Abdelaziz Bouteflika appelle la France socialiste à ouvrir une nouvelle page avec l’Algérie

Abdelaziz Bouteflika appelle la France socialiste à ouvrir une nouvelle page avec l’Algérie

Le président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika a appelé la France à une lecture objective de l’Histoire et à s’éloigner de la polémique sur la mémoire et des enjeux conjoncturels.

Le président de la République a adressé un message au nouveau président de la France, M. François Hollande, exprimant implicitement la volonté de mettre un terme à l’électrification des relations bilatérales, comme elles l’ont été pendant le mandat du président Sarkozy.

Dans le discours qu’il a prononcé, mardi à Sétif, à l’occasion de la commémoration du 8 Mai 1945, le président de la République s’est montré moins impulsif par rapport à ses précédents discours contre le colonialisme. Le président de la République a été très calme, donnant l’impression de vouloir ouvrir une nouvelle page avec la France, après l’élection du nouveau président M. François Hollande. « seule une lecture objective de l’Histoire » permettra à la France et à l’Algérie « de transcender les séquelles du passé douloureux », « Seule une lecture objective de l’Histoire, loin des guerres de mémoire et des enjeux conjoncturels, est à même d’aider les deux parties à transcender les séquelles du passé douloureux pour aller vers un avenir où règnent confiance, compréhension, respect mutuel et partenariat bénéfique », a déclaré le président en commémorant le 67e anniversaire du massacre de nationalistes algériens de Sétif, Guelma et Kharata . Le discours du président peut être interprété comme étant une réponse au message de François Hollande lors de sa visite en Algérie, le mois de décembre dernier, à l’invitation du secrétaire général du Front de libération nationale, M. Abdelaziz Belkhadem. M. François Hollande avait, alors, déclaré au siège du parti du Front de Libération Nationale que s’il venait d’arriver au pouvoir, les socialistes instaureront des relations ordinaires avec les algériens. Il est clair que François Hollande exprimait son insatisfaction sur la performance de son prédécesseur de la Droite, M. Nicolas Sarkozy, en ce qui concerne les relations de la France officielle avec l’Algérie, en particulier dans leur volet Historique ou « le conflit de la Mémoire ». « J’ai œuvré pendant 50 ans à bâtir des relations d’amitié et d’association avec les différents du pays du monde, en premier lieu, la France, en dépit du prix cher que les générations successives du peuple algérien ont payé pour la liberté et la dignité. Le président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika a consacré la plus grande partie de son discours aux élections législatives. Dans ce cadre, il a appelé le peuple algérien à se rendre massivement aux urnes pour choisir leurs candidats. Le président de la République et afin de convaincre le peuple algérien de se rendre aux urnes, il a utilisé des termes forts tels que « le pays fait face à des menaces sérieuses », « éviter au pays un mauvais sort » et « l’importance de ces élections qui interviennent dans une conjoncture sensibles », « une stations décisive » « le devoir électoral »….etc.

Par H. Yes

Le texte intégral du discours du président de la République :

« Mesdames, Messieurs,

Nous nous retrouvons aujourd’hui dans l’accueillante et généreuse ville de Sétif, la cité antique aux hautes valeurs qui a donné au patriotisme tout son sens, la ville héroïque et triomphante d’un occupant acharné qui a tenté de la réduire à néant par ses horribles massacres mais dont elle a eu raison grâce à la détermination et au courage inégalés de ses femmes et de ses hommes. Parmi ces femmes et ces hommes il en est qui sont tombés au champ d’honneur durant la glorieuse guerre de libération. Les autres, ceux qui ont porté l’emblème de la victoire s’engageront au lendemain de l’indépendance dans la bataille de la construction et du développement pour faire de Sétif une des plus importantes villes d’Algérie porteuse d’espoirs de renouveau et de progrès. Comme toutes les régions de notre pays, Sétif a été tout au long de l’histoire un des bastions de la résistance et un centre de rayonnement des sciences, des lettres, des arts et des sports. A ce titre, je me réjouis de constater que vous savourez encore la belle victoire de votre équipe séculaire, l’Entente de Sétif, qui a remporté avec mérite et pour la huitième fois la coupe d’Algérie. Je tiens également à féliciter le Chabab de Belouizdad pour sa performance de qualité et son jeu élégant. L’équipe a eu moins de chance mais a forcé l’admiration de tous les sportifs du pays et de toute façon le plus grand vainqueur reste le football algérien et aussi ses supporteurs de plus en plus enclins à encourager leurs clubs favoris d’une manière civilisée. Nous félicitons tous nos sportifs et nous nous félicitons dans le même temps de cet exploit. Sétif est aujourd’hui un grand pôle économique, culturel et universitaire qui destine certainement sa jeunesse aux missions les plus grandes en matière d’enseignement, de travail et de développement. Inspirée des hauts faits des aînés, cette jeunesse relèvera le défi des réformes grandioses engagées par l’Algérie à tous les niveaux. L’enjeu est national, je le rappelle à partir de cette région singulière à toute la jeunesse algérienne qui a la patrie chevillée au corps, qui aspire au progrès, à la paix et à la stabilité et qui, de ce fait, est assurément à la hauteur des défis qui se posent à notre nation arabo-musulmane.

Mesdames, messieurs,

De Sétif, ville séculaire et symbole, nous commémorons aujourd’hui l’anniversaire tragique du 8 mai 1945 dans une atmosphère de recueillement à la mémoire des martyrs, femmes, hommes et enfants sans défense, qui ont été massacrés dans de nombreuses régions du pays, notamment à Sétif, Guelma et Kherrata, alors qu’ils étaient sortis pacifiquement, les drapeaux à la main, à l’instar des peuples qui ont vaincu le nazisme et le fascisme, pour célébrer la fin de la guerre mondiale à laquelle leur peuple a pris part, avec l’espoir d’obtenir leur droit légitime à la liberté et à la dignité. En cette date mémorable, nous ne pouvons que songer au lourd tribut versé par le peuple algérien pour sa liberté et sa dignité. Pourtant, l’Etat algérien indépendant s’est attelé depuis 50 ans, avec un esprit magnanime et une vision prospective, à construire des relations d’amitié et de coopération fructueuse avec les différents pays du monde, à leur tête l’Etat français. Des relations fondées sur les intérêts communs, partant de sa foi en la nécessité de faire de la mer Méditerranée un espace de paix et de bien commun entre les peuples de la région, et de son aspiration à un ordre international plus équitable, plus solidaire et plus tolérant. Seule une lecture objective de l’histoire, loin des guerres de mémoire et des enjeux conjoncturels, est à même d’aider les deux parties à transcender les séquelles du passé douloureux pour aller vers un avenir où règnent confiance, compréhension, respect mutuel et partenariat bénéfique.

Mesdames, messieurs,

La liberté et la souveraineté nationale ont été recouvrées au prix d’énormes sacrifices. Un tribut tout aussi lourd a été versé pour préserver l’unité du pays et le régime républicain et consacrer la sécurité, la paix et la réconciliation. C’est pourquoi, le peuple algérien, notamment ses générations montantes, doit comprendre que la liberté, la stabilité, le progrès et la démocratie dont jouit le pays sont le fruit d’énormes sacrifices et d’importants efforts qu’il importe de mesurer à leur juste valeur afin que ces acquis considérables soient préservés avec fierté et confortés par la poursuite de l’édification et de la réforme en vue d’atteindre le progrès escompté et d’occuper une place respectable dans le concert des nations. Nous vivons une étape décisive dans l’histoire du pays, qui exige de conjuguer les efforts pour une amorce de qualité du processus de développement et de renouveau cinquante ans après le recouvrement de la souveraineté nationale. C’est une étape sensible ouverte aux implications d’une mondialisation envahissante qui nous engage dans une ère chargée de défis complexes qui requièrent une célérité d’adaptation et qui nécessitent surtout le renforcement de la vigilance et de la mobilisation et la maîtrise des sciences et des technologies modernes. Il s’agit d’une nouvelle ère ouverte aux mutations fulgurantes où il n’y a point de place aux peuples faibles. L’Algérie a été positivement réactive à la marche de l’Histoire en menant une grande guerre de libération, en réalisant le développement global durable et en adoptant une démocratie authentique renforcée ces dernières années par un ambitieux programme de réalisations socio-économiques et des réformes politiques d’envergure visant essentiellement à consolider les fondements d’un Etat de droit dans une société soudée où les libertés individuelles et collectives et les droits de l’Homme vont s’enracinant. Dans ce contexte apparaît l’importance majeure des prochaines élections législatives par rapport à la délicate conjoncture actuelle ou aux effets considérables qui en découleront, ce qui fait de cette échéance une épreuve de la crédibilité du pays. Une étape assurément décisive dans le parachèvement du programme de réforme et de modernisation.

Mesdames, Messieurs

Pour tous ceux qui ont été dépossédés de leurs terres, de leur identité, tous ceux qui sont morts de pauvreté, d’ignorance et de maladies, les opprimés et exilés dans leur pays et dans des îles lointaines, ceux qui sont morts en martyrs, qui ont fait preuve de patience et de résistance sur chaque parcelle de notre terre révoltée, ceux enfermés dans des cellules obscures ou dans des camps funestes, brûlés dans des grottes oubliées ou enterrés vivants dans des fosses communes, sans nom aucun, Pour tous les chouhada du 8 mai 1945, martyrs de la résistance populaire, du mouvement national et de la glorieuse Révolution de novembre, les valeureux héros qui se sont sacrifiés pour que vivent leurs enfants et leurs petits enfants en liberté et dans la dignité, Pour les martyrs du devoir national, toutes catégories confondues à leur tête les éléments de l’Armée nationale populaire et de tous les corps de sécurité qui ont fait face à la machine de la mort et du terrorisme abject pour que la République demeure debout unifiée et réconciliée, digne, fière et rayonnante, Fidèle au serment sacré et à la mémoire, je m’adresse à vous dépositaires du legs des chouhada et fidèles à leur serment, vous qui êtes capables de relever le défi comme vous l’avez fait à tous les tournants décisifs que la nation a eu à affronter, vous qui avez retenu les leçons et les enseignements, vous qui avez l’esprit accablé par les affres du colonialisme et de la fitna, qui êtes conscients des dangers complexes qui guettent le pays dans un espace géographique en proie aux bouleversements, vous qui êtes soucieux de la stabilité et de la sauvegarde du pays et désireux de poursuivre la réforme et d’opérer le changement avec conviction et responsabilité, par des moyens réfléchis à travers lesquels vous montrerez au monde le visage reluisant de Algérie d’aujourd’hui et celle de demain. A ce titre, je vous appelle enfants d’Algérie, femmes et hommes, à être à la hauteur des défis qui s’imposent au pays pour affirmer votre engagement et votre mobilisation collective et répondre à l’appel de la nation. Tout comme est sorti le peuple algérien en ce même jour, il y a de cela 67 ans, uni, mobilisé, clamant haut et fort sa position, et défendant avec courage et dignité sa cause nationale, je vous appelle tous à sortir en masse le jour du scrutin pour amorcer une nouvelle étape du processus de développement, de réformes et d’évolution démocratique dans votre pays, l’Algérie. « J’appelle toutes les catégories de la société à exprimer leur choix libre et à élire leurs représentants nonobstant leur obédience ou leur appartenance, lors de ces législatives qui se distingueront des précédentes par une large participation de différents courants politiques, mais aussi par une forte présence des femmes et des jeunes sur les listes de candidatures favorisée par l’évolution démocratique dans notre pays. Ces élections seront exceptionnelles au regard des nombreuses garanties que nous avons mises en place, elles seront propres et transparentes à la hauteur des attentes de notre peuple. Des élections réussies grâce à la contribution de tous, d’une Justice indépendante, d’une Administration neutre, de partis actifs, d’associations dynamiques et vigilantes, d’une presse libre et d’observateurs nationaux et internationaux. Mon souhait est que le peuple algérien réponde à l’appel comme il nous a habitués à le faire dans les rendez-vous importants, en accomplissant son devoir national, en exerçant son droit constitutionnel et en assumant pleinement ses responsabilités en tant qu’acteur influent, conscient de son rôle dans la prise de décision, pour élire une Assemblée populaire nationale pluraliste forte d’une composante irréprochable qui reflète la réalité et les attentes de la nation et qui garantisse le droit de participation effective à tous y compris aux nouveaux partis et le choix de candidats compétents et crédibles porteurs de nouvelles approches et de programmes sérieux et judicieux. Fidèles à l’engagement éthique qui les lie à leurs électeurs, ces candidats seront appelés à prendre en charge et à transmettre les préoccupations de leurs électeurs. Ils devront être constamment mobilisés pour l’accomplissement de leur mission de la meilleure manière qui soit en tant que représentants de la nation en plaçant notamment l’intérêt suprême du pays au-dessus de toute autre considération. Ces élus constitueront une instance législative représentative des différentes catégories, obédiences et compétences de la société, digne de vos voix et de votre confiance et à même d’assumer les missions importantes induites par les exigences de l’étape à venir. Elle aura pour charge de parachever l’adaptation du système juridique et réglementaire national dans le sillage des réformes politiques, à leur tête la révision de la Constitution pour amorcer une ère nouvelle en matière de promotion de bonne gouvernance, de modernisation des institutions de la République et d’élargissement du champs des droits et libertés pour suivre l’évolution de la société et répondre aux exigences du développement au mieux des intérêts des citoyens. Les réformes, les législations et les nouvelles réglementations, quelle que soit leur qualité, ne sauraient constituer une fin en soi, la finalité étant l’application saine des politiques par tous les acteurs pour concrétiser notre aspiration collective de mise en place d’institutions constitutionnelles dont la crédibilité et la légitimité ne sauraient être remises en cause. Pour ce faire, nous nous devons d’œuvrer à réunir les conditions propices pour permettre aux Algériennes et aux Algériens d’assumer pleinement leur citoyenneté, de jouir de leurs droits, d’accomplir leurs devoirs et de contribuer à insuffler une forte dynamique au processus politique, économique et socioculturel du pays. Avant d’être une pratique et des mécanismes, la démocratie est une culture collective que doivent faire valoir aussi bien le pouvoir que l’opposition et la société civile ainsi que tous les acteurs de la scène politique. Elle est surtout l’aboutissement d’une évolution sociale profonde des nations par des voies et moyens qui ne sont pas forcément identiques ni similaires. L’histoire de l’Algérie est riche d’expériences et d’enseignements qui permettront aux Algériennes et aux Algériens de choisir les programmes les plus appropriés et les plus à même de permettre l’édification de l’Etat de Droit. L’accomplissement du devoir électoral est un acte de citoyenneté. La conscience nationale doit constituer le seul arbitre pour le choix de programmes, de candidats ou candidates compétents aux qualités politiques et morales incontestables. Les candidats en lice pour ces élections doivent pour leur part prendre conscience que cette étape de l’histoire de notre pays ne tolère pas le moindre comportement indigne ou répréhensible de nature à entamer la crédibilité de nos assemblées élues et annihiler la valeur morale et éthique du devoir politique du citoyen envers sa nation. Notre vœu aujourd’hui est que le succès des élections législatives soit à la mesure des efforts consentis dans le cadre de leurs préparatifs et de l’enjeu qu’elles impliquent. L’Etat de droit et de démocratie auquel nous aspirons ne saurait se concrétiser sans la mobilisation de toutes les franges du peuple qui doivent conjuguer leurs efforts pour encadrer et animer la scène politique nationale d’une part et protéger et dynamiser l’économie nationale d’une autre part. Tel est le seul moyen efficace qui garantisse les droits de notre peuple et assure l’avenir de notre pays.

Mesdames, messieurs,

Le pays est au seuil d’une étape cruciale dans laquelle nous sommes condamnés à réussir. Je suis convaincu à cet égard que le vaillant peuple algérien qui mesure l’évènement à sa juste valeur et reconnait le caractère sensible de la conjoncture ne faillira pas à son engagement envers sa patrie et sera au rendez-vous en cette année mémorable. Je demeure convaincu que les jeunes, sortis par millions de l’Ecole algérienne, ouverts au monde la connaissance moderne et des technologies de la communication et conscients des défis et dangers de la mondialisation sauront se dresser contre les ennemis du pays et faire face aux instigateurs de la Fitna et de la division ou aux velléités d’ingérence étrangère. Cette jeunesse montrera une fois encore qu’elle est à la hauteur de la responsabilité qui lui incombe et qu’elle relèvera le défi en exprimant fort sa voix pour élever haut celle de la nation, faisant de cette échéance un jalon supplémentaire dans le processus d’édification et de renouveau nationaux et du jour du scrutin un jour de fête pour l’Algérie.

Gloire à nos vaillants martyrs