Abdelaziz Djerad, politologue, à propos de la guerre au Mali “L’Algérie n’a pas l’intention d’intervenir en dehors de ses frontières”

Abdelaziz Djerad, politologue, à propos de la guerre au Mali “L’Algérie n’a pas l’intention d’intervenir en dehors de ses frontières”

L’intervention militaire au Mali, impliquant le déploiement de l’armée française, ne doit pas exclure le recours à “la négociation pour une sortie de crise”.

C’est ce qu’a déclaré, hier, le politologue Abdelaziz Djerad sur les ondes de la radio Chaîne III. “Tout conflit n’élimine pas une sortie de crise, l’aspect politique ou l’aspect des négociations”, a expliqué l’invité de la rédaction, qui pense que Paris a dû informer notre pays de son plan d’intervention militaire.

Selon lui, l’heure n’est pas à se demander si cette guerre est “bonne ou mauvaise”, d’autant qu’elle ne se pose pas en ces termes, actuellement. “Il fallait, du point de vue du gouvernement malien, faire appel à l’armée française, pour intervenir et bloquer l’offensive d’Al-Qaïda, d’Aqmi et des autres courants terroristes vers le sud du Mali”, a soutenu M. Djerad. Bien que “la préparation de l’offensive militaire française” se soit faite, il y a quelques mois, et même s’il y a eu “un habillage juridique”, à travers la résolution 2085 de l’ONU, qui prévoit “une intervention militaire éventuelle des forces interafricaines sur le sol malien”, “l’élément déclencheur” de cette guerre avant l’heure au Mali est à chercher, d’après le politologue, dans “cette volonté des forces terroristes d’aller vers le Sud (du Mali) et de déstabiliser le gouvernement malien”. Plus encore, ajoutera-t-il, “c’est l’occupation totale du Mali qui intéressent les groupes terroristes”.

Abdelaziz Djerad a néanmoins noté que la France a interprété “à sa manière” la résolution onusienne, justifiant son intervention militaire par la mise en avant de l’article 51 de la Charte des Nations unies relatif au droit de légitime défense individuelle ou collective. Il a également rappelé les trois principaux axes de la résolution 2085, politique, humanitaire et sécuritaire, en soulignant que “du point de vue de Paris, cette résolution n’est pas en contradiction avec l’intervention militaire”.

L’invité de la Chaîne III est, en outre, revenu sur “deux aspects fondamentaux”, défendus sans cesse par l’Algérie, à savoir la distinction entre les mouvements au nord du Mali qui ont d’ailleurs “certaines revendications légitimes” et l’Aqmi, qui est composée de troupes terroristes qu’“il faut éliminer absolument”.

“Il faut que le gouvernement du Mali comprenne que la guerre totale contre les Touareg est une erreur stratégique monumentale qui mettra en cause certainement l’intégrité et la stabilité du Mali”, a annoncé le politologue algérien. Ce dernier n’a pas caché qu’il y a “un risque immense” à faire durer cette guerre, sans omettre de relever l’autre risque, celui de l’incapacité des troupes africaines à contenir les terroristes et à “régler le problème en quelques semaines ou en quelques mois”. Surtout qu’il ne s’agit pas d’une guerre conventionnelle, mais d’une guerre entre des armées et des groupes terroristes disparates pouvant “frapper à n’importe quel moment” et ayant “une bonne connaissance du terrain”.

Par ailleurs, l’intervenant a fait part de ses appréhensions, quant aux conséquences nuisibles de la guerre sur l’Algérie et les autres pays de la région, ainsi que sur les risques de représailles de la part des terroristes qui “ont des ramifications un peu partout”, y compris en France et en Europe.

“L’Algérie ne va pas intervenir en dehors de ses frontières”, dira M. Djerad, plaidant pour “la sécurisation des frontières” et saluant “l’approche commune et surtout les actions” dégagées dans le cadre tripartite algéro-tuniso-libyen. Plus loin, M. Djerad a invité les autorités du pays à mener “un travail de communication” et les partis politiques à “se mobiliser et (à) constituer un front intérieur” contre cette menace qui n’a pas encore dévoilé tous ses secrets.

H A