis au pouvoir.
Le 5e congrès du Mouvement de la société pour la paix (MSP) a clos ses travaux samedi dernier avec l’élection de Abderrezak Mokri. Cet ex-vice-président du MSP, a été choisi par 177 de ses pairs contre 65 seulement pour son rival Abderrahmane Saïdi, ex-président du madjlis echoura. Un épisode qui met fin à dix années de règne de Bouguerra Soltani à qui il est reproché d’avoir fait du parti un faire-valoir les politiques des gouvernements successifs. D’ailleurs, en ouvrant ce 5e congrès du MSP, Bouguerra Soltani avait reconnu sa responsabilité dans la décomposition de sa formation islamiste, qui se veut proche de la tendance des Frères musulmans dans le Monde arabe. Sa participation à l’Alliance présidentielle et aux différents gouvernements en tant que ministre et ministre d’Etat, lui ont fait perdre le charisme connu de son prédécesseur, Cheikh Nahnah. C’est cette image de ce que doit être un leader politique que le nouveau président du MSP veut incarner. Ainsi, avec l’élection de Mokri, le pouvoir à définitivement perdu le MSP. La plupart des militants qui estimaient que la voie suivie par l’ex-président n’était pas la bonne, voient en l’élection de Mokri le «messie» qui mettra le MSP sur la voie des formations islamistes ayant enfourché le printemps arabe pour prendre le pouvoir, à l’instar des Frères musulmans égyptiens, tunisiens, marocains et libyens. Ils ont trouvé en la personne de Mokri, l’homme de la «situation». D’autant plus que ce membre fondateur du MSP avec Mahfoud Nahnah et Mohamed Bouslimani, est connu pour son ton virulent et pour être un redoutable tribun. Le choix porté sur Mokri témoigne amplement de la nouvelle politique qu’adoptera le MSP lors des prochains rendez-vous politiques. Le MSP semble donc avoir choisi la voie de la rupture définitive avec les partis au pouvoir. La première tâche de Abderrezak Mokri sera donc d’unifier son parti et ce, dans la perspective de l’élection présidentielle d’avril 2014. Contrairement à son prédécesseur, il n’hésite pas à braver le danger en allant au charbon comme ce fut le cas lors de l’offensive israélienne contre Ghaza. Il était même parmi les membres du navire turc Mavi Marmara qui avait fait l’objet d’un raid israélien en 2010, lors duquel Mokri avait été détenu pour quelques heures, avant d’être relâché en compagnie d’autres militants pro-palestiniens. Incarnant l’aile radicale au sein du parti, il jouit d’un capital confiance auprès des militants. L’élection de Mokri doit-elle être perçue comme une seconde phase du retour du MSP à son «autonomie» après son retrait de l’Alliance présidentielle? Après avoir échoué lors des révolutions arabes à mobiliser les foules et surtout à fédérer la mouvance islamiste, va-t-il cette fois-ci se poser en locomotive des Frères musulmans algériens? Justement, en parlant du «renouveau» du parti, Mokri sous-entend-il mettre au point une nouvelle stratégie tant vis-à-vis du pouvoir que de son action sur le terrain? Une chose est sûre, si les observateurs au fait des affaires internes du MSP voient en l’élection de Mokri une «surprise», ils estiment également que ce dernier ne manquera pas de «booster» le parti en prévision des prochaines échéances politiques. La réponse est d’ailleurs contenue dans son allocution prononcée à l’issue de son élection. «Je vais oeuvrer à l’unification des rangs du MSP et du mouvement islamiste dans le pays.» Le nouveau président du mouvement a indiqué, en outre, que le MSP réintégrera le gouvernement «quand le peuple lui accordera sa confiance lors des prochains rendez-vous électoraux». Cela veut-il dire que le MSP va retirer ses ministres du gouvernement? Ce qui n’est pas à écarter, sachant que Mokri s’est de tout temps opposé à la politique d’ «entrisme» adoptée par son prédécesseur. «Le renouveau du parti interviendra quand les décisions prises au niveau de ses institutions seront respectées par tous, moi-même en premier», a déclaré M.Mokri. Sur un autre chapitre, l’une des priorités du nouveau président demeure la réunification du MSP qui a connu, au cours de ces dix dernières années, une véritable «hémorragie interne». Plusieurs cadres ont claqué la porte pour créer des partis politiques, à l’image de Menasra et Amar Ghoul ou pour rejoindre d’autres partis.